Merci, monsieur le président, d'avoir lancé cette mission d'information très rapidement, au mois de juillet dernier, au lendemain du vote du 23 juin. Comme mes collègues, je salue un rapport clair, précis, riche, qui sera utile pour la position de la France. Ce rapport fait honneur à notre Parlement car nous avons grand besoin d'une clarification des positions, des moyens et des fins, et c'est ce à quoi il contribue. Quel que soit le Gouvernement que nous aurons demain, vous avez raison de dire qu'il faut une feuille de route rigoureuse.
Vous avez employé la métaphore du divorce en soulignant que, dans une instance de divorce, il faut aboutir à un accord et en même temps protéger l'avenir. C'est la difficulté de notre mission d'information, qui doit à la fois assurer un moyen terme dans la sortie du Royaume-Uni et montrer que l'Union européenne est capable de surmonter ce divorce et d'aller au-delà.
Je ne sais s'il convient d'entrer dans un débat pour savoir si l'on doit être rusé ou non. La ruse peut être intéressante dans le court terme, mais à long et à moyen terme c'est beaucoup plus délicat, et je pense que la France a au contraire eu raison d'adopter une position très claire. L'Allemagne était au départ dans l'attente. Or nous avons besoin de clarté, comme cela s'est avéré par la suite dans les sommets européens : les derniers Conseils ont montré qu'il y avait unité sur la nécessité de préparer l'avenir en saisissant l'opportunité de resserrer le projet européen sur des politiques communes, peut-être des coopérations. Il faut aussi de la clarté dans le couple franco-allemand.
Un mot sur l'approche culturelle de la Grande-Bretagne dans cette négociation. Le rapport rappelle le débat politique dans ce pays, les tergiversations, l'intervention de la Haute Cour et du Parlement. C'est l'esprit de la Common Law qui domine du côté britannique – « les principes d'abord et nous verrons plus tard pour les modalités » – tandis que notre position est plutôt d'examiner comment déconstruire les traités pour faire en sorte que cette sortie soit viable. Il est important de bien appréhender ce différentiel culturel. Culturellement, le droit européen n'est pas compris des Britanniques.
J'apprécie ce que vous avez dit au sujet de la réciprocité, notamment dans la question des Britanniques présents en France et dans le reste de l'Europe et des Français et Européens présents au Royaume-Uni. Il est important d'obtenir, notamment par rapport aux conditions de résidence, non seulement le respect des quatre libertés mais aussi et surtout la réciprocité. Le Home Office britannique avait tout d'abord compliqué les procédures administratives mais il est revenu sur ce durcissement en annonçant qu'il ne demanderait plus de justificatifs de domicile et autres, mais se baserait sur les impôts.
Il existe par ailleurs de nombreux couples franco-britanniques ; ma contribution au rapport a été de tenter de mesurer concrètement les implications du Brexit pour eux. Cela pose des questions d'impatriation, de transfert de capitaux, de transfert de fonds de pension… Beaucoup d'Européens comptaient avoir une retraite complémentaire par capital et cela devient plus compliqué.
Dans la fin de votre rapport, il est question de la diplomatie européenne. Je parlerais même, quant à moi, de médiation européenne, une médiation pour évoluer d'un accord à l'autre, parvenir à un accord de sortie. Je pense que de nouvelles complications vont se présenter très rapidement dans la discussion sur les principes. L'association des Parlements nationaux me paraît fondamentale. Une question qui se posera également est de savoir s'il faut un secrétaire d'État affecté à la question du Brexit et j'aimerais connaître votre avis sur ce point.