Intervention de Michel Bourguignon

Réunion du 16 avril 2013 à 17h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Michel Bourguignon, commissaire de l'ASN :

La radiologie interventionnelle rassemble toutes les méthodes diagnostiques et thérapeutiques réalisées sous contrôle radiologique. Il ne s'agit pas d'un contrôle radiologique au sens d'une radiographie mais d'un contrôle radioscopique, le patient étant placé sous le faisceau de rayonnement. La radiologie interventionnelle remplace de plus en plus la chirurgie. Elle représente aujourd'hui le deuxième poste d'exposition médicale après le scanner. Les radiologues interventionnels sont bien connus dans la cardiologie, notamment la coronarographie, pour dépister une sténose coronaire. Elle se développe aussi dans de nombreux domaines, en neurologie, en gastroentérologie, en chirurgie. De plus en plus de praticiens utilisent la radiologie interventionnelle car elle n'implique pas d'acte chirurgical invasif. Il s'avère plus facile de monter une sonde dans le cerveau que d'ouvrir la boîte crânienne. Deux types de risques sont associés à ce développement. Le premier concerne le praticien qui effectue l'acte. La formation première de celui-ci n'est pas une formation de radiologue. Il connaît donc moins bien le rayonnement. En outre, il effectue des actes relativement complexes et a un peu tendance à oublier les rayons. L'utilisation du rayonnement passe ainsi en second par rapport au geste médical lui-même. Le praticien est concerné car il se trouve très proche du tube à rayons X. Nous avons vu se développer des radiodermites et des problèmes de cataracte. La protection des travailleurs pose problème mais aussi celle du patient. Nous rencontrons également des radiodermites, chiffrées à quelques dizaines en France, résultant de gestes de radiologie interventionnelle qui ont duré parfois deux ou trois heures, pour les opérations au niveau du coeur ou du cerveau. Il convient de soigner ces radiodermites mais nous ne savons pas encore très bien le faire. Dans ce domaine, l'ASN s'attache à contrôler la radiologie interventionnelle plus qu'elle ne le faisait par le passé, par le biais de ses divisions régionales. Le Collège a par ailleurs pris une position ferme sur le sujet pour bien illustrer le problème et aller plus loin dans le domaine de la formation des professionnels à la radioprotection des patients, en particulier ceux dont le métier initial est éloigné du rayonnement ionisant. Nous avons également demandé le renforcement de la place du physicien médical dans ce domaine de l'imagerie médicale. Enfin, nous avons favorisé l'élaboration de guides professionnels pour leur permettre de cerner les questions.

S'agissant des cellules souches mésenchymateuses, il s'agit de cellules souches jeunes qui présentent une potentialité, par leur division et par les signaux qu'elles émettent.

Depuis une dizaine d'années, sous l'impulsion des équipes de l'IRSN pour la radiologie et la radio-pathologie chez l'animal, ainsi qu'avec le soutien de l'hôpital Percy dont le service d'hématologie est à même de fabriquer ces cellules souches par centaines de millions et dont le service de chirurgie lourde et de chirurgie esthétique peut réaliser le retrait des tissus qui vont mourir et les greffes nécessaires, nous avons vu apparaître l'utilisation de ces cellules souches mésenchymateuses dans le traitement des brûlures radiologiques accidentelles. Ces brûlures sont causées par des sources de gammagraphie industrielle perdues sur des chantiers et qu'un ouvrier ramasse et met dans sa poche. Ces brûlures gravissimes se soldaient jusqu'à présent par la mort, malheureusement assez lente, du patient par la nécrose progressive des tissus. Les équipes françaises ont réussi à montrer que par un traitement beaucoup plus radical et précoce de la zone lésée avec les cellules souches, il s'avérait possible d'apporter la guérison. Plusieurs cas ont été expérimentés. Le miracle immédiat apporté par ce traitement tient à la disparition des douleurs, ce qui mérite d'être souligné, car aucun médicament n'a d'effet sur ces douleurs. Le suivi des patients a montré que le résultat se révèle durable. Des résultats tout à fait remarquables ont ainsi pu être constatés sur des brûlures de la fesse et de la main.

Dans le cadre de l'accident d'Épinal, les équipes ont essayé de soigner ces patients qui souffrent de brûlures radiologiques résultant de la radiothérapie. Nous pourrions imaginer, par extension, une utilisation au titre des complications. La technique a été utilisée à titre compassionnel. Des incertitudes demeurent cependant sur l'utilisation de ces cellules souches, qui reste encore un peu timide. Chaque utilisation a cependant démontré des effets bénéfiques, surtout chez les patients présentant des brûlures graves, même si le nombre de patients, entre 10 et 20, reste encore très réduit. Il n'existe pas encore de grand programme national sur le sujet, alors qu'un tel programme pourrait être imaginé pour le traitement des complications normales de la radiothérapie. Ces cas ne relèvent pas d'accidents ni d'erreurs de dosage. Ils tiennent parfois simplement au fait que le patient se révèle plus radiosensible. Nous portons une attention particulière à ce sujet car il est probable que 10 % de la population se montre plus sensible aux rayonnements que les 90 % restant. Dans le cadre d'une radiothérapie normale, ces personnes peuvent souffrir de brûlures radiologiques qui pourraient être traitées d'une façon très efficace par des greffes de cellules souches. Nous sommes encore au stade de la recherche. Si nous parvenons à réaliser le tour d'horizon de ce que représentent la radiosensibilité individuelle et les complications sévères de la radiothérapie, nous pourrons réaliser de grands progrès car nous pourrons utiliser ces cellules souches à une plus grande échelle.

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