Intervention de Élisabeth Guigou

Réunion du 10 septembre 2014 à 16h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉlisabeth Guigou, présidente :

Je remercie Estelle Grelier d'avoir accepté d'être rapporteure en remplacement de Pascale Boistard, nommée au Gouvernement. Je voudrais souligner après elle à quel point l'accord FATCA est important, car il s'inscrit dans un ensemble de textes internationaux et européens qui engagent une vraie lutte contre la fraude fiscale internationale.

Mais, au préalable, je vais répondre aux interrogations que Pierre Lellouche a émises ce matin. FATCA doit être distingué de la législation anticorruption FCPA (Foreign Corrupt Practice Act), qui date dans sa première version de 1977). L'accord conclu avec la France vise à appliquer sur une base bilatérale d'Etat à Etat, consentie et symétrique, le dispositif de transfert de données bancaires étrangères à l'administration fiscale, et non à appliquer la loi américaine FATCA de 2010 de manière unilatérale et extraterritoriale, ce qui était prévu à l'origine. Les mécanismes et les noms sont les mêmes, mais les fondements de la démarche bilatérale sont très différents.

C'est un accord fiscal dont la base juridique est la convention fiscale bilatérale de 1994 et qui ne vise qu'à assurer le transfert automatique de données bancaires entre administrations fiscales : l'administration américaine (IRS) recevra les données relatives au nationaux américains, car l'impôt sur le revenu dépend de la nationalité aux Etats-Unis, et le fisc français recevra les données relatives aux contribuables français. Les données bancaires sont les suivantes : comptes, soldes, revenus financiers. Elles sont de nature fiscale.

L'échange automatique d'informations est un pas essentiel, au moins dans la lutte contre la fraude des particuliers, car il permettra de traiter le grand nombre et épargnera aux administrations l'obligation de procéder à des demandes d'informations au cas par cas.

Le FATCA est, nous le savons, une initiative américaine. Mais l'idée de l'échange automatique a aussi été portée par la France et en particulier par notre Assemblée. Elle figurait ainsi dans un rapport que j'ai présenté en 2009 avec Daniel Garrigue à la commission des affaires européennes et dans la résolution européenne adoptée consécutivement. Celle-ci recommandait en particulier que l'échange automatique devienne la « norme internationale de transparence ».

Nous avons également progressé dans le cadre international. L'OCDE élabore actuellement un standard international pour inscrire l'échange automatique dans toutes les conventions fiscales. Et, dans l'Union européenne, l'échange automatique a été prévu sur les revenus des produits de taux par la directive dite « épargne » de 2003, qui a été révisée cette année pour la rendre plus efficace, tandis que la directive de 2011 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal a étendu cet échange, à compter du 1er janvier 2015, aux revenus professionnels, aux jetons de présence, aux revenus fonciers et aux pensions.

Il nous reste cependant à étendre cet échange aux dividendes et plus-values, mais, sur ce point, la Commission européenne a proposé l'an dernier une réforme de la directive de 2011 pour les couvrir aussi, à la suite d'une demande commune exprimée le 9 avril 2013 par les cinq principaux Etats membres, dont naturellement la France. Je souhaiterais savoir où nous en sommes précisément de ce processus d'adaptation du droit européen.

Je m'interroge aussi sur la façon dont ce droit va s'articuler avec les accords FATCA passés par plusieurs Etats membres avec les États-Unis mais pas tous, sachant qu'une clause de la directive de 2011 a pour effet qu'un Etat membre passant un accord FATCA avec les États-Unis est en principe tenu d'offrir les mêmes facilités d'accès aux informations à ses partenaires communautaires.

Ma dernière question porte sur l'état d'avancement des autres grands chantiers de la lutte contre la fraude fiscale internationale. Il s'agit notamment de la manière d'imposer une plus grande transparence sur les propriétaires ou ayants-droits réels des actifs gérés par des fondations, des fiducies ou autres instruments opaques. Il s'agit aussi et surtout de la lutte contre les pratiques des grandes entreprises qui amoindrissent leur base d'imposition par des montages complexes. L'échange automatique est principalement un instrument de lutte contre la fraude des particuliers ou des petites entreprises. Les grandes entreprises utilisent des procédés plus sophistiqués. Nous devons aussi, parallèlement, avancer rapidement sur ce volet.

Si l'accord qui nous est soumis ne règle pas totalement les problèmes de la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale internationales, il constitue au moins un progrès.

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