Intervention de François de Mazières

Réunion du 9 novembre 2016 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Mazières :

Merci, monsieur le directeur, pour votre présentation. Elle est nécessaire pour que nous comprenions bien ce projet. Ainsi que vous l'avez rappelé, il est relativement ancien : il est né en 2011. Il a connu plusieurs versions, et ce que vous nous présentez aujourd'hui est presque encore une nouvelle mouture. C'est ce qui en fait l'intérêt, mais c'est aussi une source d'inquiétude.

Il est assez légitime de créer sur ce site un lieu favorisant l'émergence culturelle et la création, et tout à fait normal de développer, à cette fin, une structure sur ce terrain. Mais une question se pose : faut-il faire un « grand machin » supplémentaire, surtout à un moment où les contraintes budgétaires pour la culture sont très fortes ? Plusieurs chiffres ont circulé : j'ai entendu que l'investissement devait atteindre 30 millions d'euros, mais, avec le bâtiment de 25 000 mètres carrés que vous avez évoqué, on dépassera assurément ce montant. Les sommes en jeu sont très importantes. L'année dernière, nous avons voté un million d'euros de crédits pour des études. Cette année, on nous propose d'accorder 1,5 million d'euros supplémentaires. Cela fait beaucoup d'études, d'autant qu'il y en a déjà eu un certain nombre auparavant !

D'autre part, a-t-on intérêt à installer une grande institution culturelle de plus dans l'agglomération parisienne ? Sur le budget du ministère de la Culture, Paris représente actuellement 900 millions d'euros, soit plus du quart des subventions. Or le problème que nous avons aujourd'hui en France en matière de culture et de création, c'est une forme de désertification, qui n'est pas du tout propre à la région parisienne. Je dirais même que la région parisienne est moins abandonnée que bien d'autres territoires.

On peut s'interroger : ne fallait-il pas préférer une structure légère ? D'autant que la création aime bien ce type de structures. Si l'on observe ce qui s'est passé en matière de création en France ces dernières années, on constate que, souvent, on a commencé par de petites unités où il y avait une grande énergie. En l'espèce, on a tout de suite voulu une grande institution, ainsi que vous l'avez dit à plusieurs reprises au cours de votre présentation. Je crains qu'on ne fasse un peu fausse route.

Surtout, le caractère fluctuant du projet est un peu inquiétant. Ce que vous nous avez présenté est séduisant, mais c'est complètement flou : on ne sait plus ce que c'est ! À un moment donné, il était question d'une Villa Médicis, on voyait alors un peu à quoi cela correspondait. Désormais, ce n'est plus du tout une Villa Médicis, c'est une accumulation de structures culturelles : on ajoute une couche supplémentaire à chaque fois, et le projet devient de plus en plus flou, ce qui est, selon moi, dangereux.

Il serait plus intéressant de créer un lieu véritablement dédié à l'émergence culturelle, qui essaie de relayer ce qui se passe sur le terrain. Vous nous avez dit que vous alliez faire venir dès l'année prochaine des « artistes-monde » : qui sont-ils ? Où seront-ils logés ? De même, je m'étonne que l'opération « Création en cours », qui vise à accueillir 100 artistes en résidence dans des écoles et des collèges dans toute la France, soit tout entière liée au projet. Pour ma part, je préférerais que l'on aide directement notre quarantaine d'écoles artistiques, qui en ont bien besoin, car elles sont dans une situation très difficile. Tout focaliser aujourd'hui sur ce lieu me paraît une erreur. En revanche, intégrer ce lieu dans une réflexion générale me paraîtrait la bonne logique. En l'occurrence, on a l'impression qu'on est un peu, pardonnez-moi, dans le gadget.

Pour avoir mené la création d'un établissement public culturel, je sais combien il est dangereux de ne pas avoir un projet bien précis et bien défini dès le départ. Car vous allez avoir des milliers d'idées ! Certes, vous allez faire des choix, me direz-vous, mais ce sera difficile. Il vaudrait mieux que vous disposiez d'un projet plus cadré, plus solide, avec des perspectives financières. J'ai lu le document que vous nous avez transmis : il est intéressant, mais il ne contient aucune projection financière sérieuse. Or nous vivons une période de crise budgétaire, il faut en avoir conscience….

Telles sont les interrogations du groupe Les Républicains.

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