Intervention de Michel Pouzol

Réunion du 2 novembre 2016 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Pouzol, rapporteur pour avis sur les crédits de l'audiovisuel public :

En ce qui concerne les « défaillances » de l'État, madame Martinel, le mot est un peu fort. Nous avons renforcé, au cours des années, l'indépendance de l'audiovisuel public et le rôle du CSA. On peut, certes, constater que les ministères de tutelle n'ont pas forcément joué leur rôle et qu'ils devraient le faire, a fortiori si ce type de projet devait se multiplier. Nous avons envisagé plusieurs pistes, qui restent à définir. Je pense, en effet, qu'on ne peut pas se passer d'une vision déterminée de l'État sur ces sujets, et notamment du ministère de la culture. C'est en ce sens que le terme de « défaillances » a été employé.

Monsieur Reiss, la perception de l'indépendance est effectivement très relative, mais, le jour où les rédactions de France Télévisions feront de la propagande pour le Gouvernement actuel, passez-moi un petit coup de fil, je suis curieux de voir cela et d'en mesurer l'efficacité ! Pour l'instant, cela ne m'a pas sauté aux yeux et je pense que ce n'est pas le sentiment général.

Plus sérieusement, la capacité de Franceinfo à tenir le budget est une question qui se pose globalement pour France Télévisions, on l'a vu avec le rapport de la Cour des comptes. J'y reviendrai tout à l'heure en répondant à Rudy Salles.

Par contre, ce dont je suis à peu près sûr, c'est que la chaîne d'information ne risque pas d'être une catastrophe budgétaire, parce que le poids de cette chaîne, basée sur une masse importante de redéploiements, n'est pas suffisamment lourd pour mettre en danger l'ensemble du groupe. Le financement de cette chaîne, assez modeste, prévient l'idée d'une catastrophe budgétaire.

Pour répondre à Rudy Salles, qui parlait du coût complet, il faut rappeler que comparer, aujourd'hui, des chaînes d'information privées et celle-ci est très difficile et peu réaliste puisque les modèles ne sont pas fondées sur les mêmes synergies. Nous disposons des surcoûts pour France Télévisions, c'est-à-dire ce qui n'est pas lié à des redéploiements. Nous pouvons donc à peu près évaluer le niveau de ce surcoût en période de croisière. Dans mon rapport, un tableau fait état d'une vingtaine de millions d'euros, supportés majoritairement par France Télévisions mais pas uniquement, et dont une partie se fera aussi par redéploiements. Ce montage budgétaire est l'assurance que cette chaîne est viable.

Y a-t-il trop de chaînes d'information ? La question mérite d'être posée, ce que je fais, d'ailleurs, dans mon rapport. Mais c'est le CSA qui peut juger de cet état de fait. Cela étant, la nécessité d'une chaîne publique d'information est incontestable, d'autant que lorsque nous avons auditionné les chaînes privées qui ont bien voulu se déplacer, personne n'a remis en cause la nécessité d'une chaîne d'information de service public.

Les audiences ad hoc étant une commande spécifique, elles ne peuvent pas être communiquées. C'est la nature du contrat. Pourquoi n'y a-t-il pas d'étude Médiamétrie pour l'ensemble de la chaîne ? C'est simplement une question de coût, qui représente aujourd'hui 10 % du budget de la chaîne. La direction a estimé que ce coût était disproportionné par rapport au résultat.

Par contre, il faut absolument que nous arrivions, à terme, à une évaluation de l'audience « quatre écrans » pour cette nouvelle offre. L'audience quatre écrans qui, je le rappelle, comporte notamment tout le numérique, est en effet fondamentale pour cette chaîne.

La première page du Parisien, que vous avez citée tout à l'heure, monsieur de Mazières, est effectivement catastrophiste. Je vous encourage à lire les deux pages suivantes où la seule allusion à Franceinfo consiste à dire que ce serait peut-être une porte de sortie par le haut pour la direction actuelle, ce qui est plutôt positif. Dans cet article, il est surtout question d'audience des émissions mais c'est un autre sujet.

Oui, il y a eu des recrutements extérieurs pour le lancement de Franceinfo. Je rappelle, dans le rapport, la nécessité de s'assurer que France Télévisions procèdera bien à quatre-vingt-huit redéploiements, pour atteindre les 175 équivalents temps plein prévus. Il faudra donc s'assurer que les projets de fusion des rédactions nationales et de non-renouvellement d'un départ à la retraite sur deux vont être mis en oeuvre pour aboutir à 50 % de redéploiements et 50 % de recrutements extérieurs. C'est la viabilité de la chaîne qui en dépend. Mais, pour l'instant, les réponses qui nous ont été faites sont plutôt rassurantes, même si les choses ne seront pas simples.

Pour répondre à Jacques Cresta, la participation du réseau régional de France 3 à Franceinfo ne doit pas entraîner une régression de l'offre régionale et locale d'information. Nous devons y veiller. C'est pourquoi je rejoins la proposition, que vous avez formulée dans votre avis sur le projet de COM, de préciser et clarifier les objectifs de la nouvelle direction en matière d'évolution de l'offre régionale.

Il est toutefois important de remarquer qu'aujourd'hui, les premières réactions à l'égard de la chaîne info sont plutôt bonnes dans les antennes régionales, parce qu'elle crée une sorte de dynamisme, les chaînes régionales se contentant jusqu'à présent de nourrir deux éditions par jour. Il y a désormais la sensation qu'on peut nourrir une antenne à longueur de journée, donc, d'être proactif.

Cela étant, il faut veiller à aller au bout de la redéfinition de France 3, avec la fusion des rédactions nationales. Il faut que ce chantier aboutisse, faute de quoi France 3 serait potentiellement mise en danger. On peut, dans une certaine mesure, faire le parallèle avec Radio France et le réseau France Bleu. C'est pourquoi je propose, dans mon rapport, de trouver, au moins pour le numérique, des collaborations de ce type pour que ces deux réseaux retrouvent un peu plus de vitalité et que la démarche proactive des directions rassure les personnels et les chaînes. J'insiste sur la nécessité de mettre en place une stratégie forte pour l'offre numérique. Il y va de l'avenir de ces réseaux.

Monsieur Féron, je suis, comme vous, très attaché à la création musicale. Il conviendrait que France Télévisions se mette autour de la table avec les acteurs de la musique – producteurs, syndicats d'interprètes, etc. – pour définir une réelle identité musicale.

On a parfois du mal à différencier les chaînes du groupe France Télévisions. On se demande, par exemple, quelle est leur identité. La musique peut être un excellent facteur d'identification. On peut choisir une couleur globale pour certaines chaînes, ce qui permettra d'améliorer leur identification par rapport au public ciblé. C'est un vrai chantier que nous avons à mettre en oeuvre. Nous avons – Hervé Féron n'y est pas pour rien – renforcé les quotas de diffusion française dans les radios. Ce serait dommage que nous ne puissions pas entamer, avec France Télévisions, un travail de réflexion plus coordonné et peut-être moins contraint, mais qui aille dans le même sens.

Si la musique avait totalement disparu de France Télévisions ces dernières années, les modules « Alcaline » et le retour de l'émission « Taratata », s'ils ne sont pas suffisants, redonnent tout de même une place à la musique sur les antennes de France 2 et peuvent constituer le point de départ d'une réflexion plus globale sur la place de la musique à France Télévisions. Nous devons certainement aller plus loin dans ce domaine, car c'est important économiquement et culturellement.

Enfin, Madame Nachury, je vais examiner le rapport de la Cour des comptes et regarder de très près le problème du cumul entre les CDI et les CDD ou les CDD d'usage.

Pour le reste, cette chaîne publique d'information est un modèle différent, qui nous permettra peut-être de voir sous un autre angle l'ensemble du fonctionnement de la chaîne, y compris en matière de synergies. On parle toujours de l'action nationale de France 3 et de France 2, mais on voit bien qu'en créant des synergies, on peut créer des zones qui, financièrement, permettraient de dégager des ressources ou, du moins, de baisser certaines dépenses. J'y crois beaucoup, mais il nous faudra être très vigilant, car ce n'est pas gagné d'avance. Pour l'instant, les choses sont suffisamment bien encadrées pour pouvoir y arriver, mais le chemin est encore difficile. C'est pourquoi je plaide à nouveau pour une vraie présence de l'État autour de la table, notamment pour exercer un contrôle un peu plus serré qu'une simple audition parlementaire par an et un COM tous les cinq ans.

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