Intervention de Jean Grellier

Réunion du 4 novembre 2016 à 9h00
Commission élargie : finances - affaires économiques - affaires étrangères - développement durable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Grellier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour l'industrie :

L'examen du budget de l'industrie s'inscrit, cette année, dans un contexte économique plus favorable que l'année dernière. Nous constatons une reprise de l'investissement, une diminution du taux de destruction d'emplois industriels et l'augmentation du taux de marge des entreprises. Ces bons résultats témoignent, en partie, des effets du pacte de responsabilité.

Le redressement industriel doit cependant demeurer une priorité nationale. L'industrie a un effet d'entraînement extrêmement important sur l'ensemble de l'économie puisque le secteur industriel assure 74 % des exportations et 80 % de la recherche et développement privée. Il faut pérenniser la politique industrielle active que la France mène depuis plusieurs années et l'adapter aux nouveaux défis. La politique industrielle passe, notamment, par les crédits budgétaires de l'action 3 du programme 134 qui regroupe les financements de ses actions de soutien. Le plafond de crédits alloués en 2017 aux dépenses d'intervention dans le domaine de l'industrie s'élève à 167 millions d'euros en crédits de paiement. La forte augmentation de ces crédits de paiement entre la loi de finances initiale pour 2016 et le projet de loi de finances pour 2017 s'explique par un changement de périmètre du programme 134, en l'espèce par l'inclusion dans ce programme des mesures en faveur des entreprises électro-intensives affectées par le prix du carbone.

L'avis que je donne à l'adoption du présent projet de budget de la mission « Économie » pour 2017 est favorable.

Je note toutefois que les crédits de politique industrielle pilotés par l'administration centrale ont diminué de 17 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2016. Ils soutiennent pourtant des opérations engagées par les filières professionnelles pour faire face à des enjeux de compétitivité, principalement sous forme d'appels à projets en faveur des petites et moyennes entreprises. Je souhaite rappeler ici que les interventions au titre de la politique industrielle ont un effet de levier important sur l'appareil productif et sur l'emploi, qui compense largement le montant des sommes dépensées. Je pense notamment au programme « Industrie du futur », qui amène les entreprises à franchir un pas sur la voie de la modernisation de leurs outils industriels et de la transformation de leur modèle économique par le numérique et qui peuvent être financées par le programme d'investissements d'avenir.

Il. serait également bon de sécuriser les crédits consacrés aux centres techniques industriels, aux comités professionnels de développement économique et organismes assimilés, en baisse de 11 %. Ces organismes exercent des missions primordiales de développement économique et technique au service des entreprises d'une filière et sont également financés par le produit des taxes affectées, dont le plafonnement fait toujours débat. Je m'associe à cet égard aux questions de mon collègue Jean-Louis Gagnaire.

La partie thématique du rapport se concentre sur la formation. Comme le soulignait M. Louis Gallois, ancien commissaire général à l'investissement, auditionné le 4 octobre 2016 dans le cadre du groupe de travail parlementaire sur l'industrie que j'ai l'honneur de présider, les deux leviers principaux qui permettront de poursuivre le redressement industriel de la France sont l'investissement et la formation.

Faire face aux mutations industrielles est un défi majeur du XXIe siècle. Ces mutations, tant sociétales, économiques, technologiques qu'organisationnelles, touchent tous les secteurs industriels. Certains métiers disparaissent, tandis que d'autres voient le jour. Au-delà de ce mouvement de création et de destruction d'emplois, ce sont les contenus mêmes des métiers industriels qui sont amenés à se transformer. Ces mutations doivent être anticipées au mieux et prises en compte dans le système de formation, tant initiale que continue. Il est indispensable de mettre en place un dialogue régulier entre les comités de filière, les ministères de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur, les autres ministères certificateurs et la Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP). Il faut que l'appropriation des travaux du Conseil national de l'industrie (CNI) par les différents ministères se traduise en termes opérationnels. Parvenir à un diagnostic partagé au niveau national est indispensable mais il est tout aussi nécessaire d'articuler ce diagnostic avec les réalités territoriales, non pas seulement au niveau régional mais également au niveau des bassins d'emploi. Une plus grande adéquation de la formation avec les besoins locaux permet de favoriser l'emploi, de conforter l'ancrage territorial des filières industrielles et de soutenir le tissu des PME et ETI industrielles.

Le rapport distingue quatre leviers pour faire de la formation un levier de compétitivité et de cohésion sociale : favoriser le recours à l'apprentissage, faciliter la montée en compétences des salariés, aider aux reconversions et mieux former les personnes éloignées de l'emploi.

Je poserai, pour finir, deux questions. Au cours des auditions a été évoqué un projet de texte consistant à comptabiliser les apprentis dans les seuils d'effectifs. Pour un même nombre de salariés non-apprentis, les entreprises ayant recours à l'apprentissage franchiraient plus rapidement que les autres ces seuils. Un tel projet est-il vraiment à l'étude ? Ce pourrait être un frein important à la croissance de ces entreprises qui ont pourtant le mérite de permettre le développement de l'apprentissage en France. D'autre part, le projet de loi de finances pour 2017 prévoit la création d'un fonds de concours de 350 millions d'euros au titre du programme 103 du budget de l'État « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » pour financer la continuité du plan « 500 000 formations supplémentaires » pour les chômeurs. Les excédents des organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) pourraient être sollicités. Une telle disposition ne risque-t-elle pas de les empêcher de mettre en oeuvre leurs propres actions en direction des demandeurs d'emploi ? Je recommanderais à tout le moins une concertation préalable aboutie.

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