Parlant le turc et très proche à un moment du président Alain Beretz dont j'ai admiré la capacité de négociation, j'ai vu les choses de très près. Mon rôle consistait à écouter et à intervenir de manière très discrète, parfois à la demande de la partie azerbaïdjanaise lorsque les choses devenaient complexes – je pouvais discuter directement avec eux puisque je connaissais leur langue.
A l'origine du projet se trouve une demande commune du président François Hollande et du président İlham Aliev de créer une université franco-azerbaïdjanaise. Nous avons été invités à Paris par Campus France et nous avons rencontré une douzaine d'universités azerbaïdjanaises, y compris l'université Lomonossov, université russe qui dispose d'une antenne à Bakou. Certains des contacts que nous avons noués se sont révélés intéressants. J'ai fait le déplacement à Bakou, accompagnant les personnes que j'ai déjà citées – outre le président, le vice-président Francis Kern, qui a joué un très grand rôle, et Eckhart Hötzel, qui dirige l'Institut ITIRI et qui s'est rendu à de nombreuses reprises à Bakou ; Strasbourg reçoit des étudiants azerbaïdjanais, venus apprendre le français comme langue étrangère ou bien la traduction, depuis longtemps.
Lors de ce déplacement, nous avons rencontré les mêmes universités et des recteurs très intéressés par le projet d'une université qui ne devait pas s'inspirer de l'université Galatasaray à Istanbul mais d'un modèle plus souple – nous avions défendu celui de l'université franco-allemande (UFA), qui est plutôt virtuelle mais propose des projets de recherche et pédagogiques, de la co-diplomation, et des doubles cursus.
Nous avons eu petit à petit la mauvaise surprise de constater que l'ambition de cette université – plusieurs disciplines étaient initialement envisagées : le droit, les sciences politiques, les sciences humaines, la langue française, ou encore les travaux publics – était revue à la baisse.
Il faut savoir que les universités azerbaidjanaises ex-soviétiques sont subdivisées en une douzaine d'universités différentes – à l'origine, la grande université de Bakou était composée d'instituts qui sont par la suite devenus des universités.
Nous avons été assez déçus de voir que ce projet se transformait en une sorte de grande école d'ingénieurs – l'Académie du pétrole, devenue entre temps Université du pétrole et de l'industrie. Le recteur Babanlı est venu à Strasbourg en juillet avec le ministre Jabbarov. Je me suis rendu en Azerbaïdjan à deux ou trois reprises. D'autres délégations ont fait le déplacement. Mais nous avons dû, à la demande de l'Azerbaïdjan, réduire le champ disciplinaire mais aussi géographique du projet. L'envergure de cette université est donc bien plus limitée que ce qui était prévu au départ.
L'emploi de la langue française a donné lieu à de longues discussions. Nous le défendions tout en laissant une place à l'anglais mais aussi au russe. Aujourd'hui, l'université prévoit l'usage du français pour plus tard et peut-être.