Je tiens à dire au préalable que les statistiques nous invitent à la prudence dans la mesure où la définition de l'absentéisme diffère considérablement selon les études, le champ d'investigation, les producteurs de données et la période de collecte des informations.
Je préciserai ensuite que les derniers chiffres dont nous disposons pour la fonction publique de l'État sont ceux de 2003, année de la dernière enquête, qui a établi la durée d'arrêt des fonctionnaires pour raison médicale à 13 jours en moyenne. En conséquence, les comparaisons avec les autres fonctions publiques et le secteur privé opérées par la presse depuis cette date sont dénuées, pour nous, de toute valeur scientifique. Une mise à jour est actuellement opérée par nos services depuis quelques semaines, en lien avec l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) et les autres ministères, et de nouvelles données seront disponibles en décembre 2013. L'échéance est tardive : c'est pourquoi nous avons eu le souci de procéder au préalable sur la base d'un échantillon.
Une enquête récente, publiée par la DARES du ministère chargé du travail, sur les arrêts pour raison de santé des salariés du secteur privé et du secteur public montre un taux d'absentéisme de 3,7 % pour les agents titulaires de la fonction publique ou bénéficiaires d'un contrat à durée indéterminée (CDI) avec plus d'un an d'ancienneté, et de 2,6 % pour les agents en contrat à durée déterminée (CDD) ou en CDI récent. Ces résultats sont somme toute assez logiques.
Notre expérimentation du contrôle des arrêts maladie a été réalisée sur la base de 132 000 arrêts maladie saisis dans cinq départements – Ille-et-Vilaine, Rhône, Alpes-Maritimes, Bas-Rhin, Puy-de-Dôme – et dans les services de l'administration centrale du ministère de l'économie, échantillon représentatif de 7 % à 8 % du total des fonctionnaires de l'État. Sur ces 132 000 arrêts, les contrôles ont porté sur ceux de plus de 45 jours et sur les arrêts itératifs au cours des douze derniers mois. Comme pour la fonction publique hospitalière, nous avons connu des difficultés au démarrage, pour des raisons administratives et, il faut bien le dire, à cause de la mauvaise volonté de certains services de l'État, mais aussi du fait que la majeure partie des arrêts était déjà échue au moment du contrôle. Ainsi, pour les deux années 2011 et 2012, sur 8 500 arrêts – soit un taux de contrôle de 7 % en tenant compte des arrêts échus –, 5,7 % n'étaient pas médicalement justifiés et ont entraîné, pour l'un d'entre eux, un arrêt de la rémunération et, pour deux ou trois autres, une baisse du traitement de 50 %.
Nous souhaitons étendre cette expérimentation, qui a démarré trop tardivement, pour être en mesure de rendre un rapport définitif en 2014. Nous envisageons même de généraliser ce système à terme. À cet égard, le comité de pilotage que j'anime avec le directeur de la sécurité sociale et la CNAMTS nous a amenés à mettre en place des dispositifs permettant des remontées d'informations plus rapides et des contrôles plus exhaustifs.
Nous suivons, d'un point de vue budgétaire, la mise en place du jour de carence, une économie de 200 millions d'euros nous a été imposée par le ministre du budget dans le cadre de la loi de finances pour 2012. Pour l'année 2012, les ministères ont pu récupérer environ la moitié de cette somme seulement, la mesure ayant été mise en place tardivement, entre mars et juillet 2012 selon les ministères, et l'effet rétroactif n'ayant pas été appliqué avec la même diligence pour éviter un effet trop brutal sur le traitement des agents. Cela semble se traduire non par une diminution des arrêts de courte durée, mais par la transformation par les agents de leur jour de carence en jour de réduction de temps de travail (RTT) afin de ne pas subir un prélèvement sur leur traitement. D'après nos calculs menés sur la base d'une semaine de référence de l'enquête Emploi de l'INSEE, le nombre d'arrêts courts est passé, entre 2011 et 2012, de 1,2 % à 1 % dans la fonction publique d'État. On ne peut donc pas affirmer, à ce stade, que l'instauration du jour de carence ait eu un impact sur l'absentéisme des fonctionnaires d'État, contrairement, semble-t-il, à ceux de la fonction publique hospitalière. Demeure la différence de traitement entre salariés du privé et fonctionnaires pour lesquels le jour de carence n'est pas pris en charge par les mutuelles, ce qui représenterait 1 milliard d'euros supplémentaires de cotisations pour les agents.