Intervention de Michel Zumkeller

Séance en hémicycle du 1er février 2017 à 15h00
Obligations déontologiques applicables aux membres du conseil constitutionnel — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Zumkeller :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, il nous est demandé, par cette proposition de loi organique, de remédier à la censure, prononcée en juillet dernier par le Conseil constitutionnel, d’un article de la loi organique relative aux magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature.

J’iobserve que ces correctifs législatifs sont assez fréquents : ce n’est en effet pas la première fois que nous examinons à nouveau, par le biais d’une initiative parlementaire, une disposition déjà votée puis censurée au motif que le véhicule législatif initial n’était pas le bon.

En outre, comme cela a été dit à plusieurs reprises, cette proposition de loi organique ne pourra vraisemblablement pas achever son parcours parlementaire, compte tenu de l’interruption prochaine des travaux de l’Assemblée et du Sénat. Les conditions de son examen sont donc particulières. Il nous semble qu’à quelques semaines de la fin de cette législature, d’autres dispositions, plus importantes, auraient pu être examinées.

Quoi qu’il en soit, depuis quelques années, des mesures déontologiques ont été peu à peu appliquées à un nombre grandissant de responsables publics, en les soumettant notamment à l’obligation de déclarer leurs intérêts et leurs situations patrimoniales. Récemment, ces dispositions ont été rendues applicables tant aux agents publics qu’aux militaires et aux fonctionnaires. Elles l’ont également été aux membres des juridictions administratives et financières, aux magistrats de l’ordre judiciaire comme aux membres du Conseil supérieur de la magistrature.

Bien sûr, il nous serait difficile de nous opposer à ce que les règles applicables aux membres du Conseil supérieur de la magistrature ne concernent pas également les membres du Conseil constitutionnel. Le principe en a été accepté par la représentation nationale puisque cette mesure a déjà été adoptée dans la loi organique du 8 août 2016 relative aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature.

Nous doutons simplement que cela puisse avoir un quelconque effet sur la confiance ébranlée de nos concitoyens envers les élus et la justice. Élargir toujours plus le champ des personnes concernées par des obligations de déclaration d’intérêts et de patrimoine risquerait au contraire de nous éloigner de l’objectif visé, en alimentant la suspicion que ce type de démarches fait peser sur toutes les catégories de concitoyens concernées.

En outre, la place particulière du Conseil constitutionnel dans nos institutions et la présence en son sein de membres de droit font naître un certain nombre d’interrogations. Se pose notamment la question de soumettre ces membres de droit aux obligations de déclaration : le fait de prévoir, en raison du caractère épisodique de leur participation, un régime spécifique de déclaration n’est-il pas contraire au principe d’égalité entre les membres ?

Par ailleurs, à la différence du présent texte, la loi organique déjà adoptée n’imposait pas aux membres de droit de déclaration de situation patrimoniale. Cette disposition ne sera-t-elle pas difficile à mettre en oeuvre en pratique ?

S’agissant de l’autorité compétente pour ces déclarations, la proposition de loi organique fait le choix de les soumettre à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique. Or, dans une décision du 9 juillet 2008, le Conseil constitutionnel a consacré sa propre indépendance et précisé que le principe général de séparation des pouvoirs « interdit les immixtions des autres pouvoirs dans l’exercice de ses missions ». Cette décision avait, je le rappelle, contribué au rejet par le rapporteur de la commission des lois et du Gouvernement d’un amendement au projet de loi relatif à la transparence de la vie publique tendant à soumettre les membres du Conseil constitutionnel à des obligations déontologiques.

Au-delà de nos doutes sur l’efficacité d’une telle mesure pour renforcer la transparence, nous avons donc également quelques interrogations, dont je viens de vous faire part. Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe de l’Union des démocrates et indépendants s’abstiendra sur ce texte.

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