Intervention de Jean-Marc Falcone

Réunion du 21 mars 2016 à 14h00
Commission d'enquête relative aux moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier

Jean-Marc Falcone, directeur général de la police nationale :

Mesdames et messieurs les députés, je serai très bref. Je souhaite simplement, par courtoisie pour la Commission, repositionner la Direction générale de la police nationale (DGPN) parmi l'ensemble des forces de sécurité intérieure, puis vous exposer très rapidement l'action de cette direction en réponse aux attentats que nous avons connus en janvier et en novembre. Ensuite, je présenterai de manière schématique les dispositions que j'ai pu prendre à mon niveau, en qualité de directeur général, après les retours d'expérience effectués avec mes services à la suite des attentats.

La Direction générale de la police nationale est composée de 145 000 agents, et s'appuie sur des directions de police active.

Parmi elles, la Direction centrale de la sécurité publique (DCSP) est une direction généraliste. Elle comprend le Service central du renseignement territorial (SCRT).

Nous avons également des directions dites spécialisées, à compétence nationale, telles que la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ) ; la Direction centrale de la police aux frontières ; la Direction centrale des compagnies républicaines de sécurité, qui ont aussi compétence nationale ; le Service de recherche, assistance, intervention, dissuasion – le RAID – qui est directement rattaché au directeur général de la police nationale ; et le service de la protection qui est chargé de protéger les personnalités susceptibles d'être menacées.

L'engagement de cette direction générale a été réel, bien que les attentats ne se soient pas déroulés dans sa zone de compétence, le préfet de police de Paris ayant une compétence spécifique. Nous parlons de compétence de plein exercice. Néanmoins, les directions que je viens de citer ont apporté leur contribution aux opérations menées lors des attentats. Ainsi, le 7 janvier, les services de police situés dans les départements du Val-d'Oise, de l'Oise, de la Seine-et-Marne et de la Marne ont été mobilisés pour la recherche des frères Kouachi : près de 700 agents ont apporté leur assistance à la recherche.

Le 13 novembre, vers 22 h 40, j'ai fait converger sur Paris 215 policiers des départements de la grande couronne – Seine-et-Marne, Yvelines, Essonne et Val-d'Oise – pour prêter renfort au préfet de police, et en particulier à la Direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne (DSPAP).

La Direction centrale de la police judiciaire a aussi été très largement mobilisée, avec le « dispositif attentat », sur lequel je pourrai revenir si vous le souhaitez. Au plus fort des attentats du 13 novembre, ce ne sont pas moins de 750 enquêteurs issus de cette direction qui ont participé aux recherches, aux constatations et aux opérations de police technique et scientifique sur Paris.

La Direction centrale de la police aux frontières a également été mise à contribution ; près de 5 000 fonctionnaires de cette direction ont été déployées sur les frontières lorsque l'état d'urgence a été décrété.

Et bien évidemment, le personnel du RAID a contribué, par son action dans le cadre de ses missions, aux interventions faisant suite aux attentats de janvier et de novembre, en collaboration notamment avec la Brigade de recherche et d'intervention de la préfecture de police de Paris (BRI-PP). Ces fonctionnaires du RAID participent plusieurs fois par semaine aux opérations de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) ou de la sous-direction antiterroriste (SDAT) lorsque ces services interpellent des personnes radicalisées ou susceptibles de passer à l'acte dans un cadre terroriste.

Depuis les attentats de janvier, j'ai repositionné le service central du renseignement territorial sur la prévention du terrorisme, en faisant suivre un certain nombre de personnes dites radicalisées. Actuellement, près de 3 000 sont suivies par ce service.

J'ai également créé un état-major auprès de moi, car nous nous sommes aperçus que la Direction générale de la police nationale n'était plus dans la même position qu'au cours des décennies passées. Elle doit maintenant jouer un rôle beaucoup plus opérationnel pour gérer au quotidien les états-majors des différentes directions que je viens de citer. J'ai donc créé un état-major qui intègre un centre d'information de la police nationale qui regroupera, dans les prochaines semaines, les dispositifs d'information de toutes les directions, qui étaient jusqu'à présent éclatés. J'aurai donc auprès de moi un état-major pour commander l'ensemble des directions centrales de la police, et un centre d'information qui va regrouper les centres d'information des services et des directions que je viens de citer.

Au sein de la Direction centrale de la police judiciaire, nous avons fait monter en puissance la sous-direction de la lutte contre la cybercriminalité avec le programme PHAROS (plateforme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements) et les enquêtes liées à la cybercriminalité. Le dispositif attentat a été mis en oeuvre au mois de novembre ; et les effectifs de la sous-direction anti-terroriste (SDAT) ont sensiblement augmenté, ce qui était nécessaire au vu du nombre d'enquêtes qu'elle doit suivre.

Les sept GIPN métropolitains ont été transformés en antennes RAID, sous le commandement unique et centralisé du RAID central à Bièvres, ce qui permet de donner des instructions et d'avoir à disposition les 270 opérateurs qui composent les antennes et le service central.

Enfin, j'ai fait monter en puissance l'unité de coordination de la lutte antiterroriste (UCLAT) avec la cellule d'appel radicalisation et le fichier FSPRT, qui répertorie l'ensemble des personnes signalées comme pouvant être radicalisées.

Au plan tactique, nous avons décidé d'adapter les dispositifs de formation initiale et continue des policiers, puisque nous nous sommes aperçus que la menace avait changé de nature, y compris dans ses formes, de plus en plus violentes et rédhibitoires. Nous avons fait en sorte de former l'ensemble des brigades et des fonctionnaires.

Nous sommes en train de mettre la dernière main au schéma national d'intervention, que le ministre de l'Intérieur pourra arrêter d'ici une semaine ou deux. Il en avait fait la demande après les attentats de novembre, afin de pouvoir concentrer et articuler l'ensemble des services d'intervention.

Nous avons également diffusé une doctrine à destination des primo-intervenants, car ce seront, par définition, les premiers à être exposés à des actes de terrorisme, et à un terrorisme de plus en plus violent et tueur. J'ai donc reconstruit une doctrine avec des « fiches réflexes » que j'ai fait distribuer avant Noël.

Il a aussi fallu organiser la police judiciaire pour prendre en compte la décision du parquet antiterroriste de saisir systématiquement la DCPJ-SDAT pour qu'elle coordonne les enquêtes en cas d'attentats sur le territoire.

Nous continuons de procéder aux différents recrutements décidés par le Gouvernement, pour la plupart dans le cadre de plans pluriannuels : le plan antiterroriste, le plan immigration et le pacte de sécurité du Président de la République. Nous prévoyons aussi l'organisation exceptionnelle de concours de recrutement de gardiens de la paix, puisque nous faisons entrer cette année 4 600 gardiens de la paix dans les écoles, tandis qu'autant en sortiront en fin d'année ainsi que l'an prochain. Il a donc fallu que mon administration réponde le plus vite possible, avec des moyens adaptés, à ces demandes tout en garantissant une formation initiale soutenue et la plus complète possible, afin de bénéficier de ces renforts dont nous avons bien besoin.

S'agissant des moyens, le plan BAC entre en vigueur. Les brigades anti-criminalité, composées de gens formés dont l'expertise est plus affirmée que celle des premiers intervenants ont en effet une capacité d'intervention. Elles peuvent, sur des tueries de masse ou des actes terroristes, stabiliser et fixer les terroristes. Nous l'avons vu à Paris lors de l'intervention d'un commissaire de la BAC.

Voilà, de manière schématique, la façon dont les différents services ont pu intervenir, et ce que j'ai pu développer.

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