En effet, monsieur le président. La commission l’a adopté à une très large majorité, nonobstant les réserves de la rapporteure générale sur lesquelles je vais revenir.
Cet amendement vise à assurer la bonne connaissance par l’administration fiscale des revenus générés par le biais des plateformes. Cette disposition a une histoire, puisqu’il s’agit de la reprise de la rédaction de l’article 23 quater du projet de loi pour une République numérique, article adopté en commission au Sénat mais supprimé par la commission mixte paritaire. Elle est également assez proche de l’amendement no 86 déposé en commission par M. de Courson. Elle prévoit, je le rappelle, la transmission systématique des informations par les plateformes à l’administration fiscale ainsi que la mention de la catégorie à laquelle se rattachent les revenus perçus.
Nous ne pouvons que partager, et je le partage personnellement, l’objectif de favoriser la collecte de l’impôt quand il est dû et de lutter contre les distorsions de concurrence, ce qu’une meilleure information de l’administration fiscale permettra. Les enjeux économiques et financiers, on le sait, ne sont pas minces. Des études récentes estimaient le montant total des transactions dans les cinq principaux secteurs de l’économie collaborative en Europe – finance, hébergement, transports, services à la personne et services aux entreprises – à environ 28 milliards d’euros. Ce montant pourrait être multiplié par vingt en dix ans et atteindre 570 milliards. Vous vous êtes d’ailleurs déjà exprimé, monsieur le secrétaire d’État, sur l’enjeu de cette économie nouvelle, qu’il faudra pouvoir taxer également, à la fois pour des raisons de concurrence et pour s’assurer que l’on conserve une base fiscale pour financer la dépense publique.
Je rappelle néanmoins que plusieurs mesures ont déjà été prises en loi de finances initiales pour 2015 : ainsi les plateformes de réservation par internet doivent-elles assurer la collecte de la taxe de séjour. La loi de finances pour 2016 fait obligation aux plateformes de communiquer à leurs utilisateurs les revenus générés et de les informer de leurs obligations fiscales et sociales. Enfin, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 assujettit aux cotisations sociales les personnes qui retirent de leur activité de location de biens des revenus dont le montant dépasse certains seuils, ce qui a donné lieu à de nombreux débats au cours de la navette.
Lors de la discussion en séance publique du projet de loi de finances pour 2017, la rapporteure générale avait rappelé que cet amendement soulevait plusieurs questions et serait difficile à mettre en oeuvre à brève échéance.
S’agissant tout d’abord des mesures adoptées l’année dernière pour obliger les plateformes à communiquer à leurs utilisateurs les revenus générés et à les informer de leurs obligations fiscales et sociales, le décret d’application est encore en cours d’élaboration, si bien que la disposition n’est pas encore effective. On peut donc se demander s’il faut mettre un autre dispositif en place alors que le premier ne l’est toujours pas.
Il peut également y avoir des risques au regard du principe d’égalité, compte tenu de la différence de traitement entre les plateformes numériques et les intermédiaires physiques.
Se pose aussi une question technique : celle de l’identification des utilisateurs de ces plateformes alors que celles-ci n’ont pas l’obligation de vérifier l’identité du bénéficiaire des revenus présent sur leur site, contrairement aux banques, aux employeurs et aux acteurs économiques qui transmettent aujourd’hui ces informations à l’administration fiscale.
Sous réserve de ces observations, la commission a adopté l’amendement à une majorité très large et très « transcourants ».