Dans leur rapport de contrôle présenté la semaine dernière, les deux rapporteurs exprimaient clairement un malaise. Il est d'ailleurs regrettable que Jean-Frédéric Poisson ne soit pas présent ce soir car la position qu'il défend dans ce rapport le conduirait à ne pas voter la prorogation de l'état d'urgence.
Il est en tout cas compliqué de proroger un dispositif législatif qui doit être limité dans le temps et géographiquement – telle est l'essence même de l'état d'urgence. Je rappellerai les propos tenus, dans cette enceinte, par Jean-Jacques Urvoas : « Les mesures que nous allons décider ne dureront qu'un temps limité. Elles ne se comprennent d'ailleurs que par leur obsolescence programmée. » C'est aussi l'avis exprimé par le Conseil d'État et le Conseil constitutionnel. Nous sommes devant une difficulté : nous prorogeons pour la cinquième fois un dispositif législatif hérité de la IVe République, qui a été voté en période coloniale, qui n'était pas, au départ, destiné à la lutte contre le terrorisme et qui devait être limité dans le temps.
En outre, depuis plus d'un an, nous avons renforcé considérablement notre arsenal législatif et nous disposons à présent d'outils qui n'existaient pas au moment où nous avons voté la première prorogation. Or nous faisons comme si rien n'avait changé. Notre collègue Pierre Morel-A-L'Huissiervient d'ailleurs d'exprimer cette interrogation.La situation a changé, à la fois quant à la nature de la menace et quant aux moyens pour y faire face, mais nous faisons comme si nous étions encore en novembre 2015. Nous ne pouvons nous engager dans une nouvelle prorogation de l'état d'urgence sans procéder à l'évaluation de cette situation nouvelle, de ce qui a été fait et, enfin, des nouveaux moyens dont l'État dispose désormais pour se défendre contre le terrorisme.
Voilà pourquoi nous avons déposé cet amendement de suppression de l'article 1er.