C'est exact, mais cette extrême faiblesse persistante nous a conduits à nous interroger sur des critères très rigides de sélection des risques.
Pour 2015, trois chantiers demeurent dont les niveaux de priorité diffèrent. Il y a d'une part le projet de titrisation des créances des petites et moyennes entreprises (PME), destiné à réorienter pour partie les en-cours d'assurance-vie vers le développement économique. Le sujet suscite la controverse au sein même de la commission des finances de l'Assemblée nationale, où l'on garde en mémoire le rôle déclencheur joué par la titrisation des créances immobilières dans la crise de 2008. S'il faut se garder des excès, il n'y a pas lieu de décréter par principe que la titrisation serait par nature source de contentieux inéluctables : tout dépend des garanties imposées. Le taux d'épargne des Français est exceptionnellement élevé et l'en-cours actuel de l'assurance-vie en France est de 1 500 milliards d'euros. L'un des problèmes majeurs auxquels nous nous trouvons confrontés est de parvenir à rediriger efficacement une part de cette épargne vers l'investissement dans l'industrie ou les services. Je comprends les raisons des réticences qui s'expriment mais ce serait selon moi une erreur d'écarter l'hypothèse par principe au lieu d'examiner attentivement les conditions d'une titrisation qui permettrait aux compagnies d'assurance-vie d'investir dans les PME.
Autre chantier d'importance : le développement d'une offre de crédit export. Les banques commerciales françaises n'ayant plus eu accès au dollar – sans que je puisse dire de façon certaine qu'il s'est agi d'une manoeuvre délibérée de la City londonienne et de Wall Street –, se sont trouvées contraintes de réduire considérablement leur service export, sinon de le supprimer. Il en résulte que la France, qui aspire à exporter, n'a pas de dispositif de financement de ses exportations. Bpifrance offrira donc un crédit acheteur en prêteur unique pour les tickets compris entre 5 et 25 millions d'euros et en co-financement pour les tickets compris entre 15 et 75 millions d'euros.
La Société de financement local (SFIL), qui a repris le portefeuille de créances de Dexia, s'occupera des plus gros tickets. À l'origine, la SFIL était chargée du financement des collectivités locales mais en ce domaine la surabondance a succédé à la pénurie. D'ailleurs, le taux de rémunération du Livret A et du Livret de développement durable a pour conséquence que le fonds d'épargne de la CDC, dont l'en-cours est de quelque 350 milliards d'euros, n'est plus particulièrement compétitif au regard des taux offerts par la Banque européenne d'investissement ou même par certaines banques commerciales – au point que la Banque postale va racheter les créances des opérateurs sociaux. Aujourd'hui, le taux des bons du Trésor à 10 ans est de quelque 0,60 ; il s'établissait à 2,6 en février 2014. Le Bund allemand à 10 ans s'établit à 0,30 et, pour les durées inférieures, le taux d'emprunt est négatif. J'ajoute que l'écart – spread – entre le taux du bon du Trésor français et celui du Bund allemand s'est réduit de 20 points de base. En 2014, la CDC a émis pour 350 millions d'euros d'obligations dites Samuraï bonds au Japon, à un taux négatif, une première depuis la création de la Caisse en 1816. On ne peut manquer de s'interroger sur la chute continue des taux et sur son incidence.