Intervention de Chantal Guittet

Réunion du 10 juin 2014 à 18h00
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChantal Guittet, co-rapporteure :

Les relations bilatérales entre l'Union européenne et la Géorgie datent de l'accession à l'indépendance de ce pays après la disparition de l'Union soviétique. Fondées sur l'accord de partenariat et d'association entré en vigueur en 1999, ces relations se sont intensifiées après la « révolution des roses » de 2003 après laquelle la Géorgie a entamé une politique ambitieuse de réformes structurelles qui ont été jugées positives par ses partenaires européens.

En 2006, un plan d'action a renforcé ce partenariat et a resserré la coopération entre les deux parties. L'épisode douloureux de la guerre avec la Russie en 2008 a rapproché la Géorgie et son partenaire européen . On peut ainsi faire le parallèle entre cette guerre survenue à propos des régions séparatistes d'Ossétie du Sud et d'Abkhazie et les événements se déroulant actuellement en Ukraine. Le conflit de 2008 s'inscrivait dans une logique de tensions récurrentes entre la Géorgie et la Russie qui avait culminé lors de l'embargo décidé par la Russie en 2006, qui avait déstabilisé l'économie géorgienne. La guerre de 2008 est un de ces conflits qui se poursuivent de façon larvée, avec des différends territoriaux et surtout la déclaration d'indépendance de l'Ossétie du Sud . Il faut noter que la guerre de 2008 était la première fois que la Russie intervenait directement et militairement depuis l'invasion de l'Afghanistan. Ce conflit a été l'occasion pour l'Union européenne de se poser comme médiateur et la présidence française a largement contribué à trouver une solution pacifique.

L'accession au pouvoir en octobre 2012 du milliardaire Bidzina Ivanichvili à la tête de la coalition « Rêve géorgien » , présenté comme un partisan de la Russie, a fait naître quelques inquiétudes au sein de l'Union européenne. Mais finalement, la politique de rapprochement avec l'Europe et la consolidation des liens n'ont pas été remises en question, même si le gouvernement actuel est favorable à des relations plus apaisées avec la Russie .

Comme cela l'a été souligné, le partenariat oriental n'a pas vocation à amorcer le processus d'adhésion de ces pays à l'Union européenne. Par ailleurs, il ne doit pas être présenté comme une occasion de confrontation entre la Russie et l'Europe, alors que cela a parfois été vécu comme tel. Le partenariat oriental a sans doute été mal présenté sur ce point et il faudrait redire qu' il vise à donner à ces pays plus de moyens pour assurer leur développement démocratique et économique et à permettre à leurs citoyens d'avoir de meilleures conditions de vie. En aucun cas, le partenariat oriental n'empêche ces pays d'avoir des relations avec la Russie dans le cadre plus général d'un partenariat eurasien.

Depuis son indépendance, le rapprochement avec l'Union européenne est une position géostratégique permanente et consensuelle de la Géorgie. Elle souhaite adhérer à l'Alliance atlantique dans laquelle elle voit la garantie de sa sécurité face à la Russie et les événements survenus en Crimée ont renforcé cette position. La Géorgie est membre du partenariat pour la paix depuis 1998. Le soutien de ce pays aux opérations dirigées par l'OTAN constitue un domaine de coopération important. La Géorgie est actuellement , parmi les pays ne faisant pas partie de l'OTAN, le plus important fournisseur de troupes à la Force internationale d'assistance à la sécurité en Afghanistan. Elle participe aussi aux opérations en Centre Afrique. Cependant, même si lors du sommet de l'OTAN en 2012, les alliés se sont félicités des progrès accomplis par la Géorgie pour répondre aux critères de l'Alliance atlantique, cette adhésion n'est pas encore actée.

Sur le plan économique, la Géorgie a, très tôt et très clairement, adopté une économie de marché. Membre de l'Organisation mondiale du commerce depuis 2000, le gouvernement géorgien a mené une série de réformes de lutte contre la corruption , de protection des investisseurs et de simplification fiscale. L'objectif affiché est d'attirer les investisseurs étrangers. Ces efforts paient puisque d'après le classement « Ease of doing bussiness indicator » de la Banque mondiale, la Géorgie se situe à la neuvième place des pays où il est le plus facile d'entreprendre, avant la France ou le Luxembourg. En trois jours, il est possible d'y créer une entreprise. Le pays connait une forte croissance même la crise mondiale de 2008 et l'embargo russe ont eu des répercussions sur son rythme. Le taux de croissance était de plus de 6 % en 2012 et il a encore été de 2,5 % en 2013. Cependant, la sortie de crise a été largement soutenue par l'aide financière internationale et le taux de chômage est élevé – de l'ordre de 15 %- . Par ailleurs, la dynamique de croissance repose largement sur les investissements étrangers et le secteur des services , au détriment des secteurs industriel et agricole. L'accord d'association et l'accord de libre-échange sur lequel notre commission doit se prononcer permettra de soutenir l'économie géorgienne. Ils visent ainsi à accélérer l'approfondissement des relations politiques et économiques entre la Géorgie et l'Union européenne débutées dès 1992 par la signature d'un accord de partenariat et de coopération (APC).Pour accompagner les accords d'association avec la Moldavie et la Géorgie, l'Union européenne a annoncé en mai dernier un plan de soutien de 60 millions d'euros, répartis également entre les deux pays. L'aide à la Géorgie portera davantage sur la modernisation des institutions publiques, la compétitivité des entreprises rurales et les occasions commerciales avec l'Union européenne ainsi que la protection des droits des minorités et des groupes vulnérables.

L'accord d'association comprend des clauses classiques, trois points étant particulièrement accentués. D'abord, s'agissant des conflits territoriaux, l'accent est mis sur l'attachement de la Géorgie à la réconciliation et sur les efforts pour rétablir son intégrité territoriale, en vue d'un règlement durable des conflits. Par ailleurs, est souligné la nécessité d'améliorer la sécurité de l'approvisionnement énergétique. Sur ce point , rappelons que la Géorgie se situe sur la route des hydrocarbures et qu'elle a, dès 2006, affirmé sa volonté de ne pas être dépendante de l'approvisionnement en gaz russe se tournant également vers l'Azerbaïdjan. Enfin, en matière de migration, d'asile et de gestion des frontières, est affirmée l'importance d'une gestion conjointe des flux migratoires et de la mise en oeuvre de l'accord signé en décembre 2008 entre l'agence européenne Frontex et le ministre de l'intérieur géorgien. En effet, il existe une certain nombre de problèmes liés aux bandes organisées géorgiennes qui viennent sur le territoire des États européens, notamment en France . Un accord a d'ailleurs été signé entre la France et la Géorgie sur la coopération en matière de sécurité intérieure.

La création d'une zone de libre-échange entre l'Union européenne et la Géorgie est un volet important de cette association. Cette zone de libre-échange doit être resituée dans un cadre plus général car la politique commerciale est une composante de la politique étrangère européenne. Il faut par ailleurs noter que l'Union européenne réalise 12 % de ses échanges avec les pays de la CEI (communauté des États indépendants) contre 3 % en 1992. La région Europe-CEI présente l'intégration régionale la plus poussée au monde avec une part de commerce intra zone de plus de 70 %. Même si la Géorgie ne fait plus partie de la CEI, cette régionalisation des échanges est un des aspects importants de la politique commerciale européenne. L'Union européenne est déjà le premier partenaire commercial de la Géorgie, représentant près de 27 % des échanges totaux du pays. Son intégration devrait constituer un vecteur de croissance pour la Géorgie et créer des perspectives des deux côtés. Pour pouvoir entamer les négociations avec l'Europe, la Géorgie a déjà largement entamé des réformes dans le domaine des réglementations techniques, des mesures sanitaires et phytosanitaires, des règles de propriété intellectuelle et de concurrence. Cet accord de libre-échange comprend des clauses relativement « standards », avec une suppression des droits de douane sur la quasi-totalité des échanges et un processus de compatibilité entre les produits. Cet accord est d'application immédiate et comprend une protection spécifique des indications géographiques européennes .

La Commission a ensuite adopté les conclusions suivantes :

« La Commission des affaires européennes,

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