D'après le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), la hausse des températures sur notre planète entraînera une hausse du niveau des mers et des océans, évaluée de 26 à 55 centimètres dans le monde d'ici à 2100 dans l'hypothèse la plus optimiste, et de 45 à 82 centimètres pour les estimations les plus pessimistes.
D'ores et déjà, au niveau mondial, le niveau marin s'est élevé de près de 19 centimètres entre 1901 et 2011, avec une nette accélération ces dernières décennies. Entre 1993 et 2014, la hausse a été de 6,7 centimètres au niveau mondial, avec des différences régionales marquées. En France métropolitaine, aux Antilles et à La Réunion, le taux d'élévation le long des côtes est proche de la moyenne mondiale, tandis qu'en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie, cette hausse est plus sensible.
Ce ne sont pas moins de 1 700 kilomètres de côtes qui sont ainsi menacées par l'érosion marine qui s'accélère, soit un quart du littoral français. Au-delà des chiffres, il suffit de se promener le long des côtes de ma région des Hauts-de-France, mais aussi de Seine-Maritime, et d'observer les éboulements de nos falaises, pour se rendre compte de l'importance de ce phénomène qui n'épargne aucun département côtier.
Selon les services du ministère de l'environnement, l'évolution du littoral correspondrait à la disparition de 3 100 terrains de rugby en un demi-siècle, de 1949 à 2005, soit 26 kilomètres carrés. Malgré la menace, l'attrait des bords de mer n'a jamais été aussi fort. La densité de population y est 2,5 fois supérieure à la moyenne nationale, et 4 millions d'habitants supplémentaires y sont attendus d'ici à 2040.
Le littoral français accueille par ailleurs des activités économiques variées, notamment touristiques, que l'érosion côtière met en péril. Les impacts physiques de la montée du niveau de la mer – submersion marine, érosion côtière – obligeront donc, à terme, la relocalisation d'un grand nombre de biens et d'activités. Il est indispensable que la France, qui dispose d'une façade maritime importante, anticipe mieux les conséquences de la montée des eaux sur son littoral. Quatre ans après le lancement de la stratégie nationale de gestion du trait de côte, il était donc essentiel que le Parlement se saisisse de cette question, notamment par cette proposition de loi.
Intégrer le recul du trait de côte dans les divers documents d'aménagement du territoire apparaît comme une sage décision, même si leur élaboration risque de peser sur les collectivités visées – qui ont d'ailleurs déjà réagi. Notre groupe accueille favorablement les modalités selon lesquelles doit être élaborée la stratégie nationale de gestion intégrée du trait de côte : concertation entre l'État et les collectivités territoriales, la communauté scientifique, les acteurs socio-économiques et les associations concernées, puis publication vers le grand public par voie électronique.
Nous sommes également satisfaits que l'examen du texte à l'Assemblée nationale ait permis d'aligner le délai de révision de cette stratégie sur la durée de révision de la stratégie nationale de la mer et du littoral, soit six ans et non dix ans.
Nous nous interrogeons cependant sur certains points, à commencer par l'absence de délai prévu à ce stade par la proposition de loi pour enrichir les plans de prévention des risques – en l'occurrence, le risque de recul du trait de côte. Ne faudrait-il pas que le législateur indique un délai pour contraindre l'État à élaborer et mettre à jour ces plans ?
Ensuite, si nous ne sommes pas hostiles à l'idée d'un « bail réel immobilier littoral », nous nous interrogeons cependant sur sa pertinence. Ne serait-il pas possible, en l'état du droit, d'adapter de façon contractuelle, et ponctuellement, les modalités des baux emphytéotiques, plutôt que de créer une catégorie de bail pouvant uniquement être utilisée sur des zones restreintes ?
Tels sont, mes chers collègues, les quelques éléments que je souhaitais soumettre à notre réflexion commune.