Intervention de Rudy Salles

Réunion du 6 décembre 2016 à 16h15
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRudy Salles :

Attaché à l'objectif d'harmonisation des cursus de formation dans l'enseignement supérieur, le groupe Union des démocrates et indépendants soutient le processus de Bologne depuis son lancement et la mise en place du modèle européen dit LMD, pour licence-master-doctorat, qui a progressivement remplacé les structures de diplômes propres à chaque pays.

À ce titre, nous regrettons fort que pendant plus de dix ans, un système de sélection à l'issue de la première année de master ait perduré en France. En effet, ni la loi LRU de 2007, ni la loi ESR de 2013 n'ont remédié à cet état de fait contraire à la logique d'harmonisation du système européen.

Initiée par notre collègue Jean-Léonce Dupont, cette proposition de loi a le mérite de mettre en lumière ce problème et a sans doute encouragé le Gouvernement à accélérer la concertation avec les acteurs concernés. La multiplication des recours devant les tribunaux administratifs risquait, à terme, de déstabiliser l'ensemble de l'offre de formation délivrée par les universités.

Ainsi, les députés du groupe Union des démocrates et indépendants souscrivent pleinement à l'objectif recherché par cette proposition de loi, puisqu'elle instaure une sélection à l'entrée en master dans l'esprit de la réforme européenne, et nous estimons que le texte initial permettait une lisibilité et une sécurité juridique bienvenue.

La proposition de loi initiale prévoyait ainsi une sélection à l'entrée du deuxième cycle – soit à l'entrée du master 1 – et laissait aux universités le soin de définir les capacités d'accueil en première année.

Pour intégrer la position commune aux syndicats étudiants et aux universités, le texte a été profondément modifié en commission au Sénat. La procédure de sélection à l'entrée en M1 prévue dorénavant reste proche de la première version, et peut nous convenir, même si elle ne précise plus qui définira les modalités de cette sélection : chaque établissement fixera les modalités adéquates.

La disposition qui nous laisse le plus sceptiques est l'instauration insidieuse d'un droit à la poursuite d'études. Cette mesure prévoit que s'ils en font la demande, les titulaires d'une licence non admis en master 1 se verront proposer une inscription dans une formation du deuxième cycle en tenant compte de leur projet professionnel et de l'établissement dans lequel ils ont obtenu leur licence.

Compte tenu du caractère très précaire et potentiellement hasardeux de l'inscription d'un tel droit dans la loi, nous souscrivons à la volonté du rapporteur au Sénat d'y adjoindre un dispositif d'évaluation. En effet, seule la pratique nous éclairera sur la portée de ce dispositif : droit à la poursuite d'études ou simple deuxième tour d'orientation ?

Nous devons veiller à ce que nos filières soient des filières de réussite, qui garantissent une insertion professionnelle aux étudiants. Selon une étude de l'Apec, en 2015, près de 40 % des jeunes bac + 5 sont sans emploi un an après leur diplôme.

Enfin, si nous soutenons ce texte, la question de la sélection à l'université reste ouverte et ne pourra plus être éludée. Cette année encore, 32 400 étudiants supplémentaires sont entrés dans l'enseignement supérieur, après une augmentation de 30 000 étudiants l'année dernière. Depuis 2009, les universités ont accueilli 180 000 étudiants supplémentaires, soit l'équivalent de près de dix universités.

Nous déplorons l'enterrement du rapport de l'Inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche sur « L'affectation en première année de licence dans les formations à capacités d'accueil limitées ». Ce rapport propose plusieurs mesures qui mériteraient d'être débattues : la limitation des redoublements en première année de licence, subordonnés à un avis favorable du jury qui tiendrait notamment compte de l'assiduité de l'étudiant ou de ses résultats ; la priorisation, dans les filières en tension, des étudiants ayant construit un parcours cohérent avec leurs voeux dans le supérieur ; ou encore la possibilité d'établir des prérequis à l'entrée de certaines formations, qui est peut-être la proposition la plus sensible.

Aujourd'hui les demandes d'inscriptions continuent d'augmenter chaque année et on ne peut tolérer que certaines filières en tension pratiquent une sélection aussi arbitraire que le tirage au sort. Si nous ne remettons pas en cause la massification de l'enseignement, nous constatons néanmoins qu'elle montre aujourd'hui ses limites et ses contradictions.

Par ailleurs, on ne peut éluder la sélection par l'échec, quand moins d'un tiers des étudiants inscrits en première année à l'université en 2012-2013 ont obtenu leur licence en trois ans, et que seuls 40 % des nouveaux inscrits à l'université en 2014-2015 ont validé leur première année de licence.

À terme, il faudrait qu'après un examen individuel de leurs dossiers, on puisse dire aux étudiants qu'avec tel bac, telles notes et telle filière, ils ont telle chance de réussite et telle probabilité de trouver un emploi.

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