Intervention de Yannick Favennec

Réunion du 8 novembre 2016 à 16h15
Commission élargie : finances - affaires économiques - développement durable - affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYannick Favennec :

Je souhaite en premier lieu, au nom du groupe Union des démocrates indépendants (UDI), réaffirmer notre attachement à nos territoires, dont la complémentarité constitue une richesse et un atout majeur pour le redémarrage économique et social de la France.

Pour préserver les forces vives de nos territoires, il est indispensable de maintenir des services publics de proximité, d'assurer l'égal accès aux soins et le déploiement des outils de communication ou encore, de garantir un réseau de transports de qualité.

Malheureusement, en matière d'égalité territoriale, le Gouvernement a tardé à prendre conscience des défis auxquels notre pays est confronté.

Ainsi, le projet de loi « Egalité et citoyenneté » compose un catalogue de mesures, certes louables, mais souvent trop modestes.

Nous avons accueilli favorablement les dispositions relatives au logement car nous estimons nécessaire d'améliorer la politique d'attribution des logements sociaux, de favoriser l'accès des ménages défavorisés aux quartiers attractifs ou encore de mieux répartir l'offre de logements sociaux. Nous tenons à souligner qu'il faut également réfléchir à la mobilité des personnes modestes pour éviter toute forme de ghettoïsation.

Mais force est de constater que la politique de la ville ne semble pas faire partie des priorités de l'action gouvernementale, au vu de l'importante diminution du budget qui lui est consacré. Alors que le Gouvernement avait annoncé vouloir sanctuariser les crédits, ces derniers sont passés de 496 millions d'euros en 2014 à 437 millions en 2016, puis à 416 millions pour 2017, soit une baisse de 16 % entre 2014 et 2017.

Si nous nous félicitons du nouveau programme national de renouvellement urbain destiné à 216 quartiers, qu'en est-il de sa faisabilité financière ? Action Logement sera-t-il bien en mesure de concourir à hauteur de 3,2 milliards d'euros au PNRU2, auxquels s'ajoutent 2,2 milliards d'euros de prêts bonifiés ?

Le 27 octobre dernier, le Président de la République a annoncé une dotation supplémentaire d'un milliard d'euros au bénéfice de l'ANRU, dont 100 millions dès 2017. Ces annonces vont-elles au-delà du pur affichage politique ? Quand et comment vont-elles être financées ? Elles n'apparaissent pas dans le document budgétaire que nous avons à notre disposition.

Nous serons également attentifs à la mise en oeuvre des nouveaux contrats de ville.

S'agissant des quartiers prioritaires, malgré des efforts conséquents, des milliers de Français vivent dans des secteurs dans lesquels l'égalité républicaine n'est pas respectée et dans lesquels grandir obère les chances de réussir à talent et efforts égaux.

Les mesures prévues par le Gouvernement s'apparent davantage à des gadgets qu'à de véritables réformes de fond. Pourtant, il est absolument indispensable de mettre en place des dispositifs concrets et ambitieux pour relancer l'emploi dans ces quartiers.

Nous ne pourrons en effet pas résoudre les problèmes de nos banlieues avant d'avoir réussi à résorber le chômage de masse qui les frappe depuis de nombreuses années, et de manière univoque.

Par ailleurs, l'attitude du Gouvernement sur ce sujet n'a cessé d'être contradictoire. Ainsi, le passage, en 2015, de 2 500 contrats urbains de cohésion sociale à seulement 1 300 quartiers prioritaires en métropole nous paraît difficilement justifiable. 300 communes sont sorties du dispositif et sont passées en veille active. Par ailleurs, le choix d'un critère unique, à savoir le critère de pauvreté, ne nous a jamais semblé pertinent.

Les chiffres sont têtus : l'action n° l regroupant les actions territorialisées et dispositifs spécifiques de la politique de la ville n'est abondée qu'à hauteur de 338 millions d'euros pour 2017, contre 347 millions en 2016. Leur répartition pour 2017 n'est pas non plus sans surprises : 29 % seulement sont dédiés à l'éducation, contre 32,4 % en 2016 ; 3 % à la santé et à l'accès aux soins contre 4,2 % en 2016 ; à l'inverse, les crédits d'intervention pour le pilotage, l'ingénierie et l'évaluation passent de 2 % à 4,5 % – peut-on parler en l'espèce de crédits d'intervention ?

J'en viens maintenant à la ruralité, ou plutôt aux ruralités. S'il est indispensable de mener des politiques fortes dans les quartiers prioritaires, il ne faut pas oublier la France périphérique dans son ensemble, celle de nos banlieues mais aussi celle de nos territoires ruraux, parfois coupée d'un monde qui change de plus en plus vite. Nous ne voulons pas les opposer, ils sont complémentaires. Mais, la ruralité fait partie de l'identité de la France.

Alors que la fracture sociale continue de se creuser depuis des dizaines d'années, nous assistons, souvent impuissants, à l'avènement d'une véritable cassure territoriale. Or, la paupérisation progressive de nos territoires – au-delà de son caractère insupportable pour un pays aussi développé que le nôtre – ne fait que conforter les thèses les plus extrêmes, celles que nous combattons avec ardeur au groupe UDI.

La couverture numérique du territoire a certainement un rôle à jouer pour combler un fossé grandissant. L'objectif affiché de couvrir tout le territoire en très haut débit, d'ici 2022, est certes louable mais reste imprécis et lointain. La loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique n'a pas permis de déterminer les moyens qui seront dégagés, alors qu'il paraît déjà clair que les opérateurs privés rechigneront à couvrir les pans de territoire les moins rentables, c'est-à-dire les moins denses.

Nous reconnaissons toutefois les efforts du ministre de l'aménagement du territoire dans l'écoute des collectivités territoriales concernant la résorption des zones blanches, à la suite du combat mené par les parlementaires de tous bords.

Les annonces présentées lors des trois comités interministériels à la ruralité vont certes dans le bon sens, mais pas assez loin. Reconnaissez, en outre, qu'elles arrivent bien tardivement dans le quinquennat, pour ne pas dire opportunément six mois avant les élections.

Quelles mesures pour lutter efficacement contre les déserts médicaux ? Quid d'une modulation régionale du numerus clausus pour les médecins ? Quelles mesures pour permettre aux petits commerçants de se battre à armes égales face à la grande distribution ? Quelles mesures pour conserver nos écoles dans les villages ? Quelles mesures pour encourager et reconnaître le bénévolat associatif ?

Bien entendu, nous soutenons la création de maisons ou pôles de santé supplémentaires ou encore nous nous réjouissons de l'ouverture prévue de maisons de services au public, mais c'est d'un véritable plan Marshall que le monde rural a besoin, en particulier dans le domaine des infrastructures routières, ferroviaires et numériques.

Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas votre budget et nous le regrettons.

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