Intervention de Hervé Féron

Séance en hémicycle du 29 novembre 2016 à 15h00
Victimes de la répression de la commune de paris — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Féron :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, l’exposé des motifs de cette proposition de résolution nous indique que personne ne conteste plus la réalité des faits historiques ayant conduit au massacre des victimes de la répression de la Commune de Paris. Personne ne le conteste plus mais ce n’est pas suffisant. Nous venons de l’entendre : certains nient encore, comparent ou minimisent ; dans tous les cas, cette proposition de résolution les irrite.

En appui à ce texte, je souhaite apporter un témoignage, le témoignage réaliste du poète, et pas n’importe lequel : Eugène Pottier, qui écrivait en 1886 Elle n’est pas morte !

« Comme faucheurs rasant un pré,

Comme on abat des pommes,

Les Versaillais ont massacré

Pour le moins cent mille hommes !

Et les cent mille assassinats,

Voyez c’que ça rapporte…

Tout ça n’empêche pas, Nicolas,

Qu’la Commune n’est pas morte !

Tout ça n’empêche pas, Nicolas,

Qu’la Commune n’est pas morte !

[…]

Ils ont fait acte de bandits,

Comptant sur le silence,

Achevé les blessés dans leur lit,

Dans leur lit d’ambulance !

Et le sang inondant les draps

Ruisselait sous la porte !

Tout ça n’empêche pas, Nicolas,

Qu’la Commune n’est pas morte !

Tout ça n’empêche pas, Nicolas,

Qu’la Commune n’est pas morte !

Les journalistes, policiers,

Marchands de calomnies,

Ont répandu sur nos charniers

Leurs flots d’ignominie !

Les Maxime Du Camps, les Dumas

Ont vomi leur eau-forte.

Tout ça n’empêche pas, Nicolas,

Qu’la Commune n’est pas morte ! »

Alors oui, quand M. Collard, avant de se retirer, se gausse du Temps des Cerises en tentant de nous surprendre, en prétendant nous apprendre que cette magnifique chanson a été écrite cinq ans avant la Commune de Paris, rappelons-lui que, si elle fut le symbole entonné par les communards, c’est tout simplement parce que le texte leur parlait terriblement.

Et, parce que je ne comprends toujours pas pourquoi certaines de nos grandes villes ont une place Thiers, je veux dire avec Jean Édouard :

« L’hiver 71, c’est l’hiver du chaos,

L’hiver de la défaite devant les Pruscos,

L’hiver de la souffrance et l’hiver de la faim,

L’hiver des collabos, des faux républicains.

Il commence à fleurir des cocardes écarlates

Et dans la rue soudain le cri du peuple éclate.

Un matin tout Paris entre en insurrection

Et Paris doit lutter contre la réaction.

Ouvriers, paysans, armez vos chassepots,

Du haut des barricades, agitez vos drapeaux.

Agitez vos drapeaux, qu’les Versaillais canonnent,

Agitez un mouchoir rouge du sang d’un homme.

Avec la cruauté d’une bête sauvage,

Thiers a tué la Commune en un rouge carnage.

Derrière les tombes et les croix d’un cimetière

À dix contre deux cents, les révolutionnaires !

Les derniers Fédérés contre un mur sont tombé,

Ne murmurant qu’un mot, le mot : Fraternité.

Versaillais, Versaillais,

Vous avez fusillé le coeur d’une révolution,

Vous l’avez jeté en prison,

Mais il reste à Paris, l’esprit des insurgés. »

Voilà pourquoi, si longtemps après et plus que jamais, alors que plus d’un siècle s’est écoulé, cette résolution a du sens. Voilà pourquoi le groupe socialiste, écologiste et républicain votera cette proposition de résolution juste, nécessaire, indispensable.

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