Le budget que vous nous présentez aujourd'hui, madame la ministre, promet une hausse historique de 5,5 % en crédits de paiement, ce qui lui permet d'atteindre un niveau sans précédent pour votre ministère, dépassant le seuil symbolique de 1 % du budget de l'État. Ces chiffres enthousiasmants permettent surtout au Président de tenir son engagement de 2012 de sanctuariser le budget de la culture sur le quinquennat, puisqu'en dépit des coupes drastiques opérées au fil des projets de loi de finances, vous arrivez à nous présenter un budget en hausse de 1,7 % par rapport à 2012.
Malheureusement, et une fois n'est pas coutume, cet enthousiasme cache de profondes inégalités territoriales, dont les premières victimes sont les outre-mer. C'est en tout cas ce que nous apprend la lecture du document de politique transversale fourni par le ministère du budget, qui désigne une fois de plus comme grande perdante la Guyane, que je représente sur ces bancs. En effet, si les crédits de paiement y sont en légère hausse, les autorisations d'engagement ont régressé de 21 % par rapport à l'année dernière. La faute au sacrifice du programme 175 « Patrimoine » sur l'autel de la réduction des déficits.
Pourtant, la Commission nationale d'évaluation des politiques publiques de l'État outre-mer, qui rendra jeudi son rapport biennal à votre collègue des outre-mer et au Premier ministre, et dont j'ai l'honneur d'être le rapporteur, identifie clairement la démocratisation de l'accès à la culture et le rayonnement des cultures d'outre-mer comme l'un des enjeux majeurs de cette fin de quinquennat pour ces territoires. Quel dommage, dans ce contexte, d'apprendre que, derrière cette volonté affichée de faire de la culture un véritable vecteur du vivre ensemble et de la réaffirmation des valeurs républicaines, comme dans la lutte contre le repli sur soi, les questions culturelles outre-mer s'effacent au profit d'intérêts conjoncturels jugés autrement prioritaires. Pourtant, question culture aussi, pardonnez-moi l'expression, ça urge !
Il est établi depuis longtemps que non seulement la culture est indispensable au développement des sociétés et à l'épanouissement des hommes, mais aussi que, loin d'être une dépense à perte, elle est source de forte valeur ajoutée pour nos économies. Avouez donc, connaissant le contexte de nos territoires ultra-marins, que ce soit du fait de leur composition sociale plurielle, de leur jeunesse ou encore de leur économie naissante, que la lecture du budget présenté ici porte à réfléchir quant à la place que l'on souhaite accorder à la politique culturelle dans ces régions en devenir, qui souffrent dans l'indifférence générale du manque de perspectives d'épanouissement de leur jeunesse.
Aussi, au regard de toutes ces observations, je me verrai obligé d'émettre un vote d'abstention sur cette mission budgétaire, tout comme le fera le groupe de la Gauche démocrate et républicaine auquel j'appartiens et qui s'abstiendra par mesure de solidarité vis-à-vis des territoires d'outre-mer.