Intervention de David Skuli

Réunion du 12 mai 2016 à 9h00
Commission d'enquête relative aux moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier

David Skuli, directeur central de la police aux frontières, PAF :

La France compte 2 940 kilomètres de frontières terrestres. Aussi, comme vous le soulignez, le contrôle aux frontières est-il très difficile à assurer. Il existe en effet des phénomènes de contournement : on trouve par exemple 400 points de passages carrossables entre la Belgique et la France. Il faut savoir également que 1,7 million de travailleurs frontaliers se rendent chaque jour dans l'un ou l'autre de nos pays voisins. Je précise également tout l'intérêt de mettre en oeuvre des contrôles dynamiques sur les axes routiers sensibles.

Le principe de l'espace Schengen veut qu'on assure un contrôle fort aux frontières extérieures et que prévale à l'intérieur la libre-circulation telle que définie en 1995. L'application des accords de Schengen a entraîné le démantèlement de postes frontières. Il a fallu, après les attentats, les rétablir et réactiver des BCNJ avec certains pays.

Ensuite, la France est soumise à des dispositions européennes et ne saurait rétablir les points frontières en en faisant abstraction : il convient de suivre des procédures d'information, d'invoquer des motifs – en l'occurrence celui prévu par l'ancien article 23 du code des frontières Schengen. Cette opération est donc assez difficile à mener, sans compter que le contrôle aux frontières n'a de sens, pour peu qu'on le veuille efficace, que si s'établit un véritable échange d'informations entre les services. Les bases de données doivent ainsi être renseignées par l'ensemble des pays. La difficulté à contrôler ne peut du reste que s'accroître dès lors que la Syrie ou l'Irak ne semblent pas avoir fait figurer la totalité des passeports dérobés dans la base de données SLTD, d'Interpol.

En revanche, ce contrôle est efficace dans les aéroports, dans les gares frontières. Nous avons développé un programme de contrôle automatique avec les sas PARAFE et je rappelle que la Commission européenne projette de mettre en place, à partir de 2020, le Entry-Exit System où chaque ressortissant entrant et sortant de l'espace Schengen va faire l'objet d'un contrôle avec le décompte de la durée de son séjour. Il n'en est pas moins évident qu'il faut prendre en compte les effets de masse : à Roissy, on dénombre 1 600 mouvements d'avions par jour ; on recense 890 vols Schengen en France chaque jour. Toutes les compagnies aériennes, tous les gestionnaires d'aéroports réclameront, pour leur part, une amélioration de la fluidité du trafic – d'où le paradoxe consistant à assurer dans le même temps une sécurité optimale et la nécessaire fluidité que je viens d'évoquer.

En 2015, 15 000 personnes ont fait l'objet d'une mesure de non-admission. Depuis le 13 novembre, date à laquelle le contrôle aux frontières a été rétabli, ce chiffre atteint 17 363 personnes. Plus de 4 700 fichés S et plus de 7 000 individus faisant l'objet d'une fiche de recherche ont été détectés et les fichiers de police ont été interrogés 9 millions de fois. Même si l'étanchéité du contrôle aux frontières n'est pas parfaite, pour des raisons géographiques, ces chiffres en montrent tout de même la réalité.

J'ajouterai que le dispositif d'un contrôle aléatoire est peut-être plus pertinent qu'un dispositif de contrôle fixe.

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