Intervention de Jean-René Marsac

Séance en hémicycle du 28 octobre 2014 à 21h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 - projet de loi de finances pour 2015 — Aide publique au développement – prêts à des États étrangers

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-René Marsac :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires étrangères, monsieur le rapporteur spécial, mes chers collègues, l’année 2014 a été marquée par l’adoption de la loi d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale. Pour la première fois, le Parlement a pu participer à la définition des orientations de cette politique. Nous regrettons cependant la baisse des crédits destinés à l’aide au développement. Le projet de loi de finances pour 2015 prévoit une baisse de près de 3 % des crédits et une baisse de plus de 7 % jusqu’en 2017.

Si nous comprenons les contraintes budgétaires, le groupe socialiste souhaite que la France reprenne une trajectoire ascendante vers les objectifs qu’elle s’est fixés. Nous avions déjà rappelé dans la loi les engagements internationaux pris par la France en matière de financement de l’aide publique au développement : consacrer 0,7 % du revenu national brut – RNB – à l’APD et affecter 0,2 % du RNB aux pays les moins avancés. Ces engagements ont été tenus, par exemple, par le Royaume-Uni qui, malgré la crise économique et des coupes budgétaires, alloue désormais 0,7 % de sa richesse nationale aux pays en développement.

La réduction des moyens budgétaires doit nous amener à rechercher d’autres sources de financement. La mise en oeuvre progressive d’une taxe sur les transactions financières à l’échelle européenne est en cela indispensable. La Commission européenne estime que la taxe sur les transactions appliquée en France rapporterait 11 milliards d’euros par an. D’après une étude réalisée pour le magazine Challenges, la taxe sur les transactions financières pourrait rapporter jusqu’à 15 milliards d’euros.

Aujourd’hui, la taxe sur les transactions financières française rapporte à la France 700 millions d’euros. La taxe française comporte en effet de nombreuses exceptions. La France ne taxe les transactions financières qu’à hauteur de 0,2 % alors que le Royaume-Uni, qui arrive à dégager 3 à 4 milliards d’euros chaque année grâce à ce dispositif, taxe les transactions à 0,5 %.

Le Gouvernement s’est engagé à affecter 25 % des ressources de cette taxe au Fonds de solidarité pour le développement. Cependant, le projet de loi de finances prévoit que seulement 130 millions d’euros seront affectés à ce fonds, soit moins de 20 %. Un amendement adopté en séance lors de l’examen en première lecture de la première partie de la loi de finances a permis d’augmenter ce plafond à 140 millions. Nous nous en réjouissons mais cela reste insuffisant.

De manière plus générale, nous souhaitons qu’une réflexion soit menée sur la façon d’aider les pays les plus pauvres. Nous nous inscrivons dans l’objectif de la loi de consacrer 50 % des subventions de l’État et deux tiers des subventions de l’Agence française de développement aux seize pays prioritaires. Nous souhaitons privilégier le don pour ces pays, qui sont généralement surendettés. Les dons peuvent également servir de base à des effets de levier. Nous présenterons tout à l’heure un amendement qui permet de renforcer cette politique de dons.

Nous souhaitons la mise en oeuvre d’une nouvelle stratégie vis-à-vis de l’Afrique et des pays francophones. La loi précise que 85 % de l’effort financier de l’État doit être orienté vers l’Afrique subsaharienne et les pays du voisinage Sud et Est de la Méditerranée. C’est un bon objectif, mais nous devons nous inspirer du rapport Védrine-Zinsou publié en décembre 2013, qui invite la France à créer une nouvelle dynamique économique avec l’Afrique, et du rapport Attali, publié en septembre dernier, qui met l’accent sur le potentiel économique énorme que représente la francophonie pour la France.

Autre priorité sur laquelle nous avons insisté lors de l’examen du projet de loi et sur laquelle je souhaite revenir : la formation. Une des caractéristiques des pays bénéficiaires de la politique de développement est la jeunesse de leur population. À cet effet, la loi mettait l’accent sur la nécessité de mettre en oeuvre des politiques d’éducation et de formation ambitieuses et efficaces.

La formation professionnelle a un effet de levier sur la création d’emplois et la création d’entreprise, mais aussi sur la capacité de ces pays à s’adapter au contexte de mondialisation des échanges et de multiplication des crises économiques, sanitaires et climatiques. C’est donc un enjeu très important. La formation professionnelle in situ est aussi un vecteur puissant pour le renforcement de la francophonie. De ce point de vue, madame la secrétaire d’État, je pense que vous serez très sensible à l’idée d’une nouvelle combinaison des moyens budgétaires du développement et de la francophonie sur le champ de la formation.

L’efficacité de notre aide au développement passera enfin par un continuum plus explicite entre les aides d’urgence face aux crises, les phases de reconstruction, de développement, et l’amorçage de partenariats s’inscrivant dans des échanges économiques justes et durables. Tout cela exige des coordinations renforcées entre tous les acteurs, qu’ils soient publics ou privés.

L’adoption de la loi de programmation et d’orientation était une première étape : elle a défini une feuille de route ambitieuse. Nous devons désormais nous donner les moyens de nos ambitions. Malgré les réserves et les inquiétudes que nous exprimons, le groupe SRC votera bien évidemment les crédits de cette mission.

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