Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame et monsieur les rapporteurs, chers collègues, la commission élargie du 7 novembre a adopté les crédits de la mission « Santé ». Les programmes 204 et 183 mobiliseront un budget de 1,256 milliard d’euros, 433 millions d’euros étant destinés au pilotage de la politique de la santé publique et à la prévention, et 823 millions d’euros à l’aide médicale d’État et au fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante.
S’agissant du programme 204, relatif à la prévention, la création de l’Agence nationale de santé publique a été saluée de façon unanime. Elle bénéficiera d’un financement de 151 millions d’euros, sans réduction d’effectifs après la fusion des établissements qui la composent. Un effort modéré et général a été demandé aux autres agences : il convient de rester vigilants afin qu’elles puissent assumer toutes leurs missions, devenues de plus en plus complexes.
Les crédits de ce programme sont destinés à la prévention des maladies chroniques, au cancer, à la santé mentale, aux maladies infectieuses, aux addictions, aux risques liés à l’environnement et à l’alimentation, à la couverture vaccinale devenue insuffisante. Ils sont en parfaite cohérence avec la loi de modernisation de la santé et avec les différents plans nationaux en cours d’exécution.
La culture de la santé publique dans notre pays doit être développée dans le droit fil de l’article 1er de la loi santé. Il nous faut voir la prévention comme un investissement, rendre plus lisible son architecture avec sa kyrielle d’intervenants, en rappelant ici cependant que les crédits qui lui sont consacrés ne se résument pas au programme 204.
En effet, selon le rapport de la DREES – Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques – sur les comptes nationaux de la santé de 2013, la prévention individuelle et collective représentait près de 6 milliards d’euros sur la dépense courante de santé. De plus, une grande partie de la prévention échappe à ce comptage car elle fait partie intégrante des soins courants : la DREES l’évaluait à 8,5 milliards d’euros en 2012.
La prévention nécessitera toujours davantage de crédits ciblés pour réduire les coûts exorbitants du tabac, de l’alcool, de l’obésité, des pathologies liées au vieillissement ou aux problèmes environnementaux. Un exemple moins souvent cité, mais que nous rappelle l’Agence européenne : 100 000 molécules chimiques répertoriées par cette agence risquent de causer des effets sur la santé. À ce propos, l’introduction du concept d’exposome dans la loi santé, à l’initiative de nos collègues Gérard Bapt et Jean-Louis Roumegas, est une réelle avancée.
Lors d’un colloque récent consacré à la prévention, le professeur Jean-François Toussaint, membre du Haut conseil de santé publique, invitait les participants à se projeter à l’horizon de 2050 – c’est un temps long, correspondant au temps d’exercice des jeunes médecins qui commenceraient en 2016. Il nous faut mieux former ces professionnels à la prévention, celle-ci demeurant le parent pauvre des études médicales avec moins de quinze heures d’enseignement au cours du cursus. Selon les études prospectives produites lors de ce colloque, les maladies infectieuses seraient en forte croissance – toujours à l’horizon 2050 – avec une augmentation de la mortalité à venir.
Pour nous, il est important, dès aujourd’hui, de renforcer la couverture vaccinale, qui a reculé ces dernières années dans notre pays en raison d’un scepticisme entretenu par des activistes hostiles. Je suis convaincu que Jenner et Pasteur, s’ils étaient vivants, leur feraient un mauvais sort !
La vaccination reste le moyen de prévention le plus efficace pour combattre, voire éliminer, de nombreuses maladies infectieuses. En 2015, le coût des vaccins remboursés par l’assurance maladie était de 318 millions d’euros. Face à cette réalité documentée dans le rapport de notre ancienne collègue Sandrine Hurel, la ministre a présenté un plan pour rénover notre politique vaccinale ; nous attendons d’ailleurs avec intérêt les conclusions de la concertation citoyenne sur la vaccination.
Enfin, le programme 183 est consacré quasi exclusivement à l’aide médicale d’État, à hauteur de 815 millions d’euros, 8 millions allant au fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante – je ne crois pas à un problème de vases communicants, comme l’a dit mon collègue Carvalho.
Je note que nos débats en commission ont été argumentés, évitant au mieux la caricature et la démagogie et faisant apparaître sans surprise une divergence totalement assumée. L’augmentation de 10 % des crédits de la mission s’explique par l’augmentation du nombre de bénéficiaires – plus de 316 000 fin 2015 –, avec un montant annuel de soins consommés extrêmement stable – 2 823 euros en 2014 contre 2 846 euros en 2007.
Mes chers collègues, nous devons avoir le souci de ne pas agiter les peurs, d’en rester aux principes éthiques et humanitaires qui ont fondé l’AME.