En 1040, les Seldjoukides, qui sont des Turcs originaires d'Asie centrale, font irruption en Anatolie et sur le territoire iranien actuel. À partir de cette date vont se succéder en Iran, jusqu'en 1925, des dynasties qui, pour beaucoup, sont turcophones. L'avant-dernière dynastie – celles des Kadjars qui précède les Pahlevis – est turcophone, tout comme les Séfévides. Les Mongols de Gengis Khan, dès lors qu'ils s'installent en Azerbaïdjan, sont très vite « turquisés ». On parle d'ailleurs souvent de « monde turco-iranien ». Le mélange s'opère sur le plan culturel : tous les sultans ottomans sont capables de composer de la musique en persan ; de nombreux Iraniens parlent le turc. Après les guerres civiles dans l'empire ottoman, une partie de celui-ci se trouve « chiitisée ». La population des Qizilbash, originaires d'Anatolie, qui sont en quelque sorte les ancêtres des Alévis de Turquie, émigre vers l'actuel Azerbaïdjan. C'est l'époque de shah Ismaïl et de shah Abbas. Les Turcs d'Azerbaïdjan sont au pouvoir – dans le bazar de Téhéran mais aussi dans les palais. Ce sont les soldats, les gouverneurs.
Je me rappelle une anecdote racontée par le géographe Xavier de Planhol : un derviche azerbaïdjanais fait le tour des grandes mosquées chiites de l'Iran, il est reçu comme un roi parce qu'il est azerbaïdjanais ; plusieurs générations plus tard, à l'époque des Pahlavi, un autre derviche azerbaïdjanais fait le même exercice, mais il est regardé de travers car considéré comme un Turc. On voit apparaître au travers de cette anecdote un nationalisme persan.