La Commission des affaires européenne mène depuis longtemps une réflexion sur la crise migratoire à laquelle est confrontée l'Europe. C'est dans cette perspective que quelques-uns d'entre nous se sont rendus en Grèce en juin dernier, pour y rencontrer les responsables gouvernementaux et les ONG d'un pays qui se sent parfois bien seul face à l'afflux de réfugiés.
Nous sommes donc heureux d'accueillir, pour nous aider dans notre réflexion, M. Daniel Agier, directeur de recherche à l'Institut de recherche pour le développement (IRD) et directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS), qui fut, pendant plusieurs années, membre du conseil d'administration de Médecins sans frontières, et qui travaille plus particulièrement sur la question des migrants et des réfugiés, ce qui en fait pour nous une « personne ressource » au sens le plus noble du terme.
Vous conjuguez, monsieur, l'expertise universitaire et l'expertise de terrain, ce qui doit permettre de nous éclairer sur la situation des personnes qui subissent la guerre ou la misère et qui frappent aux portes de l'Europe.
Notre commission insiste depuis longtemps sur la nécessité de prendre la mesure de la crise humanitaire et sur le fait, surtout, que l'Union européenne doit se donner les moyens de répondre au défi qu'elle représente. Des vies sont en jeu tous les jours, et pas seulement en Méditerranée. Les derniers chiffres, qui mériteraient d'être actualisés, font état de deux mille sept cents morts à nos frontières depuis le début de l'année, ce qui est insupportable.
Comme le dit la chanson, « le sang sèche vite en entrant dans l'histoire », et les images choc – au premier rang desquelles celle de ce petit garçon échoué sur une plage – sont vouées à tomber rapidement dans l'oubli, avec l'émotion qu'elles auront suscitée. Mais, au-delà de l'émotion, c'est à construire un projet européen solidaire que nous devons nous atteler. On ne peut en effet construire une Europe des grands marchés sans une Europe de la solidarité. Or cette crise migratoire révèle, hélas, les égoïsmes nationaux à l'oeuvre en Europe.
Dans ces conditions, que pouvez-vous nous dire qui nous permette d'interpeller et de convaincre les gouvernants – français et européens – de la manière la plus pertinente possible ? Quelles sont nos raisons d'espérer et comment pouvons-nous motiver efficacement notre combat ?