Intervention de Général d'armée Denis Favier

Réunion du 21 mars 2016 à 14h00
Commission d'enquête relative aux moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier

Général d'armée Denis Favier, directeur général de la gendarmerie nationale :

Je me suis exprimé à plusieurs reprises sur ce sujet très sensible. En tant que patron de la gendarmerie, je pense que nous faisons face de manière satisfaisante aux problématiques générales d'insécurité : les cambriolages ont régressé en 2015 ; notre engagement est fort ; nous faisons également face à de lourdes séquences de maintien de l'ordre.

Cependant, la nature de la menace que nous rencontrons nous conduit à optimiser les moyens nationaux et, dans ce contexte, le recours aux moyens militaires est intéressant. Toutefois, je ne défends pas l'idée qu'il existerait une rupture stratégique. Afficher ce constat reviendrait en effet à admettre que Daech est parvenu à conquérir une partie du territoire national. Ce n'est pas le cas.

Je reconnais volontiers un durcissement de la menace, mais je pense que nous pouvons gérer la situation avec les moyens conventionnels et juridiques dont nous disposons. L'état d'urgence nous permet de faire face à la plupart des situations. De mon point de vue, l'emploi des forces armées sur le territoire national doit être guidé par le principe de subsidiarité, ce qui n'est pas un terme péjoratif dans ma bouche, et reposer sur une étroite collaboration avec les forces de sécurité du ministère de l'Intérieur dans une logique de « menant-concourant ».

Je reste aujourd'hui persuadé que le ministère de l'Intérieur possède l'ensemble des expertises techniques pour faire face aux nouvelles menaces. En outre, les gendarmes et policiers sont capables de passer très rapidement d'une posture de sécurité publique à une posture d'intervention, avec le souci constant de la proportionnalité des moyens et de la force engagés. Ce principe de réversibilité fait partie de nos fondamentaux et constitue l'un des piliers de la formation dispensée dans l'ensemble de nos écoles.

Il faut à mon sens développer l'emploi des forces armées dans une logique de contrôle des flux, comme nous le faisons en Guyane pour lutter contre l'orpaillage illégal, dans le cadre de l'opération Harpie. Les armées et la gendarmerie sont engagées dans une même mission, avec un groupe de combat d'infanterie et deux officiers de police judiciaires (OPJ). Cet alliage de compétences a du sens. Les règles de l'état de droit sont respectées : le gendarme fait son travail de contrôle, de police administrative et de police judiciaire, mais en ayant le soutien et, si nécessaire, l'appui feu d'un groupe de combat. Ce dispositif Harpie a fait ses preuves sur le terrain et mériterait d'être transposé sur le territoire national, dans une logique de contrôle des flux qui permette d'entraver la liberté de circulation des terroristes et des délinquants tout en rassurant nos concitoyens.

Pour être complet dans ma réponse, monsieur le député, j'indique que, dans le courant du mois d'avril, à l'initiative de l'armée de terre et de la gendarmerie, nous allons engager une expérimentation de deux semaines dans le département de l'Isère. Nous allons tester cet engagement conjoint des deux institutions, dans une logique de contrôle des flux dans un département exposé à une délinquance très active, et en tirer ensuite des conséquences.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion