Intervention de Jean-Yves le Drian

Réunion du 30 septembre 2014 à 16h30
Commission des affaires étrangères

Jean-Yves le Drian, ministre de la défense, sur la situation en Irak :

Sans doute pas en grande quantité : seule une partie des matériels est déjà disponible ; les autres devront être fabriqués.

L'envoi de troupes au sol, monsieur Guibal, n'est pas dans les objectifs de la coalition, comme l'ont réaffirmé ses membres en se réunissant en marge du sommet de l'OTAN. Notre mission est d'aider les forces locales dans la reconquête du territoire. Nous ne sommes au demeurant pas responsables, cela va sans dire, de la situation actuelle : elle tient à la mauvaise gestion des suites de l'intervention américaine, à commencer par la liquidation de l'armée irakienne. L'ancien Premier ministre, M. al-Maliki, avait de surcroît fait preuve de sectarisme en excluant du pouvoir certaines composantes de la nation irakienne. Le but, à ce stade, est de former les forces du pays, en associant toutes les composantes ethniques et religieuses, afin de les épauler dans une reconquête qui, à terme, passe par les batailles de Mossoul et de Falloujah. Cela prendra sans doute plusieurs mois ; mais, je le répète, la coalition s'est donné les moyens d'atteindre ses objectifs, avec des frappes occidentales en Irak et arabes en Syrie.

La Turquie a pris la décision d'intégrer la coalition et en tire les conclusions qui s'imposent. Quant au Qatar, sa position diplomatique a connu une inflexion avec l'arrivée au pouvoir du nouvel émir. Ce pays est partie prenante de la coalition, et a mis plusieurs avions à sa disposition.

Les capacités d'action de la coalition se trouveront bien entendu renforcées par la participation de la Turquie, même s'il faut attendre le vote de son Parlement. Les relations entre le président Erdoğan et les Kurdes de son pays ont connu des hauts et des bas ; au reste, la position des Kurdes de Syrie n'est pas non plus sans conséquences. Ceux de Kobané, monsieur Charasse, ont reçu le soutien aérien de forces américaines et arabes, même si beaucoup d'entre eux ont dû se réfugier en Turquie.

Le Kurdistan irakien, dont le Gouvernement régional est présidé par M. Barzani, s'est acquis une large autonomie ; lors de notre déplacement à Erbil, le 12 septembre, il nous a en tout cas déclaré ne pas solliciter l'indépendance. Les Kurdes se divisent en quatre formations ayant chacune des aspirations propres, et deux partis se partagent le contrôle du Kurdistan politiquement structuré, le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) et l'Union patriotique du Kurdistan (UPK).

Je suis convaincu, monsieur Vauzelle et madame Fort, du rôle crucial de l'arme de la communication, qui relève moins de ma compétence propre que de celle du Gouvernement tout entier. Nous devons être en mesure de répondre à la multiplication des provocations sur internet. Cette guerre, les communautés doivent aussi y répondre, et je me réjouis, de ce point de vue, des manifestations de la communauté musulmane après l'assassinat de notre compatriote en Algérie.

La sécurité, à l'intérieur comme à l'extérieur, ne se marchande pas : il faut effectivement le dire à l'ensemble de nos compatriotes, monsieur Vauzelle. La cohésion nationale est la meilleure réponse ; elle implique un travail de proximité qui n'est pas de la responsabilité directe du ministre de la défense, même si je reste préoccupé par les possibles jonctions entre les conflits. Il ne vous a pas échappé, par exemple, que la proclamation du Califat par Abou Bakr al-Baghdadi a été suivie par celle de Boko Haram dans le Nord du Nigéria et le Nord du Cameroun, frontalier avec la Centrafrique, où un vide sécuritaire serait dès lors gros de tous les risques possibles, et ce jusqu'à la Corne de l'Afrique, qui abrite les shebab. Il est donc impératif de stopper la progression de Daech en Irak et d'épauler, grâce à notre appui aérien, le gouvernement irakien dans la reconquête du territoire.

Quant au surcoût, il reste aujourd'hui limité au matériel de frappe, compte tenu du prépositionnement de nos avions de chasse à Al-Dhafra.

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