Intervention de Jacques Krabal

Réunion du 1er février 2017 à 9h45
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Krabal :

Rien ne pèse tant qu'un secret, comme le disait Jean de La Fontaine dans sa fable Les Femmes et le secret. J'ai entendu le président de notre Commission dire qu'il fallait sortir de l'opacité, et je voudrais saluer la volonté de transparence des auteurs de ce rapport d'information, car je suis convaincu que la transparence et la science nous seront nécessaires pour nous affranchir des passions qui entourent les débats sur le nucléaire.

La question du démantèlement des installations nucléaires est infiniment complexe pour ceux qui ne sont pas experts en ce domaine – je ne le suis pas et j'imagine que peu de mes collègues le sont –, et je pense que cette question doit être abordée avec humilité et lucidité, quelles que soient nos convictions en la matière.

Je remercie la rapporteure et le président de la mission, qui ont accompli un travail de fond portant sur de multiples points précis et sous-problématiques sur lesquels même les spécialistes ne savent pas tout. Les nombreuses comparaisons qu'établit le rapport avec les autres pays confrontés aux mêmes défis, et connaissant des réussites et des échecs, nous montrent la difficulté du chemin, mais elles sont indispensables pour le débat et pour décider du temps, de la méthode et des perspectives pour la France.

Comme dans d'autres domaines, notre unique boussole doit être scientifique. Les considérations idéologiques et les emportements irrationnels, d'un côté comme de l'autre, ne favorisent pas le débat serein et éclairé dont nous avons besoin. À ce sujet, nous avons encore des progrès à faire, mais nous en avons fait déjà beaucoup, et la situation actuelle n'a plus rien à voir avec celle d'il y a vingt-cinq ou trente ans.

Je veux de nouveau saluer le rôle et les travaux remarquables de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et de l'ASN, je crois que nous pouvons être unanimes pour dire que c'est une chance pour la France que de disposer d'institutions de si haut niveau : quand on a cette chance, on se doit de ne pas la gâcher et d'essayer de l'optimiser. Ces autorités doivent être renforcées – je l'ai souvent dit, mais le rapport qui nous est présenté me donne une nouvelle occasion d'insister sur ce point.

Le Grenelle de l'environnement avait évité d'aborder le nucléaire, ce qui était peut-être une condition nécessaire à sa réussite, mais notre majorité peut être fière d'avoir réussi une belle loi sur la transition énergétique au sein de laquelle le nucléaire n'était pas tabou.

Sur les conclusions et les recommandations du rapport, nous constatons à nouveau que, concernant le nucléaire, les coûts initialement affichés ne correspondent en rien aux coûts réels, et que les investissements proposés par EDF apparaissent insuffisants. Même si nous peinons à obtenir des chiffres précis, donc à mesurer l'ampleur du delta entre prévisions et réalité, il n'y a aucun doute sur le fait qu'il est immense.

Ce rapport – comme d'autres qui suivront – tente de faire la lumière sur ce point essentiel, mais ce n'est pas suffisant : compte tenu de l'importance de la question du coût du nucléaire, nous devrions avoir en France des outils améliorés pour le calculer, un groupe, une structure indépendante réunissant les meilleurs experts scientifiques associés à nos meilleurs comptables – je pense à la Cour des comptes pour ce qui est des aspects financiers.

Les exemples de sortie progressive du nucléaire de nombreux voisins et les démantèlements en cours au Japon, en Allemagne, au Royaume-Uni, dans les pays baltes, en Bulgarie, en Slovaquie, en Suisse et en Belgique, nous montrent, me semble-t-il, que nous avons fait le bon choix en décidant d'une baisse de la part du nucléaire dans notre bouquet énergétique.

S'il est difficile d'avoir une conviction définitive sur le sujet, je crois intuitivement que le nucléaire ne fait pas partie des énergies d'avenir sur lesquelles nous devrions massivement investir.

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