Intervention de Isabelle Le Callennec

Réunion du 24 janvier 2017 à 21h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaIsabelle Le Callennec :

Malgré une surproduction législative – Mme la rapporteure a dénombré huit lois –, force est de constater la réalité : un écart de salaire net moyen entre les femmes et les hommes de 19 %, dont 10 % non expliqués ; davantage de femmes que d'hommes au chômage ; 80 % des emplois à temps partiel occupés par des femmes. L'on ne peut donc que souscrire à l'objectif de la proposition de loi qui prétend en finir avec les inégalités professionnelles. Pour autant, l'on ne peut vous suivre sur des mesures qui auraient pour conséquence d'alourdir encore un peu plus les charges qui pèsent sur les entreprises et donc, à terme, de créer du chômage.

Notre groupe a toujours soutenu activement l'égalité professionnelle et n'est pas contre le principe de sanctions. C'est bien dans la loi Woerth de 2010 qu'a été voté le principe de 1 % de la masse salariale applicable aux entreprises de plus de cinquante salariés non couvertes par un accord ou un plan d'action relatif à l'égalité professionnelle. Plutôt que d'alourdir les pénalités, veillons déjà à appliquer la loi. Le 14 décembre dernier, la Direction générale du travail (DGT) a confirmé que les entreprises se mettaient majoritairement en règle après une mise en demeure. D'après le ministère en charge des droits des femmes, en août 2016, 85 % des entreprises de plus de mille salariés sont couvertes par un accord. Il est juste de rappeler que c'est moins dans les entreprises de moins de mille salariés : 70 % entre 50 et 300 salariés. Pas moins de 2 270 mises en demeure ont été prononcées depuis 2013 et 107 pénalités ont été appliquées. D'où la nécessité de continuer à sensibiliser et à inciter au respect de la loi, par le dialogue social, au plus près de l'entreprise.

Nous vous rejoignons sur l'idée de lutter contre le temps partiel subi, mais reconnaissez que le travail partiel choisi existe aussi. Notre groupe n'a pas voté la mise en place du plancher de 24 heures dont les multiples dérogations, que vous avez évoquées, illustrent les difficultés d'application pour certains métiers. Lors de son audition, la DGT a clairement affirmé que la majorité des branches ayant négocié avaient fait des 24 heures le principe, et de la dérogation l'exception. Dont acte. Mais j'entends, madame la rapporteure, que vous ne partagez pas forcément cette analyse.

Quant au rapport de situation comparée, il a été fondu dans la base de données unique, censée s'appliquer aux entreprises de plus de cinquante salariés. Si la base de données donne la visibilité nécessaire sur l'évolution de la politique d'égalité entre hommes et femmes dans l'entreprise, qui sert de base à la négociation collective, c'est satisfaisant. Si elle n'est pas renseignée ou pas communiquée annuellement, il convient, en effet, de maintenir les sanctions.

Sur la parentalité, nous pouvons tout à fait débattre de l'idée d'allonger la durée du congé de maternité et du congé de paternité. À titre personnel, j'y suis favorable. Pour mémoire, en Europe, les situations sont très disparates : cinquante-deux semaines à 40 % du salaire au Royaume-Uni, seize semaines à 60 % du salaire en France environ, quatorze semaines à 100 % du salaire en Allemagne. Mais, pour débattre, il faudrait disposer de toutes les données. L'allongement que vous proposez a un coût. Il n'est pas chiffré et vous ne dites pas par qui et comment il serait financé. Les indemnités journalières sont prises en charge par la branche maladie de la sécurité sociale. Comment couvrirez-vous ces dépenses nouvelles ?

Enfin, l'on ne peut qu'être perplexe devant l'article 10, qui crée un « registre d'embauche » au sein du registre unique du personnel. Je n'en comprends pas l'objectif. Et la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) estime que les données personnelles ne doivent être a priori conservées que pendant le temps de présence dans l'entreprise. Quel est l'intérêt de les conserver davantage ?

En conclusion, le groupe Les Républicains partage l'intention d'une égalité professionnelle réelle entre les femmes et les hommes, et l'on voit bien qu'il y a encore beaucoup de chemin à faire. Mais nous doutons de l'efficacité des mesures qui sont proposées. Nous pensons qu'il convient d'explorer aussi d'autres pistes : formations conciliables avec le mode de vie et les contraintes des femmes, développement du télétravail, mais aussi lutte contre le travail partiel subi.

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