Intervention de Annick Le Loch

Séance en hémicycle du 29 novembre 2016 à 15h00
Sociétés mères et entreprises donneuses d'ordre — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnnick Le Loch :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, chers collègues, la mobilisation de la société civile et des parlementaires depuis maintenant deux ans a porté ses fruits. Après l’échec de la CMP, nous examinons aujourd’hui, en nouvelle lecture, la proposition de loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre. Cette dernière étape est l’aboutissement de tout le travail d’échange et de concertation accompli sur ce texte, présenté par son rapporteur, Dominique Potier, dont je salue la pugnacité.

C’est la portée universelle de ce texte qui fait sa grandeur et son efficacité. Que ce soit en France ou ailleurs, toute atteinte aux droits de l’homme, à l’environnement et aux droits sociaux, ainsi que toute tentative de corruption, devra être prévenue, évitée ou effectivement réparée. Tel est l’objet du plan de vigilance instauré par le texte, qui devra être mis en oeuvre et communiqué au public. S’il n’est pas respecté et que la responsabilité de l’entreprise est reconnue dans un dommage causé sur sa chaîne de production ou d’approvisionnement, une juridiction française pourra prononcer une amende et demander la réparation du préjudice subi, avec ou sans astreinte.

Pour prendre un exemple, une société d’extraction de minerais qui n’aurait pas tout mis en oeuvre pour empêcher le déversement de substances radioactives par un de ses sous-traitants pourra être condamnée.

Nous voyons encore trop de sociétés parler d’exemplarité dans leur reporting extra-financier sans que cela se traduise dans les faits. Tout l’enjeu réside dans les moyens mis en oeuvre, au-delà des simples déclarations d’intention.

Le Sénat a supprimé toute sanction en cas de manquement. Quant à nous, nous avons souhaité, pour cette dernière lecture – je l’espère – et en concertation avec le Gouvernement et les associations, rétablir le principe d’une sanction proportionnée à la situation des entreprises.

Vous le savez : sous sommes, notamment au sein de la commission des affaires économiques, très attentifs aux intérêts des entreprises françaises. Nous avons de très belles entreprises, des fleurons économiques dont nous sommes très fiers. Nous ne pensons pas que cette loi les pénalisera. Pour nous, le devoir de vigilance contribue à la responsabilisation des entreprises sans porter atteinte à leur compétitivité. Le développement économique ne peut plus se faire au détriment du progrès social, des avancées des droits de l’homme, de la santé publique ou de la protection de l’environnement. C’est une certitude.

La politique des multinationales en matière de RSE sera valorisée : les plus vertueuses d’entre elles, celles dont la stratégie est exemplaire, seront confortées. Plus globalement, cette loi protégera les plus petites entreprises, celles qui se sont engagées dans le made in France, le commerce équitable et le plus juste échange, celles qui n’ont pas sacrifié leur responsabilité pour la compétition sans foi ni loi.

Par la suite, l’Europe devra avancer et reprendre cette loi dans le cadre d’une directive européenne. C’est en tout cas ce que nous espérons tous. Mais avant, la France, si fière de son héritage, peut elle aussi envoyer un signal et traduire son discours universaliste en actes. Elle doit s’affranchir de la pression permanente des marchés financiers internationaux, qui entraîne la délocalisation de la misère.

Aujourd’hui, les parlementaires sont invités à remplir leur rôle de protecteurs des libertés individuelles et collectives, en tous lieux et en toutes circonstances. C’est pourquoi il nous faut voter cette proposition de loi de gauche et de progrès afin qu’elle soit définitivement adoptée en janvier 2017.

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