Intervention de Jacques Bompard

Séance en hémicycle du 16 février 2017 à 9h30
Modification du code des juridictions financières — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Bompard :

Monsieur le président, monsieur le président de la commission, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, chers collègues, je ne peux commencer ce discours sans rappeler à l’Assemblée qu’elle vient de voter la loi la plus inique du quinquennat avec le délit d’entrave à l’avortement ; une loi anticonstitutionnelle et anti-française, qui serait retoquée au Conseil constitutionnel si notre pays conservait son ordre juridique, et qui ne passera de toute façon pas le contrôle externe.

Venons-en à notre texte concernant les ordonnances sur les juridictions financières. L’ordonnance no 2016-1360 du 13 octobre 2016 est au coeur de notre sujet. Il s’agit donc de l’examiner dans la stricte recherche du bien commun. Ainsi, les développements de l’article 1er, qui couronnent la compétence de contrôle de la Cour des comptes, me sont parfaitement agréables. Je note que la synthèse des recommandations du rapport public annuel 2017 de la Cour prouve que la France a augmenté sa distribution de visas d’un million entre 2010 et 2015. C’est la valeur de ces études que de désintoxiquer les Français sur un sujet où règnent la manipulation d’État et son encouragement médiatique.

Cela permettra sans doute aux chambres régionales de préciser les nombreux abus de gestion d’offices HLM, les gestions des protégés du système utilisant par exemple les finances publiques pour satisfaire leurs ambitions locales ou nationales, les collectivités dispendieuses qui aggravent la dette nationale, en somme toutes les extravagances budgétaires qui président à la ruine de notre pays et à son financement par le racket fiscal imposé aux Français.

Notons ainsi le bilan proposé par Contribuables associés le 14 novembre dernier sur les collectivités locales : entre 2002 et 2013, les effectifs de la fonction publique territoriale ont grossi de 405 000 agents, soit plus 27,5 %, pour la moitié recrutés dans les communes et les établissements intercommunaux, et ce « alors que ces entités n’ont pas fait l’objet de nouveaux transferts de compétences de la part de l’État, à la différence des départements et des régions ».

On nous promettait du mieux avec la généralisation des intercommunalités sur l’ensemble du territoire. Las, avec les « intercos », les élus commettent les mêmes bêtises, mais en plus grand. Loin de réaliser des économies d’échelle, les regroupements communaux se traduisent par une augmentation des dépenses publiques, et par voie de conséquence de l’endettement et des impôts au niveau communal. La taxe foncière a augmenté en moyenne de 29 % depuis 2005 ; elle grimpe trois fois plus vite que l’inflation depuis 2010. Pour la taxe d’habitation, c’est plus de 20 %.

Je m’inquiète de la disposition de l’article 2 qui prévoit que : « La Cour des comptes peut recourir, pour l’évaluation des politiques publiques, à l’assistance d’experts désignés par le Premier président. Elle conclut une convention avec les intéressés indiquant, entre autres, s’ils exercent leur mission à temps plein ou à temps partiel. » Loin de moi l’idée de refuser une intervention extérieure, soit plus experte, soit plus neutre, pour analyser un sujet. Toutefois, le manque d’encadrement de la mesure est une porte ouverte à des excès qui pourraient être regrettables. Nous savons en effet que les pouvoirs finissants sont tout à fait familiers des pressions pour obtenir des missions gratifiantes permettant de les sauver d’un retour qui serait pourtant salvateur au pays réel.

Nous discutons aussi de la Cour de discipline budgétaire et financière. Qu’est-elle ? Composée à parité de conseillers d’État et de conseillers maîtres à la Cour des comptes, la Cour de discipline budgétaire et financière est une juridiction administrative spécialisée chargée de réprimer les infractions commises en matière de finances publiques. Néanmoins, elle ne peut être saisie par les élus locaux, alors qu’ils sont souvent les premiers témoins soit de l’autoritarisme – gouvernemental ou autre –, soit de la légèreté des acteurs, soit même de l’instrumentalisation politique de la gestion.

Nous voyons bien l’intérêt déontologique de l’article 18, relatif aux règles de mobilité de certains magistrats. Pourriez-vous, madame la rapporteure, m’assurer que le périmètre de cette disposition vous paraît suffisamment encadré et défini ?

Plus globalement, nous sommes face à la question de la jonction entre le pays légal et le pays réel. Vous le savez, nos compatriotes ont perdu toute espèce de confiance en des institutions qui les ont trop souvent trahis. Ils ont trop vu d’arrangements, de négociations de droits de succession avec Bercy, de passe-droits entre amis, d’instrumentalisation des parquets. Je crois d’ailleurs que l’utilisation actuellement faite par la gauche du parquet national financier signe une nouvelle bravade politique qui retombera honteusement sur ses responsables.

Par ailleurs, la chasse à l’homme organisée contre Patrick Buisson – et d’autres – par le ministère les conforte dans l’impression de luttes obscures plutôt que de défense du bien commun au cours de ce quinquennat.

La chambre régionale des comptes donne des louanges aux deux villes gérées par mon mouvement, la Ligue du sud. C’est systématique. Il est tout aussi systématique que l’État y ajourne des décisions de bon sens, par simple volonté de contrarier les choix électoraux de notre peuple. Voilà un sujet d’audit, voilà un sujet qui mériterait toute l’attention des cours administratives et des magistrats de la Cour des comptes.

Je voterai très volontiers ce projet de loi.

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