Le problème de la corruption n'est pas spécifique à l'Azerbaïdjan : on le retrouve assez fréquemment dans la zone que je couvre, des Balkans à la Russie, en passant par l'Asie centrale et le Caucase du Sud. C'est évidemment un problème pour nos entreprises : dans certains cas, alors que les besoins existent et que l'offre française y répond de manière évidente, il arrive que le mauvais climat des affaires, l'absence de transparence et les pratiques de corruption empêchent le développement des contrats en question. J'ai plusieurs cas précis en tête dans des pays de ma zone, mais aucun en Azerbaïdjan en ce moment. Bien évidemment, les entreprises sont informées de la situation par la direction des entreprises du Quai d'Orsay, par Bercy, par Business France et par notre ambassade – Mme Sandrine Gaudin pourra vous en parler mieux que moi. Chaque fois qu'un cas problématique est connu, le réseau de la diplomatie économique se mobilise et pointe très précisément le sujet auprès des acteurs politiques et économiques locaux. La fluidité qui existe désormais entre les différents services concernés fait que nous sommes beaucoup plus efficaces pour intervenir et soutenir nos entreprises, lorsque cela s'avère nécessaire, et que nous pensons que cela peut être utile.
Ces préoccupations figurent évidemment en haut de la liste dans le cadre de notre accompagnement de l'Azerbaïdjan vers l'Union européenne. Nous devrons exercer une vigilance particulière à ce sujet dans le cadre du nouvel accord dont le mandat est en cours de discussion : il faut encourager l'Azerbaïdjan à adopter le maximum de règles de transparence, lesquelles constituent un élément commun à tous les États de l'Union européenne et correspondent à des normes de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ou de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). C'est par ce biais technique et concret que nous pourrons améliorer la situation. Ces règles de transparence n'empêchent pas les pratiques, mais elles les rendent plus compliquées.
La relation entre les États-Unis et l'Azerbaïdjan est très importante, plus importante néanmoins en termes politiques et de sécurité qu'en termes économiques.
L'approche des États-Unis vis-à-vis de l'Azerbaïdjan a très longtemps consisté à tenter de détacher ce pays de l'influence russe, notamment en apportant un soutien politique et probablement financier au GUAM, groupe constitué par la Géorgie, l'Ukraine, l'Azerbaïdjan et la Moldavie, quatre anciennes républiques soviétiques marquées par des différends territoriaux dans lesquels la Russie joue un rôle prépondérant. Aujourd'hui, la politique américaine à l'égard de l'Azerbaïdjan est essentiellement mue par les défis de sécurité dans le Caucase du Sud : Washington se soucie en premier lieu de la sécurité énergétique de ses alliés, mais aussi de la lutte contre les filières et les circuits du terrorisme international, le Caucase du Sud étant à la fois une région très fragile et une zone de transit.
Les États-Unis sont coprésident du groupe de Minsk aux côtés de la Russie et de la France. Ils souhaitent contribuer aux négociations pour le règlement du conflit et le font. Leur dernière initiative en date a été l'organisation en mai, à Vienne, d'une réunion au format dit « 3+2 », c'est-à-dire avec les présidents arménien et azerbaïdjanais et les trois ministres des affaires étrangères du groupe de Minsk. Ce format, avec la présence des trois médiateurs au niveau politique, au-delà des représentants habituels, doit nous inspirer pour la suite. La réunion de Vienne a, à l'évidence, donné une impulsion : elle a créé un minimum de confiance entre les parties, qui en ont très peu l'une pour l'autre, et a abouti à un corps de décisions, dont la mise en oeuvre s'avère néanmoins assez compliquée. Nous ne pouvons que saluer cette initiative américaine et ses résultats.
Les États-Unis ne font pas partie des tout premiers partenaires économiques de l'Azerbaïdjan : en 2015, ils se sont classés au cinquième rang des partenaires commerciaux du pays, derrière l'Italie, la Russie, la Turquie et la France. De manière générale, ils sont soucieux d'entretenir un dialogue avec Bakou sur toutes les questions de développement, de gouvernance et de sécurité.
Les contacts bilatéraux entre les deux pays sont relativement fréquents, à la mesure de l'intérêt que présente l'Azerbaïdjan pour les États-Unis. Le président Aliev a été reçu par le président Obama en mars dernier, en marge du sommet sur la sécurité nucléaire à New York. Au mois de février précédent, l'envoyé spécial du Département d'État pour les affaires énergétiques internationales avait participé à une réunion à Bakou sur le Corridor sud. On voit bien l'intérêt spécifique des Américains pour la dimension énergétique.
La relation entre la Turquie et l'Azerbaïdjan est ancienne, étroite et fidèle, compte tenu notamment de la proximité culturelle et linguistique entre les deux pays. Au lendemain de la tentative de coup d'État en Turquie le 15 juillet dernier, Ankara a demandé à plusieurs de ses partenaires de « faire le ménage » chez eux, en faisant la chasse aux gülenistes. Bakou a répondu positivement à l'appel, ce qui n'a pas manqué de créer un certain trouble dans la communauté internationale.
Au titre de ses relations avec ses voisins, la Turquie a un intérêt évident à la résolution du conflit du Haut-Karabagh. Elle en a fait une condition sine qua non à la normalisation de ses relations avec l'Arménie. Cependant, nos interlocuteurs turcs, avec lesquels nous abordons de nombreux sujets, – par exemple l'ambassadeur de Turquie, que je reçois régulièrement – nous parlent très rarement du Haut-Karabagh. Nous savons qu'ils suivent le sujet de près. Peut-être même sont-ils actifs : il est notamment possible qu'ils passent des messages aux Azerbaïdjanais pour les inciter à faire preuve de souplesse dans la négociation. Mais ils n'évoquent guère la question. Cette discrétion est inversement proportionnelle à l'importance du sujet pour eux.