Intervention de Gérard Roucairol

Réunion du 29 novembre 2016 à 18h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Gérard Roucairol :

J'avais une question à cheval sur l'intelligence artificielle et la modification ciblée du génome, parce que, d'une certaine manière, si l'on sait cartographier le génome de toutes parties vivantes sur cette terre, en accumulant beaucoup de génomes, on arrive aussi à prédire en utilisant en particulier la technique de « deep learning ».

Cela me semble plutôt intéressant dans l'articulation des deux. Je ne sais pas si cela est abordé dans chacun des sujets, mais comme cette question me préoccupe, je me permets de la poser. Si l'on veut le faire, cela me semble relever d'un travail parlementaire ; pour l'encadrer nous disposons en France de la loi « Informatique et Libertés ».

Il me semble que, si l'on veut aller assez loin dans les conséquences que l'on peut traiter, notamment par les techniques dites d'intelligence artificielle, pour essayer de prédire des comportements, des maladies, etc., d'après l'expérience qu'on peut en avoir, il existe des traitements qui justifient de faire évoluer cette loi « Informatique et Libertés ». Autrement dit, pour exploiter certains aspects de l'intelligence artificielle appliqués notamment à la modification ciblée du génome, et tout ce que l'on peut en faire, il me semble qu'il y a un sérieux peignage de la loi « Informatique et Libertés » à effectuer. Je m'arrêterai là sur le sujet.

L'informaticien que j'ai été pendant plus de 45 ans a vu assez régulièrement des pics d'intérêt autour de l'intelligence artificielle, dans les années 1960 et 1970, c'était la traduction automatique. On allait tout traduire automatiquement et cela ne commence à se faire que maintenant avec des techniques très différentes de celles de l'époque.

Ensuite, dans les années 1980, on a vu sortir sur toute la planète la cinquième génération d'ordinateurs qui étaient supposés devenir complètement intelligents, il n'y aurait plus rien à faire, etc. Certes, il y a eu des retombées intéressantes mais, à chaque fois, l'expression « intelligence artificielle » fait rêver et génère des fantasmes ainsi que toute une problématique qui n'a souvent pas lieu d'être car bâtie sur des extrapolations non vérifiées. C'est un point important.

Ce qui me semble intéressant dans ce que l'on vit actuellement avec cette troisième génération de retour sur l'intelligence artificielle, c'est que, lorsque John McCarthy a inventé le terme d'intelligence artificielle dans les années 1960, j'ai le sentiment qu'il a utilisé le mot « intelligence » à l'anglaise dans le sens « Intelligence Service » (service de renseignement), ce qui n'était pas tout à fait la même chose que la connotation d'intelligence qu'on lui donne maintenant.

Ce qui me semble important et ce qui fait que nous en parlons, c'est précisément ce que vous avez dit : grâce à l'évolution de l'informatique et à la puissance de calcul, nous avons montré que des mécanismes que l'on connaissait depuis les années 1990, comme les réseaux de neurones, peuvent fonctionner et aboutir à des résultats.

Je crois que c'est cela la rupture, mais restons sur l'analyse de ce phénomène et circonscrivons toute étude sur l'intelligence artificielle à l'étude de ce phénomène. Et ne commençons pas à extrapoler dans le sens du mythe, ce qui est facile mais générateur de déceptions, car ce qui s'est passé dans les années 1980 sur la cinquième génération a conduit à quinze ans de non-intérêt de la planète entière pour l'intelligence artificielle. Ceux qui l'avaient promise à l'époque s'en sont mordu les doigts dans les quinze ans qui ont suivi.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion