Intervention de Jean-Luc Vialla

Réunion du 17 décembre 2014 à 17h15
Commission d'enquête relative aux tarifs de l'électricité

Jean-Luc Vialla, président de section :

Parmi les objectifs prioritaires des certificats d'économie d'énergie figure la lutte contre la précarité énergétique, sujet dont il est inutile de souligner ici l'importance : plus de 3 millions de nos concitoyens sont concernés. Cet objectif relève essentiellement du programme « Habiter mieux », géré par l'Agence nationale d'amélioration de l'habitat (ANAH), qui présente la particularité d'être financé par les trois obligés les plus importants : EDF, GDF Suez et Total. Ce dispositif est extrêmement efficace, puisque les gains énergétiques ont été évalués en moyenne à 38 % pour chaque intervention. En revanche, sa gestion administrative est si lourde que le rythme d'exécution est très lent : au début de 2013, un quart seulement des 250 millions d'euros de crédits étaient consommés. Depuis, le dispositif a été nettement amélioré par l'ANAH et le rythme de consommation est plus satisfaisant.

Cependant, nous avons fait deux propositions afin de renforcer le caractère prioritaire de la lutte contre la précarité énergétique : d'une part, mettre fin au monopole, que rien ne justifie, des trois grands obligés et, d'autre part, bonifier les certificats d'économie d'énergie, comme cela se fait dans un certain nombre de programmes, ou, en dernier recours – car le système est déjà complexe et rigide –, instituer un quota.

Nous avons également examiné l'ensemble de la gouvernance du dispositif des certificats d'économie d'énergie et de leur gestion matérielle. S'agissant de la gouvernance d'ensemble, le système a toujours été géré par la Direction générale de l'énergie et du climat, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) et l'Association technique énergie environnement (ATEE), ce qui laisse de côté non seulement l'ensemble des obligés, mais aussi les acteurs du bâtiment et des travaux publics, qui sont directement concernés. Nous avons donc proposé la création d'un comité de suivi qui, sans être chargé de la gestion du dispositif, permettrait à l'ensemble des acteurs de s'exprimer.

Quant à la gestion matérielle des certificats, confiée au pôle national des certificats d'économie d'énergie, intégré à la DGEC, elle était d'une lourdeur exceptionnelle, en raison de la complexité de la réglementation. Les personnels du pôle national étaient ainsi obligés de réaliser un traitement exhaustif de toutes les demandes, de sorte qu'ils avaient accumulé un retard d'un an dans l'attribution des certificats. Nous avons donc proposé des simplifications à très court terme et, surtout, pour la troisième période, un changement complet du dispositif en passant d'un contrôle exhaustif a priori à un système de contrôle a posteriori par échantillonnage, déclaratif et dématérialisé.

Nous avons par ailleurs identifié deux champs de développement potentiel des certificats d'économie d'énergie très significatifs : d'une part, les collectivités territoriales, qui ne représentent que 2 % des certificats créés, et, d'autre part, l'ensemble de l'habitat social.

J'en viens maintenant au projet d'EDF et GDF Suez de créer un passeport énergétique. Les deux principaux obligés ont en effet tenté d'orienter les discussions portant sur la troisième période vers la création de ce passeport, lequel aurait consisté en un document qui, suite à une analyse réalisée par un audit externe, ferait le bilan des économies d'énergie possibles dans chaque bâtiment concerné de façon à orienter les travaux à venir. Il nous a semblé que, si un dispositif de ce type était intéressant et justifié du point de vue technique, le volume des actions qu'il aurait représenté aurait été tel qu'il aurait capté l'ensemble des flux financiers représentés par le certificat d'économie d'énergie et provoqué ainsi une baisse d'activité considérable dans l'ensemble du secteur du bâtiment et de l'artisanat. En outre, il ne s'inscrivait pas dans la logique du dispositif. Nous avons donc proposé d'en faire un programme expérimental.

Enfin, une plateforme d'échange des certificats a été concédée à une entreprise privée. Or, son mode de fonctionnement nous inquiète quelque peu. À l'origine, une bourse avait été créée par Powernext, qui n'a fonctionné qu'un an en raison de l'insuffisance des échanges trafic. Aujourd'hui, il s'agit d'une simple plateforme informatique où n'importe qui peut opérer sans aucune garantie : il n'y a ni carnet d'ordres ni prix affichés, uniquement des demandes et des offres de quantités. Il nous a semblé que cela pouvait être source de trafics et d'escroqueries, dont quelques collectivités territoriales, du reste, ont été victimes en 2012. Nous avons donc demandé que ce système fasse l'objet de contrôles et soit remplacé, sinon par un marché – les volumes ne le justifient pas –, du moins par une véritable plateforme d'échanges sécurisée comprenant une intermédiation et un carnet d'ordres chiffrés.

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