Intervention de László Andor

Réunion du 5 février 2014 à 17h00
Commission des affaires européennes

László Andor, commissaire européen chargé de l'emploi, des affaires sociales et de l'inclusion :

Je ne ressens pas la solitude que vous évoquez. La dimension sociale est une préoccupation commune à tous les commissaires dont vous connaissez les convictions politiques. M. Barnier, par exemple, y est particulièrement attentif. Nous avons ainsi organisé à Strasbourg une conférence sur l'économie sociale pour réfléchir aux moyens de la développer dans un environnement mieux réglementé et avec une meilleure utilisation des ressources financières de l'Union européenne. Cet exemple illustre les nombreuses initiatives prises par la Commission, dont les effets ne sont pas toujours immédiats, pour assurer la cohésion sociale par le biais de moyens innovants.

Il est vrai que, depuis quatre ans, une question domine : comment faire face aux conséquences de la crise de la zone euro et comment sortir de la crise sociale ? Nous devons bâtir une union monétaire plus résistante, sur le plan économique, financier et social. Afin de mener à bien cette tâche d'envergure, nous devons repenser l'architecture de l'Union.

Nous avons progressé dans certains domaines, comme l'union bancaire, mais il reste à approfondir notre réflexion et à poursuivre la mise en oeuvre des mesures telles que la « Garantie pour la jeunesse ». Certaines propositions sont encore au stade embryonnaire parce qu'elles soulèvent des questions complexes ou rencontrent des obstacles juridiques. La Commission comme les États membres doivent prendre en compte les contraintes économiques et juridiques du moment.

Face à la hausse du chômage, et particulièrement de celui des jeunes, la Commission a proposé de modifier la programmation des fonds alloués dans les pays dont la situation était la plus dégradée. Huit États membres ont été identifiés et 10 millions d'euros sur les fonds structurels ont été dégagés pour aider les jeunes. Pour la première fois, la Commission a fait le tour des capitales pour mettre en place ce projet.

La Commission a ensuite adopté différentes mesures dont la « Garantie pour la jeunesse », destinée à aider les jeunes de moins de 25 ans à trouver du travail ou une formation. Son extension à des personnes plus âgées a fait débat au Parlement européen et au sein des États membres. À titre personnel, il me semble préférable de concentrer l'action sur les moins de 25 ans sans pour autant interdire aux États d'être plus ambitieux. En effet, la principale difficulté réside dans la transition entre l'école et la vie professionnelle. De nombreux jeunes se perdent, quittent l'enseignement sans avoir eu le moindre contact avec le marché du travail. Ce déficit d'éducation est porteur d'un risque social et, dans certains pays, c'est un facteur d'instabilité politique. Le mouvement des indignés en Espagne ou les émeutes de 2011 au Royaume-Uni témoignent d'un mécontentement qui s'exprime aussi dans des pays dont la situation économique est meilleure.

Face à la nécessité d'inventer un nouveau cadre, la « Garantie pour la jeunesse » et la coopération qui l'accompagne semblent une idée robuste. Mes services aident les États membres à améliorer les plans mis en place à ce titre. Le plan français sera ainsi probablement perfectionné dans les prochaines semaines.

La Commission a également pris des initiatives concernant l'apprentissage, concept pour le moins protéiforme en Europe. Nous identifions les modèles les plus performants – par exemple, la formation en alternance dispensée en Allemagne, en Autriche et en Scandinavie – et nous favorisons les échanges entre ces pays et les États les plus en difficulté. La Commission encourage les partenaires sociaux et les entreprises à adhérer à l'Alliance européenne pour l'apprentissage. Certaines entreprises transnationales ont déjà annoncé des plans d'apprentissage massifs. Les Américains s'y intéressent aussi. Notre objectif est d'installer une tradition de l'apprentissage au sein des grandes entreprises, ce dernier étant aussi un moyen pour elles de contribuer aux besoins de formation. Ces entreprises peuvent trouver des avantages à proposer des contrats d'apprentissage.

Quant à la mobilité, elle constitue un élément important mais elle ne suffira pas à elle seule à réduire les déséquilibres au sein de la zone euro. Ce serait une illusion de le croire. Elle ne saurait permettre d'offrir un emploi à chacun dans une Union européenne qui compte plus de 26 millions de chômeurs pour seulement 2 millions de postes vacants.

La Commission a décidé récemment d'améliorer EURES, le réseau européen des services de l'emploi. Le portail européen sur la mobilité de l'emploi offre 1 million d'emplois et tente de faire coïncider la demande avec ces postes vacants. Malgré la totale liberté de circulation, la mobilité est en effet entravée par le manque de transparence du marché du travail européen, dû à la diversité linguistique et à l'imparfaite reconnaissance des qualifications et des diplômes. Même si la mobilité s'accroît, ce sont aujourd'hui moins de 3 % des travailleurs européens qui travaillent et vivent dans un autre pays que le leur. Il ne faut pas l'oublier.

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