Intervention de Eduardo Rihan Cypel

Réunion du 8 février 2017 à 17h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEduardo Rihan Cypel :

Je vous remercie, Mon général, pour la force de votre propos, qui nous permet de considérer avec un peu plus de profondeur stratégique le monde actuel et à venir. Je partage en effet votre inquiétude face au nouveau désordre mondial. La situation, instable et dangereuse, s'est dégradée de manière radicale, au plan qualitatif et quantitatif, depuis nos travaux sur le Livre blanc : affirmation de nouvelles volontés de puissance, apparition de nouvelles courses aux armements – prolifération des armes de destruction massive et dissémination des armes conventionnelles –, risques épidémiques, cyber-menaces, néoterrorisme global… Nous vivons désormais dans un monde des quatre D, « D » comme « dérèglement ».

Le premier dérèglement est d'ordre économique et financier. Les effets de la crise financière de 2008 n'ont pas été entièrement jugulés ; je pense en particulier à la raréfaction budgétaire qui a touché l'ensemble des pays occidentaux, avec les conséquences que l'on sait pour les budgets de la défense, et donc pour notre sécurité collective.

Le deuxième est d'ordre géopolitique ; nous venons de l'évoquer.

Le troisième, le dérèglement climatique, est radical et risque de provoquer des crises supplémentaires dans les années à venir.

Le dernier et peut-être la conséquence de tous les autres, c'est le dérèglement idéologique. Nous assistons en effet à l'apparition de nouvelles idéologies néfastes, favorables au repli et au nationalisme, qui sont des facteurs d'instabilité analogues à ceux que nous avons connus dans les années 1910. Personne ne souhaitait la Première Guerre mondiale, non plus que la Seconde Guerre mondiale, et pourtant elles ont eu lieu. Je ne crois pas que nous soyons forcément à l'aube d'une troisième guerre mondiale, mais ces ruptures, auxquelles s'ajoute la rupture technologique – l'intelligence artificielle –, doivent nous inquiéter.

J'en viens à mes questions. Premièrement, croyez-vous nos partenaires et amis Européens suffisamment lucides pour accepter de mutualiser, non pas toutes – car il faut préserver la souveraineté de chacun –, mais le plus grand nombre de dépenses militaires possible ? Si je suis bien entendu favorable à ce que le budget de la défense française atteigne 2 % du PIB, mais je souhaite également que nous puissions exclure les dépenses de défense et de sécurité du calcul des déficits publics.

Deuxièmement, quels seront les effets des ruptures technologiques radicales auxquelles nous assistons – je pense notamment à l'intelligence artificielle – sur le modèle de défense que nous aurons à préparer pour les prochaines décennies ?

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