Le budget de la mission « Culture » pour 2016 bénéficie d'un effort supplémentaire de 46 millions d'euros par rapport au triennal. Je relève toutefois qu'au vu de la répartition de cette enveloppe supplémentaire entre les trois programmes de la mission, le programme « Patrimoines » ne paraît pas, madame la ministre, constituer pour vous une priorité.
Le projet de loi de finances pour 2016 se caractérise, pour le programme « Patrimoines », par un changement de périmètre important, du fait de la budgétisation de la redevance d'archéologie préventive (RAP) à hauteur de 118 millions d'euros. Les crédits du programme sont portés en conséquence à 912,4 millions d'euros en autorisations d'engagement et 873,6 millions d'euros en crédits de paiement. Hors effets de périmètre, l'augmentation des crédits est légère – un peu plus de 2 millions d'euros en crédits de paiement – mais elle permettra, il faut le reconnaître, de revaloriser les subventions de la plupart des opérateurs, qui avaient fortement contribué à l'effort de redressement des comptes publics en début de législature.
Madame la ministre, je souhaite appeler ici votre attention sur plusieurs sujets.
L'an dernier, j'avais centré mes travaux sur la politique publique d'archéologie préventive et insisté sur ses difficultés de financement. La budgétisation de la redevance d'archéologie préventive était indispensable : on ne pouvait laisser perdurer la situation d'insécurité permanente dans laquelle étaient plongés tous les acteurs de l'archéologie préventive, et qui obligeait le ministère à se porter au secours de la trésorerie de l'Institut de recherches archéologiques préventive (INRAP) plusieurs fois par an. En contrepartie des efforts consentis par l'État en direction de l'INRAP – budgétisation de la RAP et augmentation de sa subvention –, j'estime qu'il est indispensable que l'INRAP mette en place une comptabilité analytique ; en particulier, cet organisme doit faire preuve d'une plus grande transparence sur la question de l'étanchéité entre les activités relevant de sa mission de service public et celles relevant du secteur concurrentiel. Je souhaite également insister sur la nécessité d'apurer la dette du Fonds national pour l'archéologie préventive (FNAP) dans un délai de deux ans, notamment par des dégels de crédits en fin de gestion. Cette dette s'élève à 40 millions d'euros environ. Qu'entend faire le Gouvernement à cet égard ?
Ma deuxième question portera sur le financement du schéma directeur de restauration et d'aménagement du Grand Palais. Le dossier ne semble pas avoir beaucoup progressé depuis l'avis favorable du Commissariat général à l'investissement l'an dernier. Or il y a urgence, compte tenu de l'état du bâtiment et des échéances à venir – je pense à la candidature de Paris aux Jeux olympiques de 2024 et à l'Exposition universelle de 2025. Pouvez-vous nous préciser l'état d'avancement de ce dossier, qui traîne beaucoup trop en longueur à mon goût ?
Enfin, dans le cadre de la préparation de mon rapport spécial, je me suis déplacé au château de Fontainebleau et au MuCEM.
L'établissement public du château de Fontainebleau nourrit l'ambitieux projet de porter à 700 000 le nombre de visiteurs du château et d'en faire une alternative, avec d'autres sites de Seine-et-Marne, au circuit touristique classique Louvre-Versailles, frappé d'embolie. Vous avez décidé d'accompagner ce projet en mettant en place un schéma directeur de rénovation. Je soutiens totalement les ambitions de cet établissement public, qui dispose d'un patrimoine remarquable qu'il faut mieux mettre en valeur. En revanche, je regrette que le schéma directeur fasse la part belle à la mise aux normes et aux travaux de sécurité, certes indispensables, mais ne dise pas grand-chose de la valorisation du patrimoine du château. Or il y a beaucoup de salles dont les décors doivent être rénovés ; en l'état actuel des choses, cela ne pourra se faire que par le biais du mécénat. Ne craignez-vous pas que ce décalage entre mise aux normes et rénovation des grands décors obère la capacité de l'établissement à atteindre ses objectifs de développement ?
Quant au MuCEM, c'est un très bel outil, une vraie réussite architecturale qui bénéficie d'un emplacement privilégié au coeur de la ville et face à la mer. J'ai pourtant une inquiétude quant au devenir de cet établissement ; la Cour des Comptes a également soulevé différentes questions dans son rapport annuel. Le musée est certes encore jeune, et il faut sans doute lui laisser du temps. Cependant, passé l'effet de curiosité des premiers mois, la fréquentation est en baisse sensible et j'ai le sentiment que le musée souffre d'un certain isolement par rapport à son environnement – la ville de Marseille principalement, mais plus largement toutes les collectivités territoriales. Les Marseillais – élus locaux et habitants – semblent avoir du mal à se l'approprier. Quel regard portez-vous sur l'avenir du MuCEM ?