Cela signifie qu’il faut adopter réellement, et pas seulement en apparence, le réflexe de l’évaluation, en intégrant dans le processus de réforme le temps nécessaire pour l’examen de ses résultats. Cela requiert enfin de renforcer considérablement le contenu des études d’impact.
Cette observation réitérée des juridictions financières trouve son illustration dans le chapitre sur les autoroutes ferroviaires, dont la Cour souligne le bilan mitigé. Alors que leur développement a représenté un effort financier significatif pour la collectivité, la Cour recommande que soit menée rapidement une évaluation de l’impact environnemental et économique de chaque projet.
Les réformes doivent par ailleurs reposer sur une stratégie connue par les acteurs, construite sur la base d’une analyse partagée des besoins, des priorités d’action pour y répondre et un partage des rôles clair.
C’est tout le sens des recommandations formulées par la Cour dans ses travaux sur la politique de contrôle et de lutte contre la fraude en matière de formation professionnelle continue des salariés. Pour construire cette politique qui n’existe pas aujourd’hui, il paraît nécessaire de mettre en place une véritable stratégie de contrôle, reposant sur une analyse des risques, une programmation annuelle et une organisation plus adaptée aux enjeux.
La qualité de la préparation d’une réforme est cruciale. Il ne s’agit pas pour autant de céder au mirage des planifications parfaites et de détourner pudiquement le regard à l’heure de la mise en oeuvre.
Les travaux présentés aujourd’hui permettent d’illustrer deux facteurs qui ont un rôle essentiel dans la mise en oeuvre réussie d’un projet. Ces deux éléments sont les suivants : la responsabilisation des acteurs du changement et l’instauration d’un pilotage réactif par les résultats.
Le chapitre portant sur le renouvellement des moyens aériens et navals de la douane est le contre-exemple exact d’une responsabilisation réussie des agents. La Cour a constaté à leur sujet une longue et grave série d’erreurs et d’échecs, produits d’une culture autarcique de la douane et d’un défaut réitéré de contrôle des services locaux par l’administration centrale.
Enfin, l’exemple de l’indemnisation amiable des victimes d’accidents médicaux prouve la nécessité d’instaurer un pilotage réactif par les résultats, qui permette de tirer la sonnette d’alarme lorsque les objectifs ne sont pas remplis.
Mise en oeuvre dans la foulée de la loi du 4 mars 2002, cette politique a en effet été dévoyée. Si la loi institue un droit à réparation des accidents médicaux même en l’absence de faute, ce qui constitue un grand progrès, les résultats obtenus dans le cadre de la procédure amiable ne sont pas à la hauteur des objectifs attendus. Le nombre de demandeurs d’indemnisation amiable reste en effet modeste au regard de la population potentielle, car les victimes se détournent de cette procédure. Cela s’explique par des défaillances lourdes dans le positionnement et la gestion de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, établissement public chargé d’indemniser les victimes.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je voudrais à présent conclure en rappelant trois messages.
Le premier, c’est que la situation de nos finances publique demeure fragile et vulnérable, malgré des progrès constatés. Les efforts pour maîtriser les dépenses publiques devront être poursuivis et intensifiés si notre pays veut préserver sa capacité à faire des choix souverains et à rester crédible dans le concert européen grâce au respect de ses engagements. Les rapports de la Cour et des chambres régionales des comptes montrent des marges d’efficacité et d’efficience dans nombre de politiques publiques.