Intervention de Arnaud Richard

Séance en hémicycle du 11 janvier 2017 à 21h30
Débat sur le socle européen des droits sociaux

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaArnaud Richard :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires européennes, mes chers collègues, l’Europe vient d’être violemment secouée par la déflagration du Brexit. Nous découvrons que la construction européenne n’est plus un processus irréversible, que l’Europe peut se disloquer et même disparaître. En outre, notre continent vient d’être confronté de nouveau à la barbarie – en Allemagne cette fois. Nous avons le sentiment que les politiques de sécurité et de renseignement sont insuffisamment coordonnées et manquent d’efficacité.

Les peuples européens ont le sentiment que l’Union européenne est impuissante ; ils ne croient plus en sa capacité à les protéger. C’est précisément ce qui fait l’intérêt à ce débat que nous propose Mme la présidente de la commission des affaires européennes. En effet, pour redonner du sens à la construction européenne, nous devons montrer aux Européens que l’Union européenne peut les protéger des crises économiques et de leurs conséquences sociales, en particulier de la précarité, du chômage, de la pauvreté et du dumping social.

Les députés du groupe de l’Union des démocrates et indépendants ont toujours été favorables à une plus grande convergence des politiques sociales en Europe et ont toujours considéré que l’absence de modèle social européen était l’une des causes de notre faiblesse.

Les questions qui se posent aujourd’hui concernent donc la méthode, l’agenda à privilégier pour parvenir à un socle de droits sociaux ainsi que les garanties que ce socle doit prévoir.

Quant à la méthode, il nous semble que l’organisation d’une plus grande convergence n’aurait pas de sens si, dans le même temps, nous ne mettions pas en oeuvre une plus grande convergence économique, monétaire et fiscale. En effet, comment imaginer mettre en place un socle de droits sociaux sans renforcer la gouvernance de la zone euro, dont les carences accentuent les divergences entre les systèmes sociaux des différents États membres ?

Avec notre collègue Philip Cordery, nous avons d’ailleurs récemment formulé des propositions pour une plus grande intégration économique et monétaire en Europe, en particulier par la mise en place de mécanismes de stabilisation macroéconomique, par une plus grande coordination des politiques économiques, et évidemment par des évolutions institutionnelles qui donneraient corps à ce renforcement de l’Union économique et monétaire.

Par ailleurs, comment imaginer un socle social sans remédier à la première des inégalités en Europe – au-delà des problématiques de sécurité –, à savoir le chômage ? Le changement d’état d’esprit induit par le plan Juncker est maintenant bien ancré à Bruxelles. Il est indispensable de relancer l’investissement en prolongeant et en amplifiant ce plan, qu’on peut considérer comme un succès – le gouvernement français n’y est pas pour grand-chose, quoi que vous ayez pu dire dans cet hémicycle, monsieur le secrétaire d’État – même s’il convient d’en corriger les effets indésirables. Avec notre collègue Razzy Hammadi, nous plaidons d’ailleurs en faveur de sa pérennisation et de son amplification.

En ce qui concerne l’agenda, nous estimons qu’il est possible en quinze ans d’harmoniser les régimes de prélèvements sociaux et de couvertures sociales des différents pays de la zone euro.

La question du contenu de ce socle de droits sociaux est certainement la plus importante. Nous sommes très favorables à l’émergence d’un véritable dialogue social européen – ce sera tout à l’heure le sujet de ma question –, passant par la signature de conventions collectives, afin de poser les jalons d’un salaire minimum et d’une assurance chômage au niveau européen, d’améliorer la portabilité des droits des salariés européens et de favoriser ainsi leur mobilité. Nous sommes enfin persuadés que la montée en puissance du dialogue social européen permettra d’apporter des garanties adaptées aux nouvelles formes de travail et à ce qu’il est désormais convenu d’appeler « l’ubérisation » de l’économie.

Une méthode, un agenda et le dialogue social comme moteur de changement pour construire progressivement le socle européen de droits sociaux : voilà les conditions nécessaires pour parvenir à une Europe plus forte, plus protectrice et plus sociale. C’est cette Europe que notre groupe appelle de ses voeux et dont nous avons plus que jamais besoin.

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