Intervention de Rémy Rioux

Réunion du 12 octobre 2016 à 9h45
Commission des affaires étrangères

Rémy Rioux, directeur général de l'Agence Française de Développement :

Certes, leur taux est bas parce qu'ils sont très riches, mais en valeur absolue, les montants sont considérables, très supérieurs à ce que nous faisons dans nos pays européens. D'autant qu'ils ont aussi des structures dans les États fédérés, et un effet d'entraînement sur le secteur privé qui est plus fort que le nôtre.

Mais ce qui m'a surtout frappé, c'est le consensus fort qui a été atteint entre républicains et démocrates, qui a un effet dans leur propre pays. L'AFD va étudier ce que les Britanniques et les Américains ont fait, et nous aimerions le partager avec vous, notamment ceux d'entre vous qui font partie de groupes d'amitié interparlementaires ou qui réfléchissent à ce qui se passe dans ces pays, parce qu'il faut que nous mettions notre propre politique de développement sur un plateau un petit peu plus élevé. C'est de ce point de vue que le Royaume-Uni et les États-Unis me semblent très intéressants, peut-être pas des modèles, mais des références à étudier, plus que sur les outils, sur lesquels nous avons une carte à jouer en ce moment.

Cela m'amène à la question des priorités sectorielles. Dès que l'on dit climat ou autre chose, cela appelle toujours une question sur la santé ou sur l'agriculture. Le climat est un sujet très transversal. Lorsque l'on parle de priorité au climat, cela veut dire priorité à l'agriculture, à l'eau et à l'assainissement, et à l'énergie. Vous avez raison, les chefs d'État africains ne parlent pas de climat, ils parlent d'eau et d'énergie. Mais le deuxième élément de leur raisonnement est de nous demander comment faire de l'agriculture, des transports ou de l'énergie de manière compatible avec les engagements internationaux que nous avons tous pris. Ils nous demandent de les aider à basculer du charbon vers les énergies renouvelables, à faire du transport en site propre, et dans ce cas, il faut des moyens concessionnels pour amener cette bascule qui n'existent pas.

Je pense également que la force d'une agence bilatérale comme l'AFD est d'être très bonne sur le géographique. Il faut que nous ayons des priorités géographiques. Si les gens se tournent vers l'AFD, c'est parce que nous connaissons les pays sahéliens, c'est parce que l'agence a un bureau à Dakar depuis 1942, bien avant qu'il n'y ait des ambassadeurs. Nous avons cette connaissance, et c'est pour cela que les Allemands, ou les Saoudiens, que je recevais hier, se tournent vers nous. C'est parce que nous sommes forts géographiquement. Il est très important de renforcer la partie géographique de la matrice de notre activité.

En revanche, sur le sectoriel, la force de l'agence est d'avoir l'ensemble des compétences techniques pour répondre à la demande qui nous est adressée, et de ne pas trop choisir les priorités sectorielles. En comparaison avec la Caisse des dépôts, ce qui est étonnant à l'AFD est d'y trouver des spécialistes de la pêche, de l'agriculture, de l'eau, qui ont travaillé dans les entreprises françaises. Il faut absolument que nous gardions cette palette de pertinence technique dans les nombreux recrutements que nous faisons en ce moment. Il nous faut des ingénieurs, des financiers, qui apportent une vraie expertise dans nos discussions. Ensuite, il faut les mobiliser sur les priorités géographiques que vous nous assignez.

Si nous considérons seulement une logique sectorielle, comme la santé, le résultat sera un fonds multilatéral. Si l'on déclare que la priorité est la santé, on fait le fonds mondial contre le Sida. Si la priorité, c'est l'éducation au Sahel, alors l'AFD a une chance d'être l'outil pertinent, et d'être un moyen d'influence pour la France.

Les sujets de sécurité et de développement sont très importants. Il y a des exemples ratés, mais aussi des exemples réussis. Ma référence est notre action en Côte d'Ivoire. Le 7 avril 2011, sortie de la crise politique avec l'intervention militaire. Le 8 avril 2011, réunion de la zone Franc, logique régionale, autour de Christine Lagarde, avec le ministre ivoirien. Le 10 avril 2011, conseil d'administration de l'AFD, et nous décidons un financement de 350 millions d'euros, décaissé pour partie dès le lendemain, et nous avons fait repartir ce pays.

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