Intervention de Jean-René Marsac

Séance en hémicycle du 10 novembre 2016 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2017 — Aide publique au développement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-René Marsac :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur spécial, monsieur le rapporteur pour avis, chers collègues, le projet de loi de finances pour 2017 propose une hausse de 133 millions d’euros des crédits de la mission « Aide publique au développement » par rapport à 2016 : c’est la première hausse depuis 2010.

Pour mobiliser des recettes supplémentaires, nous avons adopté en première partie de ce projet de loi de finances une augmentation du taux de la taxe sur les transactions financières de 0,2 % à 0,3 % et ajouté les transactions intrajournalières. Ces amendements permettront, entre autres, d’allouer 270 millions d’euros supplémentaires à l’Agence française pour le développement, 528 millions d’euros issus de la taxe sur les transactions financières étant déjà alloués au Fonds de solidarité pour le développement.

Nous nous réjouissons d’ailleurs de voir que le document de politique transversale sur la politique française en faveur du développement intègre désormais une présentation détaillée des dépenses financées par le Fonds de solidarité pour le développement. Il reste que le cumul des outils intervenant en matière d’aide au développement rend encore l’ensemble peu lisible, et que le suivi budgétaire n’en est pas facilité. Le FSD, alimenté par une part du produit de la taxe sur les transactions financières et par la taxe sur les billets d’avion, s’élèvera en 2017 à 738 millions d’euros. Nous regrettons néanmoins que la part du produit de la taxe sur les transactions financières soit limitée par un plafond.

En 2017, l’effort global d’aide publique au développement devrait ainsi repartir à la hausse, pour atteindre 0,41 % du revenu national brut, ce qui est encore loin de l’objectif annoncé de 0,7 %. Il s’agit tout de même d’une progression de plus de 1 milliard d’euros entre 2016 et 2017, qui s’explique en partie par l’augmentation des frais d’accueil des réfugiés.

Notre groupe souhaite également rappeler que les moyens supplémentaires de l’APD doivent prioritairement être dirigés vers les pays les plus pauvres, conformément à nos engagements, et être particulièrement utilisés sous forme de dons ou de subventions. Comme vous l’avez dit tout à l’heure, monsieur le secrétaire d’État, c’est en privilégiant les dons et les subventions que nous pourrons atteindre les pays les plus pauvres, et la France s’est engagée à concentrer la moitié des subventions de la mission APD et les deux tiers des subventions mises en oeuvre par l’Agence française pour le développement sur les seize pays pauvres prioritaires.

En matière d’éducation, selon les chiffres déclarés par la France au comité d’aide au développement de l’OCDE, les seize pays pauvres prioritaires n’étaient bénéficiaires, en 2014, que de 16 % de l’aide consacrée par la France à l’éducation dans les pays en développement.

Par ailleurs, 74 % des moyens sont consacrés à l’éducation supérieure, et la quasi-totalité de ces derniers aux bourses et frais de scolarité versés pour l’accueil d’étudiants étrangers en France, ce qui est une bonne chose, mais ne permet pas d’atteindre la totalité de nos objectifs. L’appui aux systèmes d’éducation de base – primaire et secondaire –, qui pourrait bénéficier aux pays les plus pauvres, ne représente ainsi que 18 % de l’aide.

Autre priorité sectorielle de la France : la santé. À ce titre, la France contribue à UNITAID, une organisation internationale chargée de centraliser les achats de traitements médicamenteux, afin d’obtenir les meilleurs prix possibles. Depuis 2015, la France s’est engagée à verser une contribution annuelle de 100 millions d’euros à cette organisation. La France, pays fondateur, est l’un des plus gros contributeurs. Or le document de politique transversale indique une contribution, via le Fonds de solidarité pour le développement – FSD –, de seulement 80 millions d’euros en 2016 et 2017. Il est nécessaire d’augmenter la capacité du FSD, afin que la France respecte pleinement ses engagements en matière de santé.

Je souhaite également évoquer avec vous la demande des pays pauvres, qui aspirent à sortir des politiques d’aides pour évoluer plus rapidement vers la création d’entreprises susceptibles de créer une dynamique économique locale. Nous pouvons aller plus loin dans le soutien aux initiatives économiques, à la création et au développement d’entreprises, à la formation professionnelle, en renforçant les interventions non seulement de l’AFD, mais également de PROPARCO – Promotion et participation pour la coopération économique.

Dans ce cadre, l’économie sociale et solidaire peut également apporter une contribution majeure – et je regrette l’utilisation dans plusieurs documents de la notion de « social business », qui renvoie plutôt à une vision anglo-saxonne de cette économie, alors qu’il existe en France et dans plusieurs autres pays une culture particulière, qu’il faut savoir valoriser. Vous avez d’ailleurs organisé à ce sujet le 16 juin dernier, monsieur le secrétaire d’État, un colloque intéressant et porteur d’avenir.

Je souhaite aussi vous interroger sur l’articulation entre les actions de l’AFD et celles d’Expertise France, qui, comme son nom l’indique, vise à répondre à la demande croissante en expertise des pays en développement. Nous avons, dans ce cadre, réuni de nombreux opérateurs dans une démarche sans doute beaucoup plus efficace. Il a été récemment décidé que le soutien à l’amélioration de la gouvernance, qui relevait jusqu’ici directement du ministère des affaires étrangères, soit confié à l’Agence française de développement, et non à Expertise France. Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous éclairer sur la pertinence de ce choix et sur la manière dont s’articulent les interventions des deux agences ?

En conclusion, ce budget va dans la bonne direction et le groupe socialiste, écologiste et républicain votera les crédits de la mission « Aide publique au développement ».

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