Intervention de Pascale Got

Réunion du 25 janvier 2017 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascale Got, rapporteure :

Mon intervention va consister à faire le point sur les avancées et les reculs que l'on peut constater à l'issue de la lecture du texte au Sénat, en rappelant quels sont les objectifs de la proposition de loi.

Je commencerai par souligner que ce texte ne vise pas à une modification de la loi Littoral, mais bien une adaptation des littoraux, notamment face à l'érosion. Cette proposition de loi émane d'un travail concerté du Comité stratégique de l'évaluation du trait de côte, qui avait réuni élus, associations et scientifiques en vue d'apporter des outils aux élus locaux qui s'étaient engagés dans des stratégies de relocalisation ou de repli et qui, au moment où ils devraient amorcer ces stratégies locales, se trouvent dans l'incapacité de le faire.

Afin de les aider, nous avions proposé plusieurs outils, à commencer par la reconnaissance juridique du trait de côte dans le code de l'environnement, mais aussi la reconnaissance des stratégies locales, régionales ou nationales et leur articulation dans les plans de prévention des risques naturels et les documents d'urbanisme.

Nous avions également souhaité faire en sorte de préserver l'équilibre des littoraux, qui vont continuer à accueillir de la population et doivent maintenir intacte leur attractivité : nous avions donc essayé de rendre compatibles le développement de l'économie et les principes du développement durable, en prenant en compte la nécessité de mieux protéger nos écosystèmes. Plus globalement, nous avions été amenés à développer la culture du risque et à parfaire l'information auprès de nos concitoyens et des populations concernées.

Le Sénat a choisi de conforter le coeur de la loi par rapport aux objectifs que je viens d'évoquer. Au sujet des zones d'activité résiliente et temporaire (ZART), il a ainsi entériné le principe, posé en première lecture, selon lequel la constitution de ZART relevait de la compétence des collectivités locales.

Nous avions introduit dans le texte l'idée d'une zone de mobilité du trait de côte, afin que, dans le cadre d'une opération d'aménagement global, on puisse gérer le bâti existant, mais aussi inclure tout ce qui concerne la protection des écosystèmes – ce qui répondait à une demande formulée par les territoires ultramarins. Le Sénat ayant supprimé cette disposition, je propose de la réintroduire.

Pour ce qui est de l'information à apporter à nos concitoyens, notamment au moment de l'achat de biens se trouvant dans une zone à risque, le Sénat s'est prononcé contre le principe adopté en première lecture, estimant que sa mise en application suscitait des difficultés. Je pense que ce n'est pas le cas et qu'il convient d'informer dès que possible les futurs acquéreurs d'un bien que l'érosion est susceptible de menacer ce bien auquel ils s'intéressent – il ne faut pas attendre le passage devant le notaire pour que cette information soit portée à leur connaissance –, et vous propose donc de réintroduire dans le texte le principe de cette information.

Le Sénat a entériné les exonérations fiscales, dès lors qu'il y aurait création d'entreprise dans les ZART concernées. Il a confirmé le dispositif d'indemnisation des 78 copropriétaires de l'immeuble Le Signal, à Soulac-sur-Mer, en Gironde, mais en reformulant le texte, ce qui fragilise le dispositif sur le plan juridique. Je vous proposerai donc de maintenir le dispositif d'indemnisation, mais en rétablissant le texte initial.

Nos collègues du Sénat ont également évoqué la création du bail réel immobilier littoral, en en précisant le contour ; nous pourrons, à notre tour, apporter quelques précisions par voie d'amendement.

Les aspects financiers sont essentiels dans cette proposition de loi. En première lecture à l'Assemblée nationale, la ministre du logement avait annoncé un fonds d'adaptation, sans en préciser les contours – qui n'ont pas davantage été délimités lors de la discussion au Sénat, ce qui fait que les sénateurs ont préféré revenir à un fonds existant déjà, le fonds Barnier. Comme eux, j'estime qu'à défaut de précisions sur le fonds d'adaptation, il est préférable d'en rester au fonds Barnier.

Enfin, il est un sujet qui fait polémique, celui des modifications apportées à la loi Littoral – les sénateurs ont introduit pas moins de cinq dérogations importantes à cette loi, ce qui a suscité de nombreuses réactions. Je rappelle que ce texte n'a pas vocation à modifier la loi Littoral, mais vise essentiellement à la relocalisation des activités et des biens. C'est pourquoi je proposerai un amendement en ce sens, non sans avoir préalablement envisagé la suppression totale de l'article 9A introduit par le Sénat.

Nous avions eu une discussion sur la nécessité d'adapter la loi Littoral au coeur du texte, et de répondre aux situations ubuesques rencontrées sur le terrain. Pour ce qui est de la notion d'adaptation, je regrette que le Sénat n'ait pas suivi l'amendement du Gouvernement qui introduisait des notions d'adaptation pouvant faire l'unanimité. Nous devons à la fois être en mesure de résoudre la problématique des dents creuses – car le fait que la jurisprudence soit loin d'être fixée se traduit par des situations absurdes – et celle de la relocalisation des activités agricoles, forestières et de cultures marines. À cet égard, je vous annonce d'ores et déjà que je ne suivrai pas les sénateurs sur la question des annexes, leur position ne pouvant conduire qu'à aggraver le mitage, alors que l'installation d'annexes à proximité de l'existant est déjà possible.

Je pense que nous devons manier avec prudence la notion de relocalisation d'activités économiques : les exceptions ne sauraient devenir le principe.

Pour en revenir à l'adaptation à la loi Littoral, je souhaite que nous en restions à des adaptations très mesurées de ce texte, que nous devons veiller à ne pas fragiliser. Nous devons raison garder, et je m'attacherai pour ma part à ce que nous trouvions un équilibre acceptable en tout point : en aucun cas je n'accepterai d'être la fossoyeuse de la loi Littoral. En d'autres termes, la présente proposition de loi ne saurait être le réceptacle des tentatives infructueuses de modifier la loi Littoral intervenues au cours de cette législature. Afin de répondre aux attentes légitimes des élus locaux qui souhaitent mettre en oeuvre des stratégies locales, je vous demande de faire en sorte de rester au coeur du sujet de cette proposition de loi.

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