Intervention de Jean-Christophe Niel

Réunion du 16 avril 2013 à 17h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Jean-Christophe Niel, directeur général de l'ASN :

Ma présentation sera ordonnée suivant les missions essentielles de l'ASN : la réglementation, les autorisations, les inspections, l'information et la gestion des situations d'urgence.

Concernant la réglementation, en février 2012, un arrêté dit « Installations nucléaires de base » ou « INB » a été pris. Il renforce l'encadrement réglementaire des installations nucléaires de base, notamment au travers de l'intégration des niveaux de sûreté de référence définis de l'association des autorités de sûreté européennes WENRA (Western European Nuclear Regulators Association), donc partagés par l'ensemble de ces autorités. Cet arrêté impose également une exigence de surveillance par l'exploitant des sous-traitants qui interviennent sur des composants importants pour la sûreté. Cette fonction de surveillance ne peut donc être elle-même sous-traitée. Un travail significatif est actuellement en cours au niveau européen pour opérer une refonte des trois directives existantes en une seule, avec des évolutions et des améliorations pour la protection contre les rayonnements ionisants du public, des travailleurs et des patients. Ces travaux sont en cours et devraient aboutir en 2013. L'ASN se montre très impliquée dans cette démarche sur la directive appelée « Normes de base ». Nous nous engageons par ailleurs dans un renforcement de la réglementation sur la radiographie industrielle. Ce sujet, comme l'a indiqué le président Chevet, nous préoccupe car il comporte des risques. Nous souhaiterions encadrer réglementairement plusieurs évolutions. Il s'agit notamment de favoriser les méthodes de substitution et utiliser des méthodes de contrôle non irradiantes ou moins irradiantes. Nous désirerions également un renforcement des dispositions de gestion des dysfonctionnements. Enfin, un projet de loi a été déposé sur la sécurité des sources en mars 2012 au Sénat.

S'agissant des autorisations, l'ASN intervient soit en émettant des avis sur des textes réglementaires pris par le Gouvernement, soit directement en prenant des positions. Sur les installations nucléaires de base, l'installation expérimentale de fusion ITER a été créée en 2012 à Cadarache. Le décret de création de l'accélérateur de particules GANIL de Caen a été modifié. Par ailleurs, tous les dix ans, les installations font l'objet d'un réexamen de sûreté. Cet exercice comprend deux parties : un examen de conformité de l'installation à ce qu'elle doit être et un renforcement de la sûreté. L'ASN a pris position sur le réacteur numéro 2 du site de Bugey, considérant que l'exploitation pourrait être poursuivie, sous réserve du respect d'un certain nombre de prescriptions. Nous avons par ailleurs constaté le respect des prescriptions sur le réacteur numéro 1 de Fessenheim et l'ASN a donné son accord pour que les opérations d'épaississement du radier, une action qui faisait partie des 40 prescriptions que nous avions formulées en juillet 2011, soit engagées. Dans les autres domaines, l'ASN a délivré 639 autorisations dans le domaine médical et 257 nouvelles dans le domaine des sources radioactives.

J'en viens aux inspections qui constituent un domaine essentiel de contrôle. Elles couvrent l'ensemble de notre champ d'activité, qu'il s'agisse du nucléaire de proximité, le médical, la recherche et l'industrie classique ou le transport, des grosses installations nucléaires de base, des équipements sous pression ou des organismes et laboratoires agréés qui réalisent un certain nombre de contrôles prévus par la réglementation. Par jour ouvrable, une dizaine d'inspections sont réalisées par l'ASN. En 2012, nous avons réalisé 2 093 inspections. Nous sommes également chargés de l'inspection du travail sur les centrales nucléaires et avons réalisé 281 journées d'inspection du travail en 2012.

Chaque inspection fait l'objet d'un programme élaboré par l'ASN en fonction de l'importance des enjeux. Nous avons ainsi effectué 107 inspections dans le domaine de la radiographie industrielle et nous avons effectué 143 inspections dans le domaine de la radiothérapie, un sujet que nous suivons de près puisqu'il présente potentiellement des risques importants. Ces inspections peuvent donner lieu à des actions de coercition ou de sanction, notamment des procès-verbaux et des mises en demeure. En 2012, nous avons dressé 23 procès-verbaux et 10 mises en demeure dont 7 sur des installations nucléaires de base. Les lettres de suites d'inspection sont toutes publiques depuis quelques années. Au 31 décembre 2012, 10 445 lettres étaient publiées sur notre site.

En matière d'information et de transparence, l'ASN rend compte au Parlement. Comme le président de l'Office l'a précisé en début de séance, le rapport sur l'état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection 2011 a été présenté tardivement, le 16 octobre 2012, en raison des périodes d'élection. Nous revenons cette année dans le schéma traditionnel du début du mois d'avril. L'ASN a également été auditionnée dans le cadre des procédures budgétaires sur Fukushima et sur la gestion des déchets. Deux auditions récentes ont concerné le PNGMDR, le 28 février et le 21 mars 2013. Nous pratiquons une information des médias et du public. 86 notes d'information et communiqués de presse ont été publiés sur notre site et nous avons réalisé deux conférences de presse sur Fukushima, le 3 janvier 2012, lorsque nous avons rendu notre avis sur les évaluations complémentaires de sûreté, et le 28 juin 2012, suite à notre décision, en date du 26 juin, imposant un nombre important de prescriptions aux opérateurs. Nous avons également pris la décision cette année, en accord avec l'IRSN, de rendre publiques nos décisions les plus importantes en parallèle avec ses avis.

Concernant les incidents, hors du domaine médical patient, nous avons recensé 149 incidents de niveau 1 et 4 incidents de niveau 2, un pour EDF, un pour le CEA, un pour Areva et un pour le transport. La radiothérapie fait l'objet d'une échelle spécifique dite « ASN SFRO ». 142 événements de niveau 1 se sont produits et 3 événements de niveau 2.

Les sites EDF sont répartis en trois catégories. Cette évaluation est réalisée par nos inspecteurs sur la base de nos inspections, des événements déclarés, de l'instruction des dossiers qui nous sont soumis par EDF et du suivi des arrêts de tranche, une activité d'importance pour l'ASN. Nous en déduisons de manière générale que dans le domaine de la sûreté nucléaire, trois sites se détachent favorablement cette année. Il s'agit des sites de Blayais, Fessenheim et Penly. Pour Fessenheim, nous constatons une diligence particulière d'EDF pour répondre à nos demandes. Nous avons également noté des progrès importants en matière de sûreté nucléaire sur le site de Saint-Laurent. En radioprotection, se distinguent favorablement les sites de Blayais, Civaux, Saint-Laurent et Golfech. Dans le domaine de l'environnement, nous citerons Dampierre. Parmi les sites en retrait dans le domaine de la sûreté figurent Civaux, Cruas, Paluel ainsi que Chinon même si, sur ce site, nous constatons une évolution positive. Notre analyse nous conduit cependant à le laisser parmi les sites en retrait. Dans le domaine de la radioprotection, deux sites restent en retrait : Cattenom et Fessenheim. Dans le domaine de l'environnement, enfin, nous considérons qu'EDF doit réaliser des progrès importants, en particulier sur les sites de Belleville, Chinon, Civaux et Tricastin. Le site de Saint-Alban reste en retrait même si nous constatons des progrès.

Sur la gestion des situations accidentelles, l'ASN participe à des exercices de crise nationaux. Traditionnellement, une dizaine de ceux-ci sont organisés chaque année. Pour des raisons de période de réserve, l'année 2012 s'est avérée plus restreinte, avec seulement cinq exercices. Notre centre de crise a été gréé à l'occasion de l'incendie puis de la fuite d'une pompe du circuit primaire du réacteur de Penly le 5 avril 2012.

La gestion des situations accidentelles comprend également le post-accidentel. Une fois que la phase aiguë de l'accident est terminée, des territoires importants peuvent s'avérer contaminés et des populations évacuées. Il s'agit de déterminer la façon dont cette situation est gérée. L'ASN a engagé un travail en 2005 et en octobre 2012 nous avons rendu publics les premiers éléments de doctrine sur cette démarche post-accidentelle. Je rappelle que cette démarche pluraliste a impliqué près de 300 experts et personnes en responsabilité sur ces sujets, d'horizons divers (administrations, experts, opérateurs, associations, étrangers, etc.). Cette publication représente une étape importante même si elle est loin de terminer le processus.

Je terminerai en évoquant quelques éléments sur le fonctionnement de l'ASN. Nous avons défini un plan stratégique pluriannuel qui est public. Le plan couvrant les années 2013 à 2015 vient d'être validé par l'ancien et le nouveau collège, à l'occasion d'une séance commune organisée lors de la transition. Ce travail participatif implique les membres de l'ASN. Il constitue notre feuille de route pour les années à venir. L'ASN a connu en 2012 son premier contrôle en tant qu'autorité administrative indépendante par la Cour des comptes. Ce contrôle s'est notamment traduit par des recommandations sur le besoin de simplification budgétaire pour faciliter la gestion du budget dédié au contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. Une recommandation a également été formulée sur la prise en charge effective du contrôle de la sécurité des sources. Nous avons la volonté de rendre compte et nous allons recevoir en 2014 une mission d'audit dite IRRS – Integrated Regulatory Review Service –, une procédure lourde pour l'ASN qui consiste à recevoir des autorités de sûreté étrangères dans le cadre d'une mission d'audit. Ces autorités vont examiner notre fonctionnement dans le détail. Nous avions effectué un premier audit en 2006 avec une mission de suivi en 2009. Nous poursuivons cet investissement.

Le travail que nous vous présentons n'est rendu possible que grâce au professionnalisme et à l'engagement des personnels de l'ASN auxquels j'associerai également les personnels de l'IRSN qui nous appuient au quotidien sur l'ensemble de ces actions.

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