Intervention de Alain Tourret

Réunion du 6 décembre 2016 à 16h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Tourret :

Monsieur le ministre, je vous avouerai que je n'ai jamais été convaincu par la contrainte pénale, dont je ne voyais pas bien ce qui la distinguait du sursis avec mise à l'épreuve, et dont aucun travail auprès des professions judiciaires n'avait préparé la mise en oeuvre. J'en ai parlé avec des magistrats de haut niveau, notamment des premiers présidents de cour d'appel : le dispositif n'est pas entré dans la culture judiciaire, ni chez les avocats ni chez les magistrats ; or, si ni les uns ni les autres ne le défendent, il n'ira pas bien loin.

Il convient donc de le reprendre à la base pour en assurer la réussite à l'avenir. Mais, dans la situation présente, il m'inspire bien des doutes, d'autant que nombre de TGI n'ont prononcé aucune contrainte pénale : il existe un consensus pour l'éliminer.

Lorsque je vous avais interrogé – et félicité – à propos du budget de la justice, je m'étais permis d'évoquer le TIG, qui a été une grande réussite avant de rencontrer un moindre succès : profondément entré dans les moeurs, il s'est ensuite effiloché peu à peu. Mon collègue Joaquim Pueyo, à Alençon, a été le premier à y recourir dans l'Orne, comme moi dans le Calvados, dans ma commune de Moult. Depuis, plus rien. Pourquoi cela ? Là encore, parce qu'un consensus s'est installé : les avocats n'en parlent plus avec leurs clients, les parquets ne le proposent que très rarement. J'ai donc demandé aux premiers présidents d'organiser une réunion avec l'Association des maires de France (AMF) pour voir comment le relancer.

Je suis en effet intimement convaincu que le TIG fournit une solution parfaite. D'abord, il allie la justice, les maires et la société. Le condamné appartient à une commune pour laquelle il va devoir travailler gratuitement pendant un nombre d'heures donné – 220 au maximum si je ne m'abuse –, ce qui permettra à l'ensemble de la communauté de constater que la peine est exécutée. Dans les communes rurales, la personne condamnée est intégrée aux équipes chargées de l'entretien des espaces verts – puisque c'est essentiellement dans ce domaine que sont effectués les TIG. En outre, cette solution est parfaitement adaptée à la délinquance routière que vous, monsieur le ministre, connaissez bien en Bretagne, comme moi en Normandie, et qui concentre d'ailleurs l'essentiel des délits visés par la contrainte pénale.

Je souhaite donc que vous demandiez aux premiers présidents et aux procureurs généraux où en est précisément le prononcé du TIG dans l'ensemble des ressorts. Mon impression quant à son évolution est-elle ou non fondée ? Une action de sensibilisation peut-elle être menée par l'intermédiaire de l'AMF, éventuellement de l'Association des maires ruraux de France ou de l'association qui réunit les communes moyennes ?

Une solution existe, elle est attendue. Travaillons sur la contrainte pénale, soit : je ne demande qu'à être convaincu ; mais demandons-nous aussi si le TIG ne pourrait pas être l'un des moyens de la justice du xxie siècle.

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