Chaque fois qu’il y a eu des moments difficiles, je suis allé devant les agriculteurs, que ce soit aux congrès de la FNSEA, aux assemblées générales spécialisées – lait, porc, filière bovine. Combien de critiques n’ai-je pas entendues ! Malgré cela, j’ai continué à avancer parce que j’ai la profonde conviction que la mutation en cours n’est pas le fait du ministre mais constitue une chance pour l’agriculture de France, pour les agriculteurs français et pour la conception que nous avons du nouveau développement : l’agro-écologie est une opportunité qu’il faut saisir et organiser. Elle a été étouffée, certes, mais elle va surgir de nos débats, de notre capacité à modifier les modèles de production, et elle débouchera sur des perspectives nouvelles.
Pour réduire le recours aux produits phytosanitaires, il fallait d’abord repenser les modèles de production. En effet, les modèles de production, les itinéraires techniques qui ont été créés après la seconde guerre mondiale reposent sur le machinisme, la chimie et les engrais. Si nous voulons diminuer les consommations intermédiaires, limiter l’usage des produits phytosanitaires et des engrais minéraux, il faut que nous soyons capables de repenser nos modèles de production. J’évoquais tout à l’heure les légumineuses : elles ont la particularité de fixer l’azote de l’air, ce qui permet d’économiser de l’azote minéral. Voilà un vrai sujet, un véritable enjeu, une stratégie à suivre.
L’agro-écologie n’est pas une agriculture qui viendrait se substituer à une autre : c’est l’avenir, dont l’enjeu est notre capacité à combiner l’économie et l’écologie. Cela a pris du temps, cela a occasionné de longs débats, des contestations, des oppositions et des conflits, mais au bout du compte je suis sûr que l’agro-écologie ouvre une grande et belle perspective à notre agriculture.