Intervention de Stéphane Demilly

Réunion du 1er février 2017 à 9h45
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Demilly :

Sur un sujet aussi technique que celui-ci, qui concerne bien le démantèlement des infrastructures nucléaires et non la question de l'opportunité de recourir ou non au nucléaire comme énergie – comme cela est d'ailleurs précisé dès les premières pages du rapport –, nous pourrions nous attendre à ce qu'un consensus se dégage des travaux de notre mission d'information.

Ce n'est pourtant pas le cas, comme en atteste l'avertissement figurant au début de ce rapport, qui souligne le désaccord entre le président de la mission et la rapporteure sur un certain nombre de points – un désaccord d'ailleurs rappelé, tout au long du rapport, par des encarts du président de la mission soulignant telle ou telle divergence de vue avec la rapporteure. Cela montre bien, une fois de plus, que la question du nucléaire est extrêmement sensible et que, quel que soit l'angle adopté pour l'aborder, des questions stratégiques, et donc des questions d'appréciation politique, se posent.

L'un de ces points de désaccord porte sur une question centrale du rapport, celle de la « sous-estimation vraisemblable » – c'est le titre du II de la troisième partie du rapport – par EDF du coût du démantèlement de ses centrales. Il s'agit là d'un sujet lourd de conséquence pour EDF, et qui incite à s'interroger sur la faisabilité financière du démantèlement des infrastructures nucléaires à courte échéance. Ce point m'inspire plusieurs questions.

Premièrement, est-il sérieux et raisonnable d'envisager un prolongement de la durée de vie des réacteurs de façon à étaler dans le temps la constitution des provisions qui serviront au démantèlement ? C'est le pari que semble faire EDF à l'instar de ce qui se fait dans certains pays, selon une méthode qui place le principe de réalité économique et financière avant toute volonté de réduction de la part de l'énergie nucléaire dans la production d'électricité.

Deuxièmement, l'objectif fixé par la loi de transition énergétique de faire passer d'ici à 2025 – c'est-à-dire demain – la part de l'électricité d'origine nucléaire à 50 % contre 75 % aujourd'hui est-il réaliste ? À la lecture du rapport, on a l'impression qu'EDF aurait décidé de s'affranchir de cet objectif.

Troisièmement, le rapport souligne que l'hypothèse de la constitution, dans notre pays, d'une véritable filière de démantèlement des infrastructures nucléaires, est impossible en l'absence de visibilité et d'un agenda clair. Si je partage en partie l'analyse développée dans le rapport à ce sujet, je considère cependant que nous devons explorer toutes les pistes de façon que le marché du démantèlement puisse revenir à des entreprises qui créent de l'emploi sur notre sol. Il serait tout de même incroyable que la France, deuxième producteur mondial d'électricité nucléaire, ne parvienne pas à organiser sa filière de démantèlement. Je souhaite donc connaître l'avis de nos collègues à ce sujet.

Enfin, pour conclure mon propos, je pense qu'il serait très utile que notre commission puisse auditionner les dirigeants d'EDF – dont l'État est actionnaire à hauteur de 85,6 % –, afin de leur permettre de s'exprimer devant nous au sujet de ce rapport particulièrement inquiétant.

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