Monsieur le président, monsieur le ministre de l’économie et des finances, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, c’est avec une certaine émotion que je m’exprime devant vous. Je serais tenté de dire, en plaisantant, qu’il était temps ! Il était temps, en effet, qu’aboutisse ce marathon législatif que nous avons entamé dès 2012 – et non pas, comme beaucoup le croient, après la tragédie du Rana Plaza –, sur une plateforme d’ONG qui visait à construire une planète solidaire.
Pour reprendre une image que nous avons déjà eu l’occasion d’utiliser, la grande différence entre un fleuve et un marécage, ce sont les rives. Il nous revient, à nous Parlement, à nous législateur, et c’est la noblesse la plus haute de notre mission, d’établir des rives pour canaliser les courants et éviter les marécages – ceux des sales affaires, ceux du mépris du pauvre monde et des pauvres gens – et pour redonner toute leur énergie à la mondialisation et à l’économie.
Nous le faisons au nom de valeurs qui remontent à la nuit des temps, comme cette question qui est certainement l’une des plus fondatrices de notre humanité : « Es-tu le gardien de ton frère ? », ou cette proclamation des révolutionnaires et des Lumières, en 1789 et 1791, selon laquelle « les hommes naissent libres et égaux en droits ». Alors qu’il se battait pour l’abolition de l’esclavage, Henri Grégoire, député de la Constituante et originaire de Meurthe-et-Moselle, dénonçait déjà le lien juridique entre les maisons mères et leurs filiales en répétant que, lorsqu’un navire négrier prend la mer dans ce honteux trafic, en sont complices les affréteurs, les armateurs, les assureurs et même ceux qui ont fabriqué les cordages.