Intervention de Antoine Godbert

Réunion du 27 mai 2014 à 16h15
Commission d'enquête sur l'exil des forces vives de france

Antoine Godbert, directeur de l'Agence Europe-éducation-Formation-France, 2E2F :

Il y a un mois, nous avons engagé une étude sur cette question dans le secteur de la formation professionnelle où la féminisation est moins avancée, ce qui est dû à l'impact des familles sur la décision de mobilité. Nos faibles performances dans l'enseignement secondaire peuvent être liées à l'impact des familles dans les milieux moins favorisés, alors que les familles favorisées sont plus habituées à organiser des échanges bilatéraux afin que les jeunes puissent passer six mois à l'étranger. C'est particulièrement le cas des élèves des lycées français à l'étranger. Mais nous n'avons jamais eté mandatés pour travailler sur cette dimension.

Madame la présidente, la contribution des régions à l'enseignement supérieur manque d'équité car les efforts sont très différents d'une région à l'autre. Lors de la création d'Erasmus+, il a été décidé que l'Europe contribuerait à la mobilité ainsi que l'Etat et les collectivités territoriales. Le système a été détourné en 2007 lorsque l'Etat a décidé de conditionner l'attribution des bourses au niveau de ressources, et les régions ont pris la suite. Soutenir la mobilité relève de la liberté stratégique laissée à chaque président de région. Mais où est l'équité républicaine dès lors qu'un jeune ne peut pas partir en mobilité à cause des choix stratégiques de la collectivité où il habite ?

Oui, nous sommes favorables à la réforme territoriale dans la mesure où elle apportera des ressources aux régions et aux inter-régions, évitant ainsi que les régions les plus pauvres cessent de soutenir la mobilité, ce qui, pour les jeunes, constitue une double peine. Mais pour que nous puissions accorder des bourses plus conséquentes, il faut que l'Europe renforce sa participation et que le Gouvernement décide de sortir de la volumétrie qu'il s'est fixée. Je veux bien gérer 75 000 mobilités, mais il me semblerait plus intéressant de faire évoluer les bourses pour permettre aux jeunes d'effectuer leur mobilité dans les pays de leur choix.

Améliorer la qualité de la mobilité relève d'un choix politique car une mobilité réussie apporte des compétences à un jeune Français lorsqu'il reviendra sur le marché national. En revanche, si elle n'est pas réussie, le jeune peut envisager de rester dans le pays qui l'a accueilli pour y faire tout autre chose.

La place des régions est essentielle. Le budget du nouveau programme Erasmus+ permettra, dans le cadre des partenariats stratégiques, d'engager des projets territoriaux entre les collectivités locales, les acteurs académiques et les entreprises.

Nous regrettons que la loi relative à la formation professionnelle ainsi que la loi relative à l'enseignement supérieur et à la recherche aient été adoptées en décalage au moment précis où nous lançons le programme Erasmus+. Mais ces deux textes existent désormais et nous allons nous y adapter.

S'agissant des doubles et triples diplômes, madameRohfritsch, la défense de la double diplômation est l'un des éléments du nouveau programme Erasmus+. En plus des programmes d'études Erasmus Mundus, réservés aux doctorants et aux mastériens, nous favoriserons désormais les masters conjoints. Les préoccupations de l'Union européenne rejoignent celles du Gouvernement et de tous les pays qui participent au Processus de Bologne.

L'espace de la mobilité dans l'enseignement supérieur en Europe s'est considérablement amélioré depuis 1999 et cela de manière très rapide. En revanche, pour la formation professionnelle, cet espace reste à créer.

Madame Ameline, la dimension transfrontalière n'existe pas en tant que telle dans le nouveau programme, mais, avec nos collègues des pays voisins, nous entendons promouvoir les mobilités transfrontalières afin de renforcer les liens entre collectivités voisines.

Monsieur Tetart, Erasmus a été un succès majeur, c'est pourquoi, avec le soutien des députés européens, nous avons obtenu une augmentation du budget en 2013. En revanche, la mobilité des formateurs est en panne, pour des raisons que vous avez citées, mais également du fait de la difficulté pour l'administration d'intégrer l'idée selon laquelle passer du temps à l'étranger est une plus-value positive. Nous proposons une formation particulière aux jeunes chefs d'établissement, inspecteurs d'académie et directeurs des services départementaux de l'Éducation nationale pour qu'ils comprennent à quel point il est utile de renforcer la motivation des enseignants, dont 10 à 15 % sont très intéressés par les projets Erasmus+.

La mobilité doit être également intégrée dans la formation des adultes. En tant que coordinateur de l'agenda européen pour l'éducation et la formation des adultes, j'ai beaucoup travaillé, avec l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme, pour concrétiser les projets du programme Comenius. Tant que l'agenda européen sera piloté par la France, ce programme restera une priorité politique, mais qu'adviendra-t-il ensuite ?

Actuellement nous axons nos efforts sur les jeunes. Si nous voulons que le système soit performant à long terme, dans un monde qui évolue extraordinairement vite, nous devrons renforcer les compétences formelles et informelles. La feuille de route que nous avons mise en place avec tous les acteurs de la formation des adultes permettra, je l'espère, de lutter avec efficacité contre l'illettrisme.

En ce qui concerne les moyens mis en oeuvre, 5 % du budget d'Erasmus+ sont consacrés à la formation des adultes et à la lutte contre l'illettrisme contre 25 % à la formation professionnelle, 50 % à l'enseignement supérieur, le reste étant affecté à la dimension internationale et à la mise en place de nouveaux outils d'accréditation.

Je suis naturellement à votre disposition pour vous faire parvenir une présentation plus détaillée du programme Erasmus+.

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