Intervention de Michel Pépin

Réunion du 18 septembre 2014 à 14h30
Commission d'enquête relative à l'impact sociétal, social, économique et financier de la réduction progressive du temps de travail

Michel Pépin, consultant spécialiste du travail, membre du cabinet ESSOR consultants :

Les lois Aubry ont donné lieu à plusieurs études d'impact. L'une d'elles, commandée en 2003 par le Commissariat général au plan, a été rédigée par la commission présidée par Henri Rouilleault, directeur de l'ANACT. Elle a conclu que la loi sur les 35 heures avait créé 300 000 à 400 00 emplois. Ce chiffre, bien entendu sujet à caution, est élevé, bien qu'inférieur au résultat arithmétique qu'aurait produit une règle de trois.

Les lois Aubry ont cherché à rendre la RTT économiquement neutre et à limiter son coût sur l'emploi grâce à trois financements.

Le premier, purement économique, regroupait l'annualisation du temps de travail, les différentes formes de flexibilité et le développement des capacités de production, facteurs qui apportaient un avantage compétitif à l'entreprise.

Le deuxième financement était issu des aides publiques, qui anticipaient les effets positifs de l'augmentation de l'emploi sur les cotisations sociales et l'indemnisation du chômage. L'État redistribuait à l'avance, sous forme d'aides aux entreprises, les gains qui résulteraient des RTT pour les finances publiques.

Le troisième financement provenait de la négociation d'une modération salariale, qui se traduisait non par une réduction des rémunérations, mais par leur gel pendant deux ou trois ans.

Le dispositif, qui visait à financer des créations d'emploi – dans une proportion que la première loi Aubry évaluait à 6 % des effectifs – a été plus probant dans les grandes entreprises que dans les petites, parce qu'il est plus facile de réorganiser un effectif important et qu'on trouve plus de ressources méthodologiques et de compétences internes à partir d'un certain niveau de management. Or il fallait que les entreprises se réorganisent pour appliquer la RTT de manière satisfaisante sur le plan économique.

La question de l'équité entre petites et grandes entreprises doit être posée, ainsi que celle de l'égalité entre les salariés. La loi Aubry s'est inscrite dans une logique privilégiant la création d'emploi, mais la complexification et la diversification des conditions de travail, qu'elle a entraînées, ont fragmenté le corps social. Une enquête de la DARES relative aux effets de la RTT sur les modes de vie montre que, si les femmes cadres sont extrêmement satisfaites de l'organisation de leur temps de travail, celles qui sont moins qualifiées, notamment celles qui travaillent pour les sociétés de nettoyage, sont plus réservées.

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