Intervention de Christiane Charbonnier

Réunion du 2 octobre 2014 à 9h30
Commission d'enquête relative à l'impact sociétal, social, économique et financier de la réduction progressive du temps de travail

Christiane Charbonnier, directrice de la direction « Droit du travail » de l'UIMM :

Je vais y revenir. Quoi qu'il en soit, en Allemagne, on peut travailler plus qu'en France, mais surtout on a plus de flexibilité sur le volume de travail possible.

Maintenant, je reviens sur notre proposition.

Vous me demandez si nous souhaitons supprimer la durée légale. Oui, notre proposition est qu'il n'y ait plus de référence à une durée légale et plus de système d'heures supplémentaires. Pour autant, les entreprises seront bien obligées d'avoir une durée de référence, pour savoir à quel horaire elles engageront leurs salariés à temps plein – ce qui permet ensuite de positionner les postes à temps partiel. Les entreprises devront continuer à s'organiser.

Si l'on supprime la durée légale, on supprime toutes les règles complexes qui s'appliquent lorsque l'on veut la dépasser – ou d'ailleurs descendre en dessous. Effectivement, il n'y aura plus de contingent à négocier, ni de majoration pour heures supplémentaires. Et s'il n'y a plus de contingent, il n'y a plus de conditions de dépassement de ce contingent à respecter.

Restent toutes les durées maximales, qui sont des durées protectrices de la santé des salariés. On ne pourra pas dépasser 48 heures sur une semaine – et dans la métallurgie, 42 heures sur 12 semaines. Cela ne fait pas plus de 42 heures sur l'année, en moyenne.

Mais toutes les entreprises n'ont sûrement pas besoin de cette durée. Elles se situeront à la durée dont elles auront besoin. Or celle-ci varie énormément en fonction des entreprises, des secteurs d'activité de l'entreprise, et même des salariés de l'entreprise, dans la mesure où les postes ne sont pas identiques, et les horaires non plus.

Au début du XXe siècle, l'horaire était collectif, tous les salariés devaient venir à la même heure pour effectuer le même nombre d'heures de travail. Au fur et à mesure, les postes se sont individualisés et les horaires varient, dans les entreprises, en fonction des activités. Dans la métallurgie, les commerciaux ne travaillent pas autant que les salariés de la production, ceux qui travaillent en équipe n'ont pas les mêmes horaires que ceux qui travaillent de jour, etc.

Cela dit, la suppression de la durée légale que j'appelle de mes voeux répond à une nécessité de simplification. On peut introduire autant de souplesse que l'on veut, si on complique les textes, les entreprises ne peuvent pas s'approprier les systèmes et ne les utilisent pas.

Pour autant, pensez-vous que toutes les entreprises de la métallurgie iront jusqu'à 42 heures si l'on supprime la durée légale ? Non, ne serait-ce que parce que les négociations qui ont eu lieu à partir de 1998 et en 2000-2002 ont été difficiles et traumatisantes. Les entreprises n'ont pas du tout envie de remettre sur la table les aménagements auxquels elles avaient abouti. Voilà pourquoi la plupart d'entre elles, c'est-à-dire celles qui n'ont pas vraiment besoin de revoir leur temps de travail, ne changeront rien.

En revanche, celles qui ont vraiment besoin d'adapter leur volume horaire et qui aujourd'hui ne savent pas trop comment s'y prendre, compte tenu du fait qu'elles n'arrivent pas à s'approprier les aménagements existants, le feront si elles peuvent suivre des règles beaucoup plus simples.

Cette adaptation pourrait se faire à la baisse si elles subissent une diminution d'activité, et à la hausse si elles ont besoin de travailler davantage. Si elles ont des commandes supplémentaires qu'elles ne peuvent pas honorer parce que le coût de leur travail est trop élevé, elles pourraient éventuellement imaginer augmenter les horaires en négociant avec leurs salariés les conditions de cette augmentation, voire, si cela est nécessaire, les conditions de dépassement du volume horaire de référence auquel elles ont abouti.

Dans ce cadre-là, on pourrait envisager une baisse du coût du travail qui permettrait d'honorer des commandes qu'aujourd'hui on ne peut pas honorer et que l'on est obligé de laisser aux concurrents.

C'est ce qui se passe en Allemagne, où l'entreprise peut moduler les horaires en fonction de ses besoins. Si elle diminue ses horaires, elle diminue en même temps ses salaires. Cela dit, la plupart du temps, elle ne les diminue pas de façon exactement proportionnelle, mais en fonction de ses possibilités. À l'inverse, si elle a des commandes et donc des besoins de production supplémentaires, elle augmente ses horaires et ses salaires. Là encore, elle n'augmente pas forcément ses salaires en proportion des horaires. Elle adapte ses coûts en fonction des commandes, de la concurrence et de ce qui lui sera possible d'assumer.

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