Intervention de Jacques Bompard

Séance en hémicycle du 9 février 2017 à 9h30
Ratification d'ordonnances relatives à la corse — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Bompard :

Non, l’aspect positif de ce texte repose en la rupture qu’il établit avec le contractualisme territorial qui rend chaque réalité naturelle de notre pays dépendante d’une fabrication artificielle de contingences à un grand tout grimé en idéologie républicaine. Les Provençaux peuvent s’enorgueillir d’une certaine prescience en la matière puisqu’un de mes compatriotes écrivait : « Toutes les libertés politiques sont, du reste, inscrites dans la Constitution actuelle de la France ; mais l’on y trouve fort peu de libertés locales. » Notons désormais que les libertés politiques sont devenues moins prégnantes à force d’une évolution vers le règne complet et absolu des médias et des partis politiques.

Les libertés locales sont pourtant la seule possibilité de régénérescence de notre nation à travers ses forces organiques. Nous le voyons en Corse, où la réaction face aux incivilités, la volonté de ne pas voir d’autre civilisation mettre à bas la culture corse et la préservation du pouvoir des lignées sont encore tout à fait actifs. Notre ami de Martigues que je viens de citer précisait aussi : « Pour la commune et pour la région contre le département, contre le fonctionnariat, pour les joies et pour les fiertés de l’indépendance locale contre le servage administratif : je ne pense pas qu’il y ait au monde poésie plus riche en tableaux de regrets et d’encouragement. » Voilà tout ce que je peux souhaiter à l’assemblée territoriale de Corse. Évidemment, les dispositions prévues dans les trois ordonnances ne justifient pas un optimisme démesuré quant à ce projet de loi de ratification. Mais laissons vivre l’espoir que, demain, les Corses sauront s’émanciper de cet arsenal de domestication des énergies et des libertés locales. Car il s’agit bien de cela : la France des provinces n’est pas simplement reléguée à la périphérie, elle est également asservie à une unification de façade qui s’apparente davantage à une réaction inquiète qu’à un projet de gestion cohérente. Or je crois, comme dans Les dentelles du rempart, que « le nom d’une patrie enveloppe le sentiment de la continuité des familles qui se succèdent sur la terre des pères quand les foyers construits, détruits et reconstruits protègent l’identité de l’esprit et du sang ». La Corse y parvient parfaitement, en complète résistance vis-à-vis de tous les processus et de toutes les manigances imaginables.

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